Page 1 de 1
Je pense qu'Henri ne m'en voudra pas d'avoir pêché ce texte sur sa page Facebook.
« Avant-propos : L’histoire que nous allons vous narrer ici est inspirée de faits réels. Dans un souci du respect de la vie privée, nous avons délibérément changé le nom des protagonistes.
William Strongtan entra d’un pas décidé dans la pâtisserie Pondélion, petite échoppe qui, depuis quelques mois, avait acquis une certaine réputation dans le quartier en faisant de belles tartes aux pommes qui, toutes proportions gardées, s’arrachaient… comme des petits pains.
— Bonjour William, tu vas bien ? demanda le pâtissier en le voyant entrer.
Monsieur Pondélion avait pour habitude de tutoyer les gens du quartier, non pas par manque de respect, mais simplement parce qu’il n’aimait pas la distance qu’imposait le voussoiement, cette étrange spécificité de la langue française. Monsieur Strongtan, qui était, lui, plus attaché à ladite distance, s’entêtait à user du vous.
— Eh bien, je suis venu vous dire que je n’aime pas vos tartes aux pommes, monsieur.
Pondélion parut surpris.
— Ah bon ? Mais tu les as goûtées ?
— Non, mais ça se voit tout de suite. Pas besoin de les goûter pour savoir qu’elles ne sont pas bonnes.
— Diantre ! Qu’est-ce que tu leur reproches, William, au juste ?
— Ya pas de fraises dedans.
— Pardon ?
— Ya pas de fraises dans vos tartes aux pommes.
— Mais… Forcément, ce sont des tartes aux pommes !
— Et alors ? C’est pas une raison pour ne pas y mettre des fraises !
— Eh bien… Si… Sinon ça serait une tarte aux pommes et aux fraises…
— Ah voilà ! Alors forcément, les gens aiment les pommes – parce que les gens sont cons, c’est bien connu – et du coup, vous leur faites des tartes aux pommes, et vous ne mettez pas de fraises dedans. Franchement, c’est du mercantilisme !
— Mais, enfin, si tu n’aimes pas les tartes aux pommes, tu devrais peut-être manger des tartes aux fraises !
— Oh oh ! Mais j’en mange ! J’en mange, mon bon monsieur ! Et je peux vous dire qu’elles sont nettement meilleures que vos tartes aux pommes ! Parce qu’au moins, ya des fraises dedans !
— Je… Euh… Je ne suis pas sûr de comprendre, William.
— C’est pourtant simple. Moi, j’eusse voulu qu’elles soient avec des fraises, vos tartes aux pommes !
— Qu’elles fussent, glissa le pâtissier avec malice.
— Pardon ?
— J’eusse voulu qu’elles fussent. Puisque tu veux jouer les donneurs de leçons, et que tu utilises des archaïsmes de notre belle langue, tant qu’à faire, sois plus rigoureux.
— C’est un peu condescendant, ça, tout de même ! s’offusqua Strongtan, vexé.
— C’est toi qui as commencé, William. Et puis, honnêtement, je ne comprends pas bien où tu veux en venir.
— Vous êtes sourd ou quoi ? Il n’y a pas de fraises dans vos tartes aux pommes ! Alors forcément, vous en vendez plein ! C’est un peu facile…
— Mais… Enfin, je ne suis pas le seul à faire des tartes aux pommes... Il y en a qui en font des meilleures que moi, d’ailleurs, mais avec des pommes quand même. Et si les miennes ont un peu de succès, c’est peut-être parce que je les fais avec amour, William, tu vois ?
— Et prétentieux avec ça ! Vous pensez peut-être que je suis le seul à penser ça ? Eh bien, détrompez-vous, Pondélion, on est plusieurs ! On est toute une clique ! Et d’ailleurs, mes copains et moi, on va créer un blog pour dénoncer ça. Ça va s’appeler Le défi de la tarte aux pommes.
Pondélion se retint de rire.
— C’est-à-dire ?
— C’est simple : mes copains et moi, on va tous bouffer dix de vos tartes aux pommes, et après on publiera nos articles pour dire à tout le monde qu’il n’y a pas une seule fraise dans toutes vos tartes aux pommes ! Vous allez voir ce que vous allez voir ! Vous ferez moins le malin !
— Mais, enfin, si tu n’aimes pas les tartes aux pommes, c’est complètement débile ! Tu n’as pas peur de te rendre malade ?
— Si ! J’en ai la nausée rien que d’y penser ! Mais ce n’est pas grave ! C’est un sacrifice que je dois faire. Pour le bien de la fraise. Et si je me bouffe pas dix tartes aux pommes, vous allez me reprocher de parler de ce que je ne connais pas. Alors je me dévoue. Pour la cause. C’est très important que les gens sachent qu’il n’y a pas de fraises dans vos tartes aux pommes !
