Le Cercle fermé de Jonathan Coe
(The closed circle)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone
Moyenne des notes : (basée sur 21 avis)
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L'ére de l'ironie
Surtout, surtout ne lisez pas ce livre… avant d’avoir dégusté “Bienvenue au club”. Ces deux romans sont les panneaux d’un diptyque qui ne vont pas l’un sans l’autre. Certes vous y prendriez un grand plaisir, l’auteur ayant d’ailleurs eu la délicatesse de suivre le conseil de Bolcho en ajoutant au livre le synopsis du premier. Mais je crois sincèrement qu’il faut avoir lu « Bienvenue au club » pour apprécier totalement « Le cercle fermé ».
On y retrouve des amis un peu perdus de vue mais toujours présents dans nos cœurs, un peu comme les personnages de ce superbe film italien « Nos meilleures années » : Benjamin « qui ne vivait que par et pour ses rêves, depuis toujours », Doug qui ne pourra jamais écrire un livre et restera journaliste, Philip peut-être le plus philosophe (et le plus heureux ?) de tous. Il y a aussi Claire dont la lettre à Miriam, sa sœur disparue, ouvre magnifiquement le roman, les femmes de nos héros car ils ont grandi, vieilli, parfois mûri. Et Malvina , et Paul, le frère de Ben, « affreux Jojo » devenu député travailliste ou plutôt néo travailliste et quelques autres.
Car le monde a changé. L’Angleterre des années 70 a subi le choc du thathérisme avant de succomber au charme de Tony Blair. Et c’est là où Jonathan Coe révèle tout son talent en liant le désenchantement des personnages à celui d’une époque. Il n’y a plus rien de commun entre l’engagement du père de Doug, militant syndical des années 70 et l’opportunisme de Paul. C’est un roman tout à fait contemporain qui évoque bien des évènements survenus entre 1999 et 2003 dont bien sûr la guerre en Irak, à laquelle l'auteur est totalement opposé. C'est aussi la description, pleine d'humour ironique, du milieu mediatico-politique où « ce qui compte aujourd’hui , ce n’est plus ce que vous dites, c’est la manière dont c’est interprété ». On peut d’ailleurs se demander si c’est cet aspect très contemporain du roman qui résistera le mieux au temps qui passe. Cependant je ne partage pas du tout l’avis de ceux qui parlent de roman politique, pour le dévaloriser. Certes c’est un roman d’aujourd’hui, mais surtout c’est un roman dans tout ce que ce terme a d’absolu et de magique avec des personnages qui ont ce petit plus d’universel, ce « supplément d’âme » qui font de ces êtres imaginés des êtres vivant avec nous. Plus que la posture de Tony Blair ou de Paul son représentant, et même si ou parce que « On vit à l’ère de l’ironie », ce qui importe c’est la tristesse rêveuse de Benjamin, l’énergie tendre de Claire ou les hasards saugrenus de la vie. Car la vie est passée par là avec tout ce qu’elle recèle de chagrins, de déceptions, de trahisons mais aussi de tendresse et d’amour, de musiques et de livres, de vin et de paysages, de rencontres et d’espoirs.
Je ne veux, bien sûr, pas raconter l’histoire qui est compliquée, surprenante, pleine d’humour parfois, de tendresse toujours mais sans la compassion obligée (« je n’ai jamais aimé les autres, seulement veillé sur eux » dit Claire, je crois), de révolte aussi (« Société tolérante. Qu’ai-je fait au demeurant pour que les gens doivent me TOLERER »), de vibrato, la vie quoi !
C’est superbement écrit (« ce climat anglais, avec le grouillement acre et inquiet d’une humanité détrempée »), parfaitement traduit.
Jonathan Coe a mis dans ce livre toute son imagination riche et amusée et on sent qu’il a écrit ce livre avec plaisir, aimant conduire son lecteur où il l’entend pour provoquer au détour d’une phrase, d’un mot, voire d’un signe d’imprimerie, un coup de théâtre. Mais s’il nous guide où il veut, il nous laisse aussi la liberté d’imaginer notre propre histoire avec ses personnages et c’est peut-être ceci qui distingue un grand roman d’un livre plus ordinaire : s’approprier des personnages, une histoire et la vivre non seulement à travers eux mais aussi en nous, pour nous, parce que c’est peut-être aussi notre histoire d’une certaine façon.
