Les doigts de chèvrefeuille de la nuit de Monique Thomassettie

Les doigts de chèvrefeuille de la nuit de Monique Thomassettie

Catégorie(s) : Théâtre et Poésie => Poésie

Critiqué par Dinama, le 2 janvier 2008 (Inscrite le 2 janvier 2008, 53 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (22 907ème position).
Discussion(s) : 1 (Voir »)
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De roses, de chèvrefeuilles, d’avenir du monde et de spiritualité

Constitué de trois suites poétiques (« Ivresse de roses », « Les doigts de chèvrefeuille de la nuit » et « Améthyste élégie ») suivies d’un dialogue (« Rêve ») dont l’auteur nous dit qu’il a été imaginé à partir d’un rêve réel, ce nouveau recueil est un jalon de plus dans la mise en art de ses méditations, qui s’affirme depuis son premier ouvrage comme la voie spirituelle de Monique Thomassettie.
Une voie spirituelle ancrée dans la réalité du monde.
En première couverture, un pastel de l’auteur (qui est aussi peintre). Une femme accroupie semble y écarter de la main la prétention d’un monstre (ou s’agit-il d’un dieu, d’un tyran, de la pensée unidimensionnelle qui menace notre monde ?) à imposer sa loi. Aussi frêle que se sente l’auteur, aussi menacée, elle se veut libre. Une liberté qui se retrouve dans sa poésie, farouchement personnelle, fermement à l’écart des chapelles et des modes.

Ne fût-ce qu’oser le mot « rose », quasiment banni de la poésie française contemporaine après avoir été symbole poétique par excellence (et de l’être toujours dans nombre de poésies étrangères, moins soumises aux oukases ; il n’est pas étonnant que Monique Thomassettie, nous dit l’éditeur, soit appréciée en Croatie ou en Bosnie). A noter que ces roses évoquent aussi un tableau, "Roses d'air", repris en 4° de couverture.
« La perte est la pensée / qui plie et plisse / non sans narguer / des parfums de roses / Les enchevêtre aux mots / afin de leur donner chair / Puis ouvre les pétales // C’est la tentation épanouie / d’une pensée qui s’offre. »
Fusion de la méditation, de la sensualité, de la présence au concret du monde, mais dans ce qu’il a de plus subtil.
De plus menacé, aussi : et l’auteur de citer « l’Élégie contre les bûcherons de la forêt de Gastine », ce texte de Ronsard, oublié pour avoir été trop rabâché, qui nous semble aujourd’hui tellement prémonitoire.
« A tant de bûcherons / il fut demandé d’arrêter le bras ! / Qu’aujourd’hui ils rafraîchissent / leur tête enflée de faux calculs / dans les eaux froides encore / des deux pôles fondant // S’il m’arrive de déraciner / respectueusement l’arbre, / je ne le coupe pas // Proche est l’heure / d’une vaste élégie »
Poésie animiste, animée, où se mêlent et s’appellent sensations et pensées, amour et angoisse, visions (au sens de : visionnaire) et prémonitions.
« En mon nocturne fleuri / deux graines laconiques / ont germé / en énigmatiques / et généreux chèvrefeuilles // Deux notes complexes / m’ont alors offert / un concert innombrable // De multiples voix / ont invité la mienne »
Poésie à la fois ample et intime, l’intimité de la perception ouvrant sur l’immensité de l’univers, l’immensité de l’univers éveillant l’intimité de la perception.
« L’insaisissable est appel // Course folle / après des nuages // Libre dans les champs d’azur / et d’herbe sauvage // Courir et emplir / sa pensée / de son souffle cadencé / du battement de son cœur accéléré // Puis tendre au ciel / une coupe de souffle / et de sages soupirs »

Dans le dialogue qui clôture le livre, l’homme créé par le rêve se matérialise et dialogue avec la femme qui l’a rêvé, dont il est émanation. Permanent court-circuit entre les diverses strates du réel et leur résonance dans celles de la création, entre les diverses strates de la création et leur résonance dans celles du réel.
« Quel merveilleux rêve… Énigmatique… Le merveilleux est-il proportionnel à l’énigme ? Deux énigmes, deux questions… Cet homme, qui est-il ? Quelle est sa compréhension de mon histoire ? Le merveilleux se trouve d’abord dans la transformation du vent en air musical, puis dans l’incarnation de cette musique en homme… (Elle se lève). Le merveilleux ira-t-il jusqu’à me présenter cet homme, le faire apparaître dans ma vie éveillée ? Mais ce rêve me semble plus éveil que mon réveil ignorant… L’ignorance est sans merveille ! »
Et cette chute, en guise de conclusion :
« La femme (A part elle) : Le réel de mon rêve sera-t-il ignorance et oubli ? Ou bien mon réveil sera-t-il un merveilleux éveil ? Le rêve, au risque du réel…
L’homme (Il s’approche d’elle) : J’entends ta pensée… Seul ton cœur pourra te répondre…
La femme : Et le tien… »

Message de la modération : Monique Thomassettie est responsable de la collection "Poésie" des éditions M.E.O.

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Création poétique permanente

8 étoiles

Critique de Sahkti (Genève, Inscrite le 17 avril 2004, 50 ans) - 3 janvier 2008

Heureuse de voir que l'ISBN pour ce livre marche enfin!

Quel plaisir de retrouver la poésie et les mots si doux de Monique Thomassettie!
Le végétal, la matière, la nature sont mis à l'honneur dans une poésie de mouvement et de création. Les mots s'entrecroisent pour donner naissance à des tableaux et esquisser des morceaux de vie en constante évolution, mais aussi en perpétuelle interrogation.
Ce que j'aime particulièrement dans les lignes de ce recueil et la belle poésie de Monique Thomassettie, c'est tout ce qui est suggéré et qui continue à se créer sous les yeux du lecteur alors que les mots sont posés sur papier et nous contemplent en silence. Les interprétations sont multiples et c'est ce qui constitue une des richesses du travail. Sans oublier les nombreux symboles disséminés ci et là et puis, en filigrane, tout au long du recueil, un beau message d'espoir, d'amour, un sentiment qui fait que malgré la gravité de certains poèmes, malgré tout ce qu'ils peuvent soulever dans les tiroirs cachés de la mémoire, il y a quelque chose qui pousse à aller de l'avant. Ce n'est pas une poésie de "bonne conscience", non, pas quelque chose qui dit que le monde est beau et qu'il faut s'aimer, c'est bien plus subtil; ce sont des mots qui aident à voir plus clair et comprendre que oui, la vie est là, à nous de la construire.

"Sur une mer étale
vaste plateau d'émaux
la fée a offert une histoire
puis l'a oubliée
prise par d'autres contes

Un pétale d'air bleuté lui revient
ombragé"
(page 29)

Sites Internet :
http://rezolibre.com/librairie/detail.php/…
http://www.mode-est-ouest.eu/
http://home.scarlet.be/moniquethomassettie/…

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  Errare… 1 Dinama 2 janvier 2008 @ 21:18

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