— Mais ils le savent déjà, William ! C’est pour ça que ça s’appelle des tartes aux pommes. Je ne voudrais pas te vexer, mais je trouve ton idée un peu étrange… Tu n’as pas peur d’obtenir un résultat inverse à tes espérances ? Je veux dire : les gens qui n’aiment pas les tartes aux pommes, de toute façon, ils ne seraient pas venus en manger… Et ceux qui les aiment, s’ils tombent sur ton blog, ils vont sûrement venir ici. Tu vas me faire de nouveaux clients ! C’est très généreux de ta part, mais ça me gêne que tu te rendes malade pour ça…
— S’il y a des crétins pour manger des tartes aux pommes sans la moindre fraise à l’intérieur, c’est leur problème, pas le mien !
Une queue s’était formée dans la pâtisserie, et l’un des clients, qui avait commencé à montrer des signes d’agacement depuis quelques instants, s’emporta soudain pour de bon.
— Bon, eh, trouduc ! Tu commences à nous faire chier avec tes fraises, là ! J’ai autre chose à foutre, moi ! Si tu veux des fraises, bouffe une putain de tarte aux fraises et arrête de nous faire chier !
Strongtan exulta.
— Ha ! Ha ! Eh bien bravo ! Voilà, vos clients, ils sont bien élevés ! Quel langage ! M’étonne pas que vous ayez des clients aussi grossiers avec les tartes que vous leur refilez !
— Certes, c’est un peu grossier, s’excusa le pâtissier, mais il faut reconnaître que tu commences à sérieusement nous casser les couilles, William… Bon… Je ne voudrais pas te mettre dehors, mais il faut justement que j’aille refaire des tartes aux pommes…
— Oh ! Mais allez-y! Faîtes-les, vos tartes aux pommes sans fraises ! Moi je vais faire mon blog, et on verra qui rira le dernier
— Euh, d’accord… Au revoir, William…
Strongtan quitta la pâtisserie d’un air satisfait sous le regard médusé des clients. Certains repartirent avec des tartes aux fraises, d’autres avec des tartes aux pommes. On n’entendit plus jamais parler de Strongtan qui, dit-on, se découragea à la troisième tarte aux pommes…
FIN »
« Avant-propos : L’histoire que nous allons vous narrer ici est inspirée de faits réels. Dans un souci du respect de la vie privée, nous avons délibérément changé le nom des protagonistes.
William Strongtan entra d’un pas décidé dans la pâtisserie Pondélion, petite échoppe qui, depuis quelques mois, avait acquis une certaine réputation dans le quartier en faisant de belles tartes aux pommes qui, toutes proportions gardées, s’arrachaient… comme des petits pains.
— Bonjour William, tu vas bien ? demanda le pâtissier en le voyant entrer.
Monsieur Pondélion avait pour habitude de tutoyer les gens du quartier, non pas par manque de respect, mais simplement parce qu’il n’aimait pas la distance qu’imposait le voussoiement, cette étrange spécificité de la langue française. Monsieur Strongtan, qui était, lui, plus attaché à ladite distance, s’entêtait à user du vous.
— Eh bien, je suis venu vous dire que je n’aime pas vos tartes aux pommes, monsieur.
Pondélion parut surpris.
— Ah bon ? Mais tu les as goûtées ?
— Non, mais ça se voit tout de suite. Pas besoin de les goûter pour savoir qu’elles ne sont pas bonnes.
— Diantre ! Qu’est-ce que tu leur reproches, William, au juste ?
— Ya pas de fraises dedans.
— Pardon ?
— Ya pas de fraises dans vos tartes aux pommes.
— Mais… Forcément, ce sont des tartes aux pommes !
— Et alors ? C’est pas une raison pour ne pas y mettre des fraises !
— Eh bien… Si… Sinon ça serait une tarte aux pommes et aux fraises…
— Ah voilà ! Alors forcément, les gens aiment les pommes – parce que les gens sont cons, c’est bien connu – et du coup, vous leur faites des tartes aux pommes, et vous ne mettez pas de fraises dedans. Franchement, c’est du mercantilisme !
— Mais, enfin, si tu n’aimes pas les tartes aux pommes, tu devrais peut-être manger des tartes aux fraises !
— Oh oh ! Mais j’en mange ! J’en mange, mon bon monsieur ! Et je peux vous dire qu’elles sont nettement meilleures que vos tartes aux pommes ! Parce qu’au moins, ya des fraises dedans !
— Je… Euh… Je ne suis pas sûr de comprendre, William.
— C’est pourtant simple. Moi, j’eusse voulu qu’elles soient avec des fraises, vos tartes aux pommes !