Vous l’avez compris, ce désenchantement de la vie est un enchantement de lecture
Finalement j’ai un énorme reproche à faire à Jonathan Coe : celui d’avoir écrit un diptyque et non un triptyque ou une série tant j’aimerais retrouver plus souvent nos vieux amis anglais.
Le livre se termine sur l’image d’un espoir, celui de la génération suivante. Alors vite, Jonathan, racontez-nous leur histoire.
Les éditions
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Le cercle fermé [Texte imprimé], roman Jonathan Coe traduit de l'anglais par Jamila et Serge Chauvin
de Coe, Jonathan Chauvin, Serge (Traducteur) Ouahmane Chauvin, Jamila (Traducteur)
Gallimard / Du monde entier (Paris)
ISBN : 9782070774777 ; 24,00 € ; 26/01/2006 ; 544 p. ; Broché -
Le cercle fermé [Texte imprimé] Jonathan Coe traduit de l'anglais par Jamila et Serge Chauvin
de Coe, Jonathan Chauvin, Serge (Traducteur) Ouahmane Chauvin, Jamila (Traducteur)
Gallimard / Collection Folio
ISBN : 9782070344918 ; 9,70 € ; 10/05/2007 ; 549 p. ; Poche
Les livres liés
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Les critiques éclairs (20)
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Du bon Jonathan Coe
Critique de Missef (, Inscrite le 5 mars 2007, 58 ans) - 24 mars 2023
La plume de Jonathan Coe est toujours aussi jubilatoire, sa façon de dépeindre une époque - les années Blair - toujours aussi pertinente. Les désillusions de chacun sont à l'unisson de l'atmosphère politique. Tout le monde en prend pour son grade et pourtant, on a beaucoup de compassion pour ces personnages, dans lesquels chacun se reconnaîtra. Si le regard est désabusé, l'auteur sait instiller suffisamment d'espoir pour que le roman ne verse pas dans un pessimisme aussi peu authentique que le serait un optimisme béat. Comme à l'accoutumée, l'humour de Jonathan Coe sauve aussi bien son roman que ses personnages.
Une belle suite qui manque également son but
Critique de Falgo (Lentilly, Inscrit le 30 mai 2008, 85 ans) - 14 juin 2016
Diptyque bien achevé.
Critique de Ngc111 (, Inscrit le 9 mai 2008, 38 ans) - 13 février 2013
L'auteur a bien mis l'accent sur les difficultés rencontrées par ces adultes encore hantés par les spectres de leur adolescence (notamment en ce qui concerne Benjamin, mais pas seulement), dont ils cherchent désespérément à se défaire pour avancer dans leur vie, bien entamée, d'adultes accomplis et responsables.
Cela amène l'intrigue à des raccourcis un peu faciles sur le dénouement de certaines situations (la disparition de Myriam) mais l'on pardonne volontiers l'auteur au vu de la qualité du récit, de l'introduction de nouveaux personnages très réussie (Malvina et Sophie par exemple) et des thèmes abordés.
Les plans sociaux et la critique du monde patronal sont toujours d'actualité dans les années 2000 mais Jonathan Coe aborde aussi le thème de la guerre en Irak, des attentats terroristes et des rouages politiques, le tout toujours enrobé dans les histoires personnelles voire intimes de ses personnages : liaisons adultères, éducation des enfants, changements de style de vie, évolution de la carrière professionnelle... On suit l'ensemble de l’œuvre avec grand plaisir et certains passages sont d'une qualité ébouriffante.
Pourtant l'effet de surprise est logiquement un peu moindre, la faute à un style moins varié que dans le premier volet du diptyque qui s'était fait une force de multiplier les variations de style. Ici l'auteur s'est montré globalement plus sage et hors quelques chapitres écrits sous forme de relation épistolaire (les premiers chapitres par exemple) et autres retranscriptions de SMS (pour coller à la réalité de l'époque), la narration se veut plus classique et convenue que dans "Bienvenue au club".
