Un déjeuner de soleil de Michel Déon

Un déjeuner de soleil de Michel Déon

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Dirlandaise, le 26 octobre 2006 (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 68 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (39 792ème position).
Visites : 4 872  (depuis Novembre 2007)

Une vie trépidante

Ce livre raconte la vie de Stanislas Beren, écrivain excentrique à la vie parsemée de conquêtes féminines nombreuses mais pas toujours heureuses. Le jeune Stanislas est âgé de dix-sept ans lorsqu'il débarque à Paris en 1925. Au lycée à la clientèle plutôt snob composée d'enfants de bourgeois enrichis par la guerre, tout le monde le trouve bizarre avec son accoutrement : il est pieds nus dans des espadrilles, porte des pantalons de velours côtelé marron, une chemise de laine bariolée et un gilet cintré en peau de mouton renversé. Il se fait un ami en la personne de André Garrett et les deux garçons deviennent vite inséparables. Mais, Stanislas refuse obstinément de dévoiler ses origines, laissant la porte ouverte à de nombreuses hypothèses dont certaines plutôt romantiques. Stanislas ne parle pas un mot de français mais il écoute. Il apprend cette langue dans un temps record et quelques années plus tard, il devient un écrivain à succès. Le temps passe et l'amitié de Stanislas et d'André perdure. La mort tragique d'André à la guerre y met un terme mais le fils d'André reprend le flambeau et devient un ami intime de l'écrivain, recueillant ses confidences et l'accompagnant dans plusieurs grandes villes du monde dont Londres et Venise. Il devient également son éditeur. Stanislas est un personnage coloré et unique. Il se marie avec une femme de quinze ans plus âgée que lui, a de nombreuses liaisons qui se terminent parfois de façon tragique et à la fin de sa vie, finit par dévoiler le terrible secret de son passé à son ami de toujours.

L'écriture est belle. Michel Déon est un écrivain dont la réputation n'est plus à faire mais je crois sincèrement qu'il faut bien connaître le monde dans lequel évolue le personnage de Stanislas afin de bien savourer ce récit qui renferme une très belle histoire d'amour. J'ai eu un peu de mal avec le début, l'auteur remontant constamment dans le passé pour revenir au présent et je m'y perdais régulièrement, ne sachant plus à quelle époque l'histoire se déroulait vraiment. Mais, c'est en s'accrochant que j'ai retrouvé tout le talent de Michel Déon pour mettre en scène de savoureux personnages dont le destin tragique fait de ce livre une œuvre romantique qui exhale un charme vieillot qui m'a conquise.

" Leur conversation, l'après-midi de la rencontre, est presque dramatique d'incompréhension et frôle le ridicule. Comme S. avance que le meilleur roman de Stendhal aurait été, s'il l'avait achevé, Le rose et le Vert, Élise ricane.
- Vous voulez dire Le Rouge et le Noir… Vous n'avez lu que le premier volume… Il y en a deux…
Cette sûreté dans l'ignorance le plonge dans les délices. Quelle chance ! Il faudra tout apprendre à ce prétentieux bas-bleu qui croit savoir et ne sait rien. "

" J'ai regardé autour de moi : il n'y avait que des vieillards jaunes et rabougris dans des fauteuils immenses, mains crispées sur les cannes ou des béquilles. J'étais parmi des moribonds dans une de ces maisons des morts comme il y en avait en Chine avant Mao. Les vieillards y arrivaient avec un balluchon, s'allongeaient sur une planche et s'éteignaient sans bruit. J'ai pris la fuite : je n'en suis tout de même pas là ! "

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Deon soigne son écriture

7 étoiles

Critique de Yeaker (Blace (69), Inscrit le 10 mars 2010, 50 ans) - 19 septembre 2011

Ce Déon nous plonge dans la jet-set des années trente, c’est la biographie de Stanislas Beren, auteur imaginaire narré par son éditeur et fils de son meilleur ami, le tout aussi imaginaire Daniel Garrett.
Au travers de la vie de Beren, Déon nous raconte dans une écriture sublime mille histoires. Les personnages principaux sont imaginaires bien que tout soit fait pour donner l’illusion de la réalité avec des renvois en bas de page aux livres de Beren et des extraits de romans, de journaux et de correspondance. Le milieu littéraire est quant à lui le reflet de la réalité et Deon en profite pour lancer quelques piques dont les surréalistes sont la principale cible.
Si l’écriture est remarquable, les nombreux extraits de textes insérés dans le récit gênent la fluidité et l’harmonie du récit. Il est possible que l’auteur en soit bien conscient et le dénonce au travers de son héros qui supprime dans un de ses romans les extraits de journaux qu’il avait dans un premier temps insérés.
Mais surtout le personnage de Stanislas Beren a bien du mal à passer à notre époque et se le coltiner page après page n’est pas une mince affaire. Fortuné par un mariage avantageux il passe son temps avec une jeunesse oisive et superficielle ou en croisière. Toutes les femmes succombent évidemment à son charme, même les gamines de huit ans et les nonnettes. Misogynie banale qui confond aimer les femmes avec le souhait de les posséder.

A noter que beaucoup de conquêtes de Beren meurent prématurément d’un accident d’avion ou de voiture, je me suis plu à imaginer alors une suite à ce roman...
Une suite en forme de thriller qui révélerait un Beren psychopathe tueur en série. On aurait alors le besoin de relire le premier roman pour y découvrir les indices cachés. Le livre prenant alors une dimension nouvelle. Ce roman reste à écrire, Michel si vous m’entendez !

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