La vie de Tchekhov de Irène Némirovsky

La vie de Tchekhov de Irène Némirovsky

Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances

Critiqué par Saule, le 9 octobre 2007 (Bruxelles, Inscrit le 13 avril 2001, 59 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (25 719ème position).
Visites : 6 387  (depuis Novembre 2007)

Une âme mélancolique

Irène Némirovsky fait un portrait de Tchekov, l'homme et l'écrivain, et c'est vraiment très intéressant. Il y a une certaine fraternité entre les deux écrivains, d'abord parce qu'ils sont russes et presque contemporains, et ensuite il y a la même sensation de mélancolie et de détachement, presque du fatalisme, qui pointe dans leur écrits.

Tchekov est dépeint comme un personnage attachant, un enfant calme et réfléchi malgré une enfance très dure (pauvreté, père tyrannique, il faut se rendre compte de ce qu'était la vie à cette époque pour les paysans russes !). Elle commente certaines oeuvres de Tchekov ("accents où se mêlent la plaisanterie, la mélancolie et un calme désappointement, c'est Tchekov, son ton inoubliable") : ça c'est très intéressant d'avoir le point de vue d'une autre grande écrivaine, j'ai beaucoup aimé les quelques lignes qu'elle consacre à "La Steppe" qui est mon livre fétiche. Elle parle aussi de l'influence (néfaste) de Tolstoï sur l'oeuvre de Tchekov, de leur différence de caractère.

Un passage de la pièce "Les trois soeurs", qui résume un peu la scepticisme de Tchekov et son attitude détachée à l'égard de la vie :

"- Dans un million d'années, la vie sera la même : elle ne change pas; elle demeure constante; elle suit ses propres lois, dont nous n'avons que faire, ou, du moins, que vous ne connaîtrez jamais. Les oiseaux, les cigognes, par exemple, volent et volent, et quelles que soient les pensées, grandes ou petites, qui errent dans leurs têtes, elles continueront à voler et à ignorer pourquoi et où elles vont. Elles volent et voleront, quels que soient les philosophes qui se trouveront parmi elles; et qu'ils philosophent tant qu'ils veulent, pourvu qu'elles volent..."

Irène Némirovsky écrit très bien, par contre le livre est un peu fragmenté et ressemble par moment à une mosaïque de notes éparses. Une semi-déception donc malgré mon attachement à ces deux personnages.

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En résonance

8 étoiles

Critique de Béatrice (Paris, Inscrite le 7 décembre 2002, - ans) - 3 décembre 2010

Une bio écrite probablement à la hâte, comme un brouillon. Mais – bonne surprise – le texte est convaincant, il sonne juste, il dégage une certaine énergie vitale. Il y a des scènes, des tableaux évocateurs qui éclairent le milieu, l’état d’esprit, l’œuvre.

Le jeune écrivain rédigeant avec une grande facilité des textes à 5 roubles pour les journaux ; l’accueil en dents de scie de son œuvre théâtrale ; un parallèle entre les convictions de Tolstoï et celles de Tchekhov ; un aperçu du rôle de l’homme de lettres, qui était vu comme un maître à penser.

Extrait
« Le grand seigneur, Tolstoï, idéalisait les humbles ; le roturier, Tchekhov, avait trop souffert de la grossièreté, de la lâcheté de ces humbles pour ressentir envers eux autre chose qu’une compassion lucide. Tolstoï méprisait l’élégance, le luxe, la science, l’art. Tchekhov aimait tout cela. [] Mais, sans doute, le précipice entre eux, qui ne put être comblé, provenait du fait que Tolstoï était croyant, et que Tchekhov ne l’était pas. L’un avait une foi torturée ; l’autre, une incrédulité calme. [] Tolstoï enseignait que l’homme n’a pas besoin ni de terre, ni d’espace, ni de liberté, ni d’amour humain pour retrouver son âme, que, par-dessus tout, il ne doit rien désirer. Et Tchekhov, vieillissant, poitrinaire, qui possédait si peu de chose en ce monde, protestait : Dieu a créé l’homme pour qu’il soit vivant, pour qu’il connaisse la joie et l’angoisse, et le malheur (En Exil)».

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