Le diptyque de Jonathan Coe s'achève quoiqu'il en soit de fort belle manière et démontre une nouvelle fois les qualités de l'auteur pour constituer un récit mêlant fiction et moments de vie de quelques personnages à la variété et à l'intérêt équivalents, avec une satire sociale et politique bien insérée, peut-être trop évidente et pas toujours bien nuancée mais convaincante malgré tout.
Les années Blair
Critique de Nothingman (Marche-en- Famenne, Inscrit le 21 août 2002, 44 ans) - 30 août 2011
Et au milieu de cette grande histoire, celle des journaux et de la télévision, nos sympathiques héros vivent leurs vies. Des vies, pas les meilleures, pas les pires, comme aurait dit un chanteur français qui tarde un peu trop à revenir dans le parcours.
Et, avec Jonathan Coe, les hasards de la vie jouent bien souvent de drôles de tours à ces personnages toujours attachants en diable. Ils ont évolué, mais sans vraiment changer. Certains se retrouvent : espoirs déçus bien souvent. Telles de petites marionnettes, Jonathan Coe tire les fils de leur histoire sans jamais faire de nœuds. Le « Cercle fermé » est pour moi légèrement supérieur à « Bienvenue au club », plus mature. Il est cependant très important, selon moi, d’avoir lu le premier tome de cette saga, sous peine de passer à côté de certains détails. Car un détail insignifiant dans « Bienvenue au club », pourra avoir des répercussions dans « Le Cercle fermé ».
le livre fermé
Critique de Lectio (, Inscrit le 16 juin 2011, 75 ans) - 10 juillet 2011
Une merveille !
Critique de Jules (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans) - 31 mai 2011
Tout en nous montrant l'évolution de l'Angleterre, les luttes sociales, les excès du capitalisme, le déchirement provoqué par la seconde guerre d'Irak et une triste montée du racisme, ce livre reste d'une très grande sensibilité.
Oui, nous aimions Benjamin, Doug, Claire, Paul et les autres mais il est tellement intéressant de les retrouver tous dans les tourbillons de la vie d'adulte.
Je serai bref vu la qualité de la critique de JLC, mais je dois avouer que moi aussi j'ai été très triste quand j'ai fermé ce livre.
Ce livre m'a fait rêver, en effet je m'y suis retrouvé et j'admire la sensibilité, la finesse que l'auteur montre dans cet ouvrage.
Indiscutablement un très grand roman !
20 ans après
Critique de Sundernono (Nice, Inscrit le 21 février 2011, 41 ans) - 19 mai 2011
Là encore l'histoire est prenante, je ne reviendrais pas dessus, elle est très bien décrite dans les autres critiques des lecteurs de CL. On prend vraiment un grand plaisir à retrouver nos trois larrons qui ont pris 20 ans de plus tout de même. Leurs péripéties ne sont plus du même acabit du coup. Le récit est donc en quelque sorte plus mature, plus posé si j'ose dire. Jonathan Coe arrive là encore à nous tenir en haleine, pourtant il y' a un je ne sais quoi qui m'a fait préféré le premier volet de ce dyptique. Je ne saurais l'expliquer même si "Le cercle fermé" est un très bon roman qui ne m'a pas le moins du monde déçu, ce qui est souvent le cas avec les suites.
Pour les amoureux de Coe, ceux qui ont aimé "Bienvenue au Club", le "Cercle fermé" est à mon humble avis un indispensable.
Oui et alors ?
Critique de Sahkti (Genève, Inscrite le 17 avril 2004, 50 ans) - 26 juillet 2009
Dans l'un ou l'autre livre, je dois confesser que le sujet traité m'a peu, voire pas du tout, intéressée. Ce n'est pas la plume de Jonathan Coe, qui écrit bien, qui est ici en cause mais l'histoire, ce dont il parle.
Je me suis rapidement lassée de cette troupe qui se regarde beaucoup le nombril, qui vit dans un certain confort et passe du temps à s'interroger sur son moi existentiel. Pas forcément à mes yeux l'échantillon le plus représentatif pour aborder la crise de la société anglaise et les années Blair mais en même temps, ils en font partie et donc ça passe aussi par eux. C'est simplement que dès lors, je ne trouve pas ce tour d'horizon suffisamment complet. Subjectivité toute personnelle, j'en conviens et cela ne remet en rien les qualités d'écriture de l'auteur, dont la langue est agréable et accessible.
