Métamorphoses d'un mariage de Sándor Márai

Métamorphoses d'un mariage de Sándor Márai
(Az igazi, Judit, és az utóhang)

Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone

Critiqué par Tanneguy, le 16 juillet 2007 (Paris, Inscrit le 21 septembre 2006, 84 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 8 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (1 700ème position).
Visites : 6 437  (depuis Novembre 2007)

Maîtrise du roman !

L'histoire est simple : l'héritier d'une famille de la grande bourgeoisie hongroise s'éprend de la bonne à tout faire de la famille. Il divorcera de sa première femme, issue de son milieu pour épouser la bonne mais cette union n'aura pas plus de succès que la précédente. Le récit se fait par de longues conversations plus ou moins imaginaires menées par les protagonistes. D'abord la première femme qui a du mal à comprendre le comportement de son mari, mais qui lui conserve malgré tout amour et affection. Le mari exprime ensuite son désarroi vis à vis de ses épouses successives. Enfin la deuxième épouse révèle les détails de sa vie, comme servante puis comme épouse. L'histoire se termine après la prise du pouvoir des soviétiques en 1949, et l'exil forcé des "riches" brutalement dépossédés de leurs biens, en Italie ou aux Etats-Unis.

Le début du roman est parfois déroutant car l'auteur évoque des évènements qui seront évoqués plus tard dans le récit ; mais il faut s'accocher et on en est grandement récompensé. La situation sociale de la Hongrie entre les deux guerres est brillamment décrite, la vie des "bourgeois" comme celle du petit peuple miséreux est finement analysée et apporte sans doute bien des clés au lecteur occidental bien souvent ignorant de ces faits historiques. La prise de Budapest en 1945 et les sièges successifs simplement évoquée donne envie de se documenter sur des évènements qu'il est important de connaître aujourd'hui, lors de la construction européenne.

Style magnifique ! Une lecture gratifiante.

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Pour lecteur persévérant, mais vaut le détour

8 étoiles

Critique de Pacmann (Tamise, Inscrit le 2 février 2012, 59 ans) - 25 septembre 2012

Sandor Marai nous livre ici une œuvre d’un haut niveau littéraire.

Les acteurs principaux évoquent chacun à leur tour la même histoire et apportent leur vision personnelle de leur vécu.

Le récit en lui-même n’est a priori pas ce que j’ai lu de plus captivant et pourrait se résumer en une chronique de la bourgeoisie hongroise de l'entre deux-guerres.

Cependant, les différentes réflexions sur le sens de la vie fait souvent oublier le manque d’intérêt du thème abordé dans ce livre.

Il s’agit clairement d’une œuvre pessimiste, genre fin d’une époque, et l’auteur parvient à merveille à faire percoler cette atmosphère dans l’esprit du lecteur.

Il m’a en tout cas donné envie de découvrir ses autres romans.

Tellement pays de l'Est

8 étoiles

Critique de Rosenoire (, Inscrite le 5 août 2011, 53 ans) - 3 décembre 2011

C’est un triple voyage que nous offre S Marai : voyage au plus profond des sentiments humains, mais aussi dans le temps (début du XXème siècle) et dans l’espace : en Hongrie.
Derrière le titre qui semble traiter du seul mariage se dessine en effet tout au long du livre la description sur un plus d’un demi-siècle de l’évolution d’un pays, la Hongrie, et du sort réservé à ses ressortissants, l’ensemble de la société y étant évoqué de la noblesse, à la bourgeoisie en passant par l’intellengtsia ou encore ‘le petit peuple’(domestiques paysans et ouvrier).
Il faut dire que le pays est demeuré très longtemps marqué par une organisation très traditionnaliste et pyramidale de la société du fait de la prégnance de la noblesse et de l’aristocratie ; ce qui s’est traduit par un retard sensible en matière de développement économique et agricole par rapport aux pays d’Europe de l’Ouest notamment.
En lisant métamorphoses d’un mariage, on est complètement immergé dans la culture des Etats d’Europe de l’Est à compter de 1910 et on pressent certains des éléments qui ont permis au communisme de s’installer dans ces pays. Les bourgeois semblent en effet sortis d’une caricature – à titre d’anecdote, il est raconté que chaque membre de la famille a ses toilettes attitrées auxquelles est associée une couleur particulière de papier toilette – et leurs préoccupations sont bien éloignées des réalités quotidiennes de la vie. A leurs côtés, les domestiques les envient, les jalousent et singent leurs manières tout en accumulant beaucoup de ressentiment.

