Et si l'amour c'était aimer ? de Fabcaro
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Quel bonheur !!!
Il est toujours très délicat de porter un regard sur un objet nouveau, non identifié et qui plus est appartenant à la catégorie des œuvres d’art. Précisons cela avec soin…
Tout d’abord, vous le savez bien si vous me suivez depuis longtemps, la bande dessinée est un art ! Certes, un art narratif mais cela n’enlève rien à son patrimoine artistique, sa réalité profonde et les émotions qu’elle va apporter au lecteur-admirateur-spectateur…
Deuxième élément, très délicat, face à l’œuvre d’art, nous allons tous ressentir des émotions qui peuvent être très diverses, de l’indifférence absolue à l’admiration totale. Tous ces sentiments, ce vécu, cette expérience… tout cela est légitime car c’est lié à ce que nous sommes, ce que nous avons vécu et expérimenté, à notre éducation… Donc, je ne vais jamais vous dire ce qu’il faut ressentir mais ce que j’ai expérimenté moi-même en lisant telle ou telle bédé… Comme je dis souvent, je ne critique pas une bande dessinée, je la chronique… J’assume cette situation, oui, je suis chroniqueur !
J’en reviens maintenant à ma première considération, en effet, quand je suis confronté, pour la première fois, à une forme de bande dessinée nouvelle, à un thème novateur, à un style narratif d’avant-garde… je suis d’abord surpris, étonné, déstabilisé… ce qui m’empêche parfois d’admirer ou même simplement de comprendre l’histoire proposée…
Il y a quelques années, je me suis retrouvé par hasard avec un petit opuscule dans les mains, Zaï Zaï Zaï Zaï… Comme beaucoup de lecteurs, j’ai été agréablement surpris par une « petite » bande dessinée qui ne payait pas de mine au premier abord. Je suis entré doucement, puis j’ai été secoué par un premier éclat de rire, puis un second, un troisième… Franchement, cela faisait longtemps que je n’avais pas rigolé avec une bande dessinée…
Par contre, quand je me suis retrouvé devant mon écran vierge pour écrire ma chronique, ce fut assez difficile de trouver les mots… Pourquoi avais-je ri en premier ? Parce que le héros prend un poireau pour se défendre ? Parce que le délit est d’avoir oublié sa carte de fidélité ? Parce que la menace extrême du vigile est de faire une roulade arrière ? En fait, difficile de le préciser car une fois que l’on est entré dans cette histoire, tout devient drôle, absurde, profondément humain et… aussi, désespérant comme une vie sur terre quand on sait que l’on va mourir un jour…
Du coup, la seule chose que je me suis dit et que j’ai gardée en tête c’est que Fabcaro était un auteur contemporain comme Beckett et Ionesco. Oui, c’est un chantre de la vie humaine comme ces deux dramaturges l’avaient été avant lui… Certes, il ne fait pas du théâtre mais de la bande dessinée… mais, finalement, c’est la même chose !
C’est ainsi que j’ai lu il y a quelques semaines son nouvel opus, « Et si l’amour c’était aimer ? », toujours édité dans cette petite maison de Montpellier, 6 pieds sous terre. Ceci dit en passant, c’est bien la preuve qu’une petite maison d’éditions peut détecter et proposer de la grande bande dessinée…
Cette fois-ci, tout, même le format, nous pousse à penser à certains romans-photos, ces romances à deux balles que l’on avoue lire chez le coiffeur tellement on aurait honte de lire cela chez soi… Enfin, il faudrait tout mettre au passé car voilà bien longtemps que je n’ai plus vu ces romans-photos…
Donc, nous y sommes, avec dès le début la romance douce qui se met en place… Le coup de foudre !
Une fois passé cet élan du cœur, Fabcaro nous emmène dans une histoire dont il a le secret, une histoire absurde et folle, profondément humaine et désespérante, une histoire d’amour qui n’en est pas une, tout en en étant une, bien sûr ! Vous êtes perdus ? Normal, c’est fait pour et c’est probablement parce que vous n’avez pas commandé depuis longtemps une bonne macédoine… La macédoine livrée à domicile ! La macédoine objet phallique par excellence ! La macédoine de l’amour !
Fabcaro est un auteur de bandes dessinées difficile à cerner – il n’est d’ailleurs pas certain qu’il souhaite à tout prix être cerné – et pour résumer on pourrait dire qu’il développe dans ses récits un triptyque incroyable : absurde-humour-humain ! Alors quand il parle d’amour, il se lâche totalement et cela fait du carnage !
Ce dernier livre est d’une humanité forte et profonde tout en nous plongeant dans l’absurde, un absurde qui touche à notre nature humaine et ce que nous appelons « amour »… Il regarde cette humanité au révélateur de l’amour, du coup de foudre et de la séparation… Parfois, le lecteur éclate de rire, tandis que d’autres images ou textes le poussent à la réflexion, voire le plongent dans la mélancolie… Mais, c’est sa force incroyable, après nous avoir fait toucher du bout des doigts le désespoir, il nous propulse dans la vie : oublie tout cela et vis !
Voilà, je suis devenu, de lecture en lecture, un inconditionnel de Fabcaro. Je viens de lire le petit opus, En attendant, réalisé avec Gilles Rochier, un autre atypique de la bande dessinée, et je reste adepte de cet humour si particulier et si moderne…
Donc, si vous avez envie de partager cet humour décapant avec moi et tous ceux qui ont adhéré à Zaï Zaï Zaï Zaï, il ne vous reste plus qu’à vous lancer dans la lecture de ces livres… Attention, lire Fabcaro comporte des risques d’addiction !
Les éditions
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Et si l'amour c'était aimer ?
de Fabcaro,
6 pieds sous terre
ISBN : 9782352121350 ; EUR 12,00 ; 09/11/2017 ; 26 p. ; Album
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