Toutefois, étaler sur autant de pages, le mal-être de ce groupe d'amis, ça passe ou ça casse si on n'arrive pas à entrer dans leur univers, ce qui fut mon cas; je les ai trouvés ennuyeux. Le fil conducteur m'a paru cousu de fil blanc et l'histoire sans véritable grand relief. Pas vraiment pour moi.
Et la boucle est bouclée...
Critique de Shan_Ze (Lyon, Inscrite le 23 juillet 2004, 41 ans) - 26 juin 2009
C’est un véritable plaisir de retrouver tout ce petit monde, de voir ce qu’ils sont devenus. En même temps, ce qui m’a un peu gênée, c’est qu’on retrouve vraiment tout le monde. Chaque personnage de Bienvenue au club est évoqué pour savoir ce qu’il ou elle est devenue. (Beaucoup de coup de théâtre (trop ?). Alors qu’en réalité, je pense qu’on oublierait quelques personnes, si on pensait à un passé vieux de 20 ans. (Je chipote un peu, j’ai bien aimé les redécouvrir…)
Le cercle fermé porte bien son nom, le début (de Bienvenue au club) et la fin (du Cercle fermé) se retrouvent et concluent ce subtil, impressionnant et foisonnant diptyque. L’auteur fait passer plusieurs messages par ce roman (et le précédent) en parlant de l’actualité (guerre en Irak, 11 septembre…). J’ai bien aimé le numérotage à rebours des chapitres pour montrer qu’on revenait à l’origine de l’histoire, très ingénieux ! On n’imagine pas de suite à celui-ci. Ou alors sur la nouvelle génération… ?
J’ai, à chaque fois, été impatiente de retrouver chaque personnage, chacun est très bien décrit et avec beaucoup d’humour par Monsieur Coe. Bref, il y a tant de choses à dire mais pour conclure, ce diptyque forme un ensemble assez équilibré qui se lit très facilement et avec beaucoup de plaisir.
Ferme la boucle
Critique de Nance (, Inscrite le 4 octobre 2007, - ans) - 4 juin 2009
Passez par le Club avant de fermer le Cercle!
Critique de Mallollo (, Inscrite le 16 janvier 2006, 42 ans) - 1 juin 2009
Je n'en parlerai pas, de l'histoire (tout est déjà dit dans les autres critiques, et le récit est tellement dense que j'en serais bien incapable), mais elle tient à la fois de la saga passionnante et de l'étude sociologique, sans être barbante. C'est avant tout le roman d'une génération. Pas la mienne, ce qui ne m'a pas empêché d'accrocher tout de suite.
Pourquoi? Sur le fond, je suis à l'âge charnière, au milieu de tout ce qui fait d'un post-ado un futur quadra peut-être blasé, qui a peut-être oublié qui il était, et à quoi il rêvait. Fatalement, ça parle, ça interpelle et ça fait un peu flipper. Et sur la forme, c'est écrit... waouw... tout en simplicité, sans effets de manche pompeux, mais c'est vraiment bien construit, et superbement traduit. Un équilibre tout en légèreté, qui permet de profiter du récit sans être étouffé par la syntaxe, tout en profitant de quelques vraies belles tournures.
Le seul bémol (qui peut ne pas en être un): sans avoir lu Bienvenue au Club auparavant (ce qui était mon cas), il est parfois laborieux de bien suivre les personnages. Malgré le petit synopsis (bien pratique pour "tricher" en cours de lecture), Le cercle fermé présente vraiment un nombre de personnages (et leur passé qui va avec) trop important pour y entrer sans préparation... je recommande donc chaudement Bienvenue au club, pour profiter pleinement du Cercle fermé!
Les années amères
Critique de Saule (Bruxelles, Inscrit le 13 avril 2001, 59 ans) - 17 mai 2009
Le livre contient une dimension presque existentielle: les questionnements, les espoirs déçus, la difficile confrontation des espoirs adolescents avec la réalité de l'âge adulte. Et puis, il a la dimension sociale et politique, une description amère des années Blair. La classe moyenne a laissé l'engagement social de côté pour se contenter de faire de l'argent, les valeurs phares de nos sociétés sont devenues l'efficacité et la rationalisation. Et la politique n'est pas en reste, c'est un terrain de jeu d'opportunistes sans idéal. A ce titre, l'épisode du vote au parlement sur la guerre en Irak est vraiment une belle prouesse narrative.