A l’origine de l’intrigue et du titre du livre, un mariage bourgeois. Or, le mari aurait préféré épouser la belle et jeune domestique employée par ses parents. Il finit toutefois par épouser cette dernière, pour en divorcer plus tard. Elle émigrera en Italie où elle entretiendra un gigolo que son ex-mari retrouvera d’ailleurs aux Etats-Unis dans les dernières pages du livre.

Les quatre principaux acteurs de ce huis-clos relatent à tour de rôle leur vie dans l’ordre chronologique et le contexte de leur époque, ce qui permet au lecteur de vivre un demi-siècle de l’histoire d’un pays de manière originale et sans se lasser – le roman compte 500 pages tout de même !

La technique de narration utilisée par l’auteur est d’autant plus intéressante que les 4 récits qui se succèdent sont réalisés sous forme de monologue auprès d’une seule personne à chaque fois à laquelle l’un des 4 protagonistes se confie. Chaque récit est à la fois marqué par une époque mais aussi la sensibilité particulière de chacun ce qui permet habilement de retracer et de réaliser des portraits subtiles et croisés.

Dans l’ordre d’apparition, la première femme, belle, cultivée, entièrement dévouée à son mari et qui pourtant ne parvient pas à le garder ; le mari qui étouffe dans le carcan érigé par ses ascendants et qui cherche autre chose que les conventions d’une société qu’il connaît par cœur ; la domestique qui épouse le mari sans même savoir ou se demander si elle l’aime – son seul but étant de parvenir à une forme de réussite sociale et d’atteindre enfin un monde tant envié ; le dernier amant de celle-ci, qui fuit le pays après avoir été sollicité par la police secrète pour être un indicateur.

Ces différents témoins d’une époque, abordent leur vie chacun sous un prisme différent, révélant que nos préoccupations diffèrent significativement en fonction de notre vécu et de notre situation économique. Ainsi la première femme se préoccupe essentiellement d’amour, le mari de la société, sa seconde femme de l’argent et de son ascension sociale, tout comme son amant.

Le livre enrichit le lecteur des réflexions profondes très intériorisées de chacun, du prisme par lequel ils abordent la vie, ou encore du sens des priorités qu’ils se fixent toutes relatives, finalement.
Par ailleurs, l’épopée historique est très justement retracée et mérite la lecture attentive que requiert ce livre si on ne veut pas passer à côté de son essentiel.

Métamorphoses de la bourgeoisie

8 étoiles

Critique de Alma (, Inscrite le 22 novembre 2006, - ans) - 20 avril 2009

Conjuguant la fresque sociale et le récit intimiste, ce roman, commencé comme un roman d’analyse psychologique avec les confidences de Llonka à son amie, vire progressivement à l’étude sociologique dans les trois monologues suivants .

L’analyse sociologique de la classe bourgeoise reste pour moi la dimension la plus importante de l’œuvre : la bourgeoisie et ses différentes catégories, avec ses valeurs, sa culture, ses rites , ses préjugés, dans ses rapports avec les autres classes sociales, en particulier celle qu’on appellera le prolétariat . La bourgeoisie évoquée lucidement de l’intérieur par ceux qui en font partie, puis, dans une relation troublante, par celle qui en a copié les attitudes ,mais en dénonce la froideur: Judit, ; puis de l’extérieur, par celui qui observe et côtoie ceux qui sont devenus les nouveaux maîtres de la Hongrie . La bourgeoisie se métamorphosant, d’abord dans sa grandeur puis dans sa décadence .

Un roman riche, dense, fouillé, à l’écriture tout en nuances, mais également varié, Sandor Maraï ( et son traducteur )prêtant à chacun des protagonistes une voix différente .

