La mort de Dinah de Emmanuel Bove

La mort de Dinah de Emmanuel Bove

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Barda, le 19 avril 2006 (Inscrit le 7 juillet 2005, 54 ans)
La note : 8 étoiles
Visites : 3 923  (depuis Novembre 2007)

Un ange passe...

Jean Michelez est entrepreneur, c’est tout à la fois un homme installé, un mari négligent et un petit-bourgeois sans envergure qui ne s’intéresse qu’à l’argent. Ayant connu dans sa jeunesse la trahison familiale, les déceptions amicales comme amoureuses, sa personnalité s’est construite dans l’amertume et la rancoeur. La rencontre avec une femme, Mme Auriol - sa voisine - va révéler cet homme au peu d’humanité existant encore en lui et à la supercherie qu’aura été sa vie. Une petite fille, Dinah, sera la victime innocente et sacrificielle de la mesquinerie des hommes, et parmi eux, bien que pour des raisons différentes, Michelez et Dausset - le propriétaire du pavillon de Mme Auriol. Malgré ses allures de mélodrame éploré ce court roman (162 p.) réussit à nous émouvoir tout en restant parfaitement honnête. Comme toujours Emmanuel Bove réussit à parler de l’intime et de la misère dans une langue courte et sans fioritures, visant à une sorte de transparence qui au lecteur non initié peut paraître fade et neutre alors qu’il s’agit très exactement de l’inverse. Toujours prompt à pointer les faux-semblants et la médiocrité des hommes, Bove ne s’autorise jamais la facilité et trace à la pointe sèche des psychologies tout à fait précises et crédibles. La construction du roman, si elle paraît surprenante au début, prend tout son sens dans la dernière partie, l’attitude de Michelez, préalablement démontée et éclairée échappant ainsi en partie à la veulerie qui aurait pu la résumer. Ainsi, en nous tendant, au bout du compte une image plus nuancée, l’image d’un homme faible et sincère dans sa bêtise, un homme qui n’aura jamais aimé et qui n’aura jamais cherché à être aimé, quelqu’un de trop peureux pour s’engager, l’auteur fait preuve d’une grande subtilité et cherche à parler à hauteur d’homme sans porter de jugement moral trop fermement établi. En comparaison le personnage du propriétaire paraît un rien brutal même s’il permet à Bove de définir deux types de “salauds” très différents l’un de l’autre tout en continuant à dessiner encore plus finement la psyché de Michelez dont on ne sait pas bien s’il convient plutôt de le plaindre que de l’agonir. Pour finir, et même si le style diffère complètement, il y a dans cette étude quelques lignes dignes d’un Flaubert quand il s’agit pour l’écrivain de “démontrer” l’auto-satisfaction béate ainsi que la profonde bêtise des bourgeois et autres parvenus que par un troublant effet de contraste le personnage de la petite Dinah, dont le titre même du livre ne nous laisse rien espérer de son destin, de sa petite lueur vacillante d’ange malade n’éclaire que d’une lumière plus crue encore, tout comme la misère morale dans laquelle un certain type d'homme évolue, parfois à son propre insu.

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