Un livre tout aussi amusant à lire qu'intéressant pour la critique sociale et la description de l'Angleterre en ce début de 21ème siècle.
Réquisitoire des années Blair.
Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 10 mai 2009
« Le cercle fermé » raconte une histoire, non plutôt des histoires, … enfin non, des sagas. Des sagas entremêlés comme le sont nos jours et ceux de nos proches et connaissances dont les jours s’entremêlent aux notres au gré des rencontres, au gré des moments importants qui surgissent parfois sans qu’on s’en rende compte.
Jonathan Coe fait tout cela très naturellement, dans un style très agréable, qui rend la lecture fluide et régulière. Et il a du mérite tant il aborde d’histoires différentes, tant il aborde de thèmes fondamentaux, les uns à la suite des autres et souvent aussi les uns en même temps que les autres !
C’est d’une grande maestria, d’autant que Jonathan Coe reprend, vingt ans après, la suite des aventures déja contées dans le roman précédent, et l’on se dit : « il a bien dû y penser à l’avance, semer des cailloux, planter des graines, … et ça donne le vertige tant l’ouvrage est grand et fort.
Nous sommes au début des années 2000, les évènements évoqués, eux, sont souvent réels : attentats, déclenchement de la guerre contre l’Irak, … C’est l’heure du désenchantement pour Doug, Benjamin, Philip, Claire, …
Et leurs désenchantements s’entrecroisent, coupent un instant l’ambition de Paul, qui lui n’a pas le temps d’être désenchanté ; un ambitieux à l’oeuvre. On peut se sentir Doug, Claire, Benjamin, Philip tellement c’est actuel et proche de nous (l’âge aussi ?). On a du mal à se sentir Paul tant il incarne l’arrivisme forcené, cette ambition qui vous ferait tuer père et mère. Qu’importe, les personnages du « Cercle fermé » prennent réellement vie sous nos yeux, et Tony Blair se fait « habiller pour l’hiver ». Jonathan Coe tenait à faire passer un message, il est très explicite !
« Vingt ans ont passé et au fond rien n’a changé»
Critique de Débézed (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 77 ans) - 25 mars 2009
Coe reprend donc cette bande d’amis à peu près vingt ans après les avoir abandonnés, au moment où Claire vient de quitter Stefano en Italie pour rentrer à Birmingham où elle retrouve les frères Trotter, Benjamin toujours aussi taciturne et toujours dans l’espoir de publier le livre qui révolutionnera le monde de l’édition et Paul qui a choisi la politique qu’il exerce sans scrupule mais avec beaucoup d’ambition. Elle retrouve aussi Doug Anderton, le journaliste qui a fait un mariage opportun et son ex-mari Philippe échotier local, désormais remarié avec Carol, qui élève leur fils Patrick.
Ces quadras vivent dans un confort plutôt douillet, car dans ce roman il n’y a que des gens aisés ayant des jobs valorisant comme dans les « sitcoms » américaines, mais tous sont tout de même en proie à un quelconque mal de vivre qui affecte, en général, les personnes qui n’ont pas assez de problèmes dans leur quotidien. Ils ne trouvent plus une satisfaction suffisante auprès de leur femme qui est devenue mère de famille, ou s’est aigrie en ne le devenant pas, et se trouvent ainsi disponibles pour d’autres aventures avec des femmes plus ou moins consentantes ou même carrément disponibles elles aussi. Mais ce mal de vivre peut également trouver ses origines dans le monde du travail où leur talent n’est pas forcément reconnu comme il pense qu’il devrait l’être, ou encore dans le contexte politique qui les amène à renier leurs idéaux de jeunesse et à accepter des compromissions pour assurer leur statut social et leur avenir.