Magnifique

9 étoiles

Critique de Aliénor (, Inscrite le 14 avril 2005, 56 ans) - 10 février 2009

Trois personnages, trois monologues, trois versions d’une même histoire. Une histoire de couples, et de mariages donc. C’est la première épouse qui commence à parler, à une amie rencontrée par hasard dans la rue. Elle ne l’a pas vue depuis longtemps et se met à lui raconter toute sa vie, et son union avec un homme qui, pense-t-elle, ne l’a jamais aimée. Car il n’y a jamais eu qu’une femme dans sa vie, celle pour qui elle a été quittée.

Puis l’homme raconte à son tour, et donne sa version de ces deux mariages, qui se sont soldés par deux échecs. Car cette seconde épouse, la jeune servante de la maison familiale qu’il a épousée malgré les impossibilités liées à leur statut respectif, ne l’a selon lui jamais aimé.

Enfin, c’est la seconde épouse qui prend la parole, et raconte toute l’histoire en une nuit à son amant musicien avec lequel elle vit à Rome. Elle dépeint son mari comme un homme froid, renfermé, qui ne l’a jamais considérée autrement que comme sa bonne.

Cette fois encore je n’entrerai pas plus avant dans les détails, car il ne faut décidément pas en dire trop de l’intrigue des romans de Sandor Marai. Il est important de garder intact le plaisir de la découverte des intrigues qu’il tisse par petites touches progressives. Ce roman est magnifique, souvent qualifié comme le plus abouti de l’œuvre de cet auteur resté longtemps méconnu (il est mort en exil aux Etats-Unis en 1989), et dont les livres ont été interdits en Hongrie jusqu’en 1990.

Le mariage bourgeois vu sous plusieurs angles

10 étoiles

Critique de Printemps (, Inscrite le 30 avril 2005, 65 ans) - 8 février 2009

J'ai aimé lire ce livre écrit, semble-t-il, à quatre mains: la première épouse bourgeoise, le mari bourgeois, la seconde épouse paysanne de souche, le prolétaire musicien émigré aux Etats-Unis. Tout ce petit monde nous donne son point de vue sur la vie maritale en Hongrie, avant et après l'échec du mariage, mais aussi sur la société hongroise en mutation en général. Ce livre traite à la fois des sentiments des personnages, de la culture et de sa définition, éventuellement de sa disparition, et des métamorphoses individuelles et sociétales qui ont bouleversé les personnages, mais aussi la société hongroise et européenne au vingtième siècle.

Tout le contraire d’un divertissement

8 étoiles

Critique de Saint-Germain-des-Prés (Liernu, Inscrite le 1 avril 2001, 56 ans) - 15 janvier 2009

Encore un livre qui demande un effort de persévérance ! 500 pages couvertes de quatre monologues successifs. Il faut attendre le troisième pour avoir un peu d’air à travers deux - trois dialogues. Les protagonistes s’adressent chaque fois à un unique interlocuteur muet pour décrire dans les moindres détails ce qu’a été leur vie et leurs relations de couple. Sandor Marai y discourt longuement sur ce qu’est la bourgeoisie, revenant encore et encore sur cette notion, comme sur toutes celles abordées dans ce livre. Ce qui donne un livre d’une lourdeur peu commune. Je n’ai pas abandonné ma lecture, mais ce n’est pas l’envie qui m’en a manqué… J’ai donc trouvé le procédé pesant, mais le contenu vaut le détour. C’est fatiguant au possible de lire un texte qui pendant des dizaines de pages décortique une seule idée, mais à côté de ça, force est de reconnaître le talent de l’écrivain.

Style superbe

8 étoiles

Critique de Ludmilla (Chaville, Inscrite le 21 octobre 2007, 68 ans) - 29 décembre 2007

Un grand roman, parfois un peu difficile à suivre si on ne maîtrise pas l’histoire de Budapest dans les années 40.
Un récit à 4 voix, quatre monologues successifs, dans le livre et dans le temps, les trois premiers (Ilonka, la première épouse, Peter, le mari, Judit, la seconde épouse) racontent leur histoire, le dernier récit, celui du dernier amant de Judit, beaucoup plus court, apporte un regard extérieur.

Ces récits croisés mettent en évidence les différences et l’incompréhension mutuelle entre les bourgeois (Ilonka et Peter) et Judit, d’origine très pauvre.


Un extrait du monologue de Peter :
« tu ne peux rien recevoir des livres si en échange, tu ne leur donnes pas une part de ton âme … »

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