Le Piège de Emmanuel Bove

Le Piège de Emmanuel Bove

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Montgomery, le 27 décembre 2006 (Auxerre, Inscrit le 16 novembre 2005, 52 ans)
La note : 10 étoiles
Visites : 4 734  (depuis Novembre 2007)

L’esprit de renoncement saisi par la littérature

Tout commence avec le style sans quoi le reste ne serait pas possible. Il est simple, fait de phrases plutôt courtes qui ne s’allongent que par nécessité, quand l’idée le commande. L’écriture limpide est un signe qui ne trompe pas, nous avons affaire à l´un des meilleurs romanciers du XXème siècle. Et en plus celui-ci a des choses à dire , des atmosphères à décrire, un état d’esprit à restituer.

Oeuvre remarquable par le style, « Le piège » est le témoignage d’une période voilée de l’histoire de France. Sa qualité littéraire, le parti pris de l’auteur de s’appuyer sur des personnages banals,des antihéros, permettent au récit d’aller au-delà de la simple évocation. Il fait « toucher du doigt » au lecteur contemporain les sentiments et les comportements qui étaient ceux d’un peuple brutalement dépourvu de ses points de repères. Que serions-nous sans les quelques certitudes qui gouvernent quotidiennement nos actes ?

Aprés la défaite, Joseph Bridet, français moyen et patriote, voudrait rejoindre les rangs du Général de Gaulle. Jouant de malchance, mal conseillé par une épouse trop confiante dans ceux qu’elle identifie comme les nouveaux titulaires du pouvoir, Bridet ne peut éviter de se retrouver dans un camp d’internement où végètent des prisonniers politiques. Petit à petit le piège se referme sur lui; lui qui n’a pas su fausser compagnie aux fonctionnaires de Vichy quand il le pouvait, qui n’a pas osé se mettre hors-la-loi.

Ce piège dont Bridet et quelques autres sont victimes se décline sur le mode collectif sous le nom d’esprit de renoncement ou esprit de Münich pour faire plus historien. S’y est refugiée une immense majorité de français qui croyait qu’accepter l’inacceptable aujourd’hui lui épargnerait le pire demain...C’est cela qu’Emmanuel Bove relate et dénonce avec une lucidité étonnante, dans un roman écrit « à chaud ». Précieux sont les écrivains comme lui qui portent la connaissance de l’humanité et de littérature à ce niveau là. Finalement, on se dit que Drieu et Céline avaient avec qui parler.

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