En renouant, vingt ans plus tard, les liens qui les avaient réunis, ses amis de jeunesse vont retrouver leurs souvenirs et rechercher les premiers émois qui les ont agités sur les bancs de l’université, sur fond d’espoirs déçus ou d’ambitions avortées dans un contexte de politique réaliste conduite par le parti travailliste qu’ils ont porté au pouvoir et qui les déçoit vivement face à une conjoncture économique de plus en plus tendue. Et, Coe conduira cette petite bande fâchée avec son idéal jusqu’à un happy end final digne d’un bon roman à l’eau de rose où la simplicité et l’humilité sont toujours récompensées par un amour frais comme un premier amour.
Roman d’une génération qui avait de grandes ambitions et un immense idéal qui ont sombré avec la fin des trente glorieuses, et qui a dû faire face à une conjoncture économique devenue plus difficile et à de nouvelles tentions politiques issues de la déconfiture du bloc communiste et de la montée des intégrismes. Mais roman qui ne va pas assez au fond des choses, qui surfe trop sur la vague des lieux communs et des idées reçues et qui se termine dans un optimisme béat qui ne s’imposait pas forcément au moment où Coe a rédigé ce livre, et nous sommes bien placés pour le savoir aujourd’hui.
Même si les ambitions de chacun s’effilochent avec le temps, la vie reste belle car toujours l’amour finit par triompher même si Blair ne conduit pas les Anglais vers l’avenir le plus radieux. La réalité prend le pas sur les rêves et nos quadras trouvent vite la solution à leur mal être en révisant leurs ambitions à la baisse pour ne pas galvauder leur idéal et leurs amours de jeunesse. Et, ainsi, toujours le cercle se referme….
L’avenir des illusions
Critique de Aaro-Benjamin G. (Montréal, Inscrit le 11 décembre 2003, 55 ans) - 28 janvier 2009
Personne n’a remarqué que la numérotation des chapitres est à l’envers ?
Suite
Critique de Maylany (, Inscrite le 11 novembre 2007, 44 ans) - 23 février 2008
Les ados ont grandi, les adultes ont mûri, des intrigues se dénouent, des destins se lient, etc.
Le contexte politique britannique et international est peut-être un peu plus présent que dans "Bienvenue au Club" mais il ne parasite toujours pas la lecture.
J'ai d'autant plus apprécié ce 2ème roman que j'étais à présent bien ancrée dans l'identité de chaque personnage et de son histoire.
Un diptyque très agréable.
Bienvenue au Club 2, le retour...
Critique de Olivier1180 (Bruxelles, Inscrit le 21 octobre 2007, 53 ans) - 29 octobre 2007
Et pas de mauvaise surprise! Nous retrouvons nos "Amis3 du club, non pas là où nous les avions laissé, mais 20 ans plus tard, dans une Angleterre qui a évolué, qui est passée de Margaret Thatcher à Tony Blair.
Les personnages ont évolué, mais très vite on retrouve leurs forces et leurs faiblesses, le tout écrit avec cette plume trempée dans le vinaigre comme Jonathan Coe l'avait déjà fait dans le premier volume.
Sans nul doute, une excellente suite, dans la parfaite lignée du premier.
Hé, Jonathan, un troisième tome?
Qu'avons-nous fait de nos 20 ans ?
Critique de Sentinelle (Bruxelles, Inscrite le 6 juillet 2007, 54 ans) - 16 juillet 2007
« Le cercle fermé » aurait pu s’intituler « Les illusions perdues » tant la question existentielle en toile de fond de ce deuxième tome pourrait être la suivante : qu’avons-nous fait de nos 20 ans ?
Le grand talent de Jonathan Coe est de combiner "la petite" et "la grande" histoire.
Par l’intermédiaire de nos quadras se profile l’Angleterre désenchantée de Tony Blair, homme « de gauche » poursuivant une politique « de droite » en privatisant plusieurs secteurs des services publics (scolarité, soins médicaux, chemins de fer) et s'engageant dans une guerre en Irak que personne ne soutient vraiment, à part lui, ses ministres, ses députés, les conservateurs et les américains.
Roman social, politique mais également intimiste : les questions de nos quadras, qui ont bien des difficultés à assumer leurs choix de vie, font fatalement échos aux nôtres.
Quel respect avons-nous témoigné envers nous-même ?
Dans quelle mesure sommes-nous si différents qu’autrefois ? Dans quelles proportions nos actes et nos choix présents sont-ils la continuité de nos espoirs d’hier ? Qu’en est-il de nos anciennes blessures mal cicatrisées ? Quels impacts ont-ils eus sur notre vie présente ?