— Qu’elles fussent, glissa le pâtissier avec malice.
— Pardon ?
— J’eusse voulu qu’elles fussent. Puisque tu veux jouer les donneurs de leçons, et que tu utilises des archaïsmes de notre belle langue, tant qu’à faire, sois plus rigoureux.
— C’est un peu condescendant, ça, tout de même ! s’offusqua Strongtan, vexé.
— C’est toi qui as commencé, William. Et puis, honnêtement, je ne comprends pas bien où tu veux en venir.
— Vous êtes sourd ou quoi ? Il n’y a pas de fraises dans vos tartes aux pommes ! Alors forcément, vous en vendez plein ! C’est un peu facile…
— Mais… Enfin, je ne suis pas le seul à faire des tartes aux pommes... Il y en a qui en font des meilleures que moi, d’ailleurs, mais avec des pommes quand même. Et si les miennes ont un peu de succès, c’est peut-être parce que je les fais avec amour, William, tu vois ?
— Et prétentieux avec ça ! Vous pensez peut-être que je suis le seul à penser ça ? Eh bien, détrompez-vous, Pondélion, on est plusieurs ! On est toute une clique ! Et d’ailleurs, mes copains et moi, on va créer un blog pour dénoncer ça. Ça va s’appeler Le défi de la tarte aux pommes.
Pondélion se retint de rire.
— C’est-à-dire ?
— C’est simple : mes copains et moi, on va tous bouffer dix de vos tartes aux pommes, et après on publiera nos articles pour dire à tout le monde qu’il n’y a pas une seule fraise dans toutes vos tartes aux pommes ! Vous allez voir ce que vous allez voir ! Vous ferez moins le malin !
— Mais, enfin, si tu n’aimes pas les tartes aux pommes, c’est complètement débile ! Tu n’as pas peur de te rendre malade ?
— Si ! J’en ai la nausée rien que d’y penser ! Mais ce n’est pas grave ! C’est un sacrifice que je dois faire. Pour le bien de la fraise. Et si je me bouffe pas dix tartes aux pommes, vous allez me reprocher de parler de ce que je ne connais pas. Alors je me dévoue. Pour la cause. C’est très important que les gens sachent qu’il n’y a pas de fraises dans vos tartes aux pommes !
— Mais ils le savent déjà, William ! C’est pour ça que ça s’appelle des tartes aux pommes. Je ne voudrais pas te vexer, mais je trouve ton idée un peu étrange… Tu n’as pas peur d’obtenir un résultat inverse à tes espérances ? Je veux dire : les gens qui n’aiment pas les tartes aux pommes, de toute façon, ils ne seraient pas venus en manger… Et ceux qui les aiment, s’ils tombent sur ton blog, ils vont sûrement venir ici. Tu vas me faire de nouveaux clients ! C’est très généreux de ta part, mais ça me gêne que tu te rendes malade pour ça…
— S’il y a des crétins pour manger des tartes aux pommes sans la moindre fraise à l’intérieur, c’est leur problème, pas le mien !
Une queue s’était formée dans la pâtisserie, et l’un des clients, qui avait commencé à montrer des signes d’agacement depuis quelques instants, s’emporta soudain pour de bon.
— Bon, eh, trouduc ! Tu commences à nous faire chier avec tes fraises, là ! J’ai autre chose à foutre, moi ! Si tu veux des fraises, bouffe une putain de tarte aux fraises et arrête de nous faire chier !
Strongtan exulta.
— Ha ! Ha ! Eh bien bravo ! Voilà, vos clients, ils sont bien élevés ! Quel langage ! M’étonne pas que vous ayez des clients aussi grossiers avec les tartes que vous leur refilez !
— Certes, c’est un peu grossier, s’excusa le pâtissier, mais il faut reconnaître que tu commences à sérieusement nous casser les couilles, William… Bon… Je ne voudrais pas te mettre dehors, mais il faut justement que j’aille refaire des tartes aux pommes…
— Oh ! Mais allez-y! Faîtes-les, vos tartes aux pommes sans fraises ! Moi je vais faire mon blog, et on verra qui rira le dernier
— Euh, d’accord… Au revoir, William…
Strongtan quitta la pâtisserie d’un air satisfait sous le regard médusé des clients. Certains repartirent avec des tartes aux fraises, d’autres avec des tartes aux pommes. On n’entendit plus jamais parler de Strongtan qui, dit-on, se découragea à la troisième tarte aux pommes…
FIN »
Bonjour,
Serait-il possible de savoir de qui vient cette critique?
Merci d'avance.
Serait-il possible de savoir de qui vient cette critique?
Merci d'avance.
Vous devez être connecté pour poster des messages : S'identifier ou Devenir membre