Nous a-t-il manque du courage, de l’opiniâtreté, de la persévérance ?
Avons-nous abouti à ce que nous attendions de la vie ? Quelles compromissions avons-nous faites pour y parvenir ?
Comment faisons-nous face à nos désillusions, nos échecs ? Que pouvons-nous en faire pour évoluer, aller de l’avant ?
Que de questions que nous partageons avec eux.
Nos quadragénaires ont décidé, bon gré mal gré, de boucler la boucle car, finalement, il n'est jamais trop tard pour changer !
« Le cercle fermé » est, en ce qui me concerne, un bon roman d’un bon auteur.
Extrait :
A propos de Steve, qui a repris contact avec son premier amour, alors qu'il est marié et père de famille. Il n'a pas osé le dire à sa femme.
Benjamin : "Ecoute, dit-il, à ta place, j'éviterais de me torturer. Je sais ce que Valérie a représenté pour toi. C'était la première, hein ? Ce genre de choses, ça ne s'oublie jamais, ça ne s'efface jamais. Alors si tu as l'occasion – si tu te donnes l'occasion – de revenir sur les lieux du passé, de les revoir et de comprendre que tu n'y as plus ta place, personne ne peut te le reprocher. Tu as besoin de boucler la boucle.
Comme tout le monde. Car c'est bien de ça qu'il s'agit, je crois."
le cercle fermé
Critique de Hercule (, Inscrite le 13 mai 2006, 85 ans) - 13 mai 2006
L'ère du désespoir
Critique de Bolcho (Bruxelles, Inscrit le 20 octobre 2001, 76 ans) - 9 mars 2006
Y compris à sa conclusion comme quoi on serait prêt à lire des suites éventuelles.
Mais il n’y en aura pas. Tout l’équilibre de ces deux livres inséparables (Bienvenue au club et celui-ci) s’appuie sur cet immense désenchantement qui a accompagné le passage des années 70, tonitruantes, rageuses et optimistes, à celles d’aujourd’hui qui ne laissent plus de place à aucun espoir sinon celui de faire partie des monstres.
Coe le dit si bien : « Il n’y a plus de curiosité, d’esprit critique, on est devenus des consommateurs de la politique, on gobe tout ce qu’on nous donne ». Et : « Les lignes de partage, si claires, si manichéennes dans les années 70, étaient devenues virtuellement impossibles à identifier avec précision ».
D’ailleurs elles se confondent sans cesse, n’est-ce pas, à tel point que l’acte de voter apparaît comme un rite cocasse.
Sensation rare d’être à ce point proche de l’auteur, dans les émotions, dans les réflexions politiques et aussi dans les petits coups de rage du quotidien : les maniaques du téléphone portable, les imbéciles nantis aux 4*4 bedonnants qui ne verront jamais le Sahara …
Sensation aussi d’être un peu chacun de ces personnages qui – aussi différents puissent-ils être – sont tous porteurs d’une partie de moi-même (oui, y compris les personnages qui sentent un peu le moisi). Question de génération sans doute : les mêmes espoirs, les mêmes déceptions et le même désespoir en fin de compte.
Rideau.
Un des événements marquants du premier livre, et qui aura une influence marquante sur l’avenir de la plupart des personnages, est un meurtrier attentat de l’IRA dans un pub de Birmingham. Mais il faut tout relativiser n’est-ce pas.
« En un sens (…) les attentats de Birmingham n’ont été qu’une atrocité mineure, d’un point de vue statistique, comparés à Lockerbie, ou aux attentats de Bali, ou au 11 septembre, ou à toutes les victimes civiles de la guerre d’Irak. Qu’est-ce qui se passerait si on essayait d’expliquer tous ces morts, toutes ces vies brisées, en remontant à la source ? Est-ce qu’il y aurait de quoi devenir fou ? »
Evoquant encore tous les civils tués par les Américains en Irak : « (…) Et chacun de ces gens était important (…) Des pères tués, des mères tuées, des enfants tués. Pense à toute la rage qui monte, partout dans le monde (…) à cause de tout ça ! Pense à toute cette rage ! ».
Et c’était écrit avant les attentats de Londres…
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