Dirlandaise

avatar 29/01/2006 @ 14:26:33
Voici une autre histoire qui m'a particulièrement bouleversée. Certaine phrases sont étranges, peut-être est-ce du à la traduction mais vous en jugerez par vous-même. Rassurez-vous, je ne vais pas toutes vous les soumettre mais je tente de réparer mon erreur en ouvrant une discussion rattachée au livre.

LA BALLERINE

Elles disent toutes que je les rends folles, surtout ma femme. Je ne lui dis jamais qu’elle est belle, ou jolie. Je lui dis qu’elle est bien. Elle dit que sa mère est bien. Je dis : « bien », c’est bien, c’est très bien, ça me convient. Que dire si elle est belle un jour, et encore plus belle le lendemain ? Je n’aurais plus rien à dire. Il faut toujours avoir quelque chose en réserve.

Je vois toute la journée des gens qui n’ont pas de réserve. De là vient mon intérêt pour la douleur. Ce que la douleur a de remarquable, c’est qu’on ne peut pas raconter des blagues. Pas besoin de passer beaucoup de temps à discuter. Quand ils viennent me voir, les malades ont été abandonnés par tous les autres. Il ne reste plus de chair sur l’os. J’admire la douleur. Il faut lui rendre hommage. Il n’existe pas de peur plus fondamentale que la peur d'une douleur constante, interminable.

L. est arrivé à mon cabinet à cause d’une douleur dans la jambe gauche. Elle est tout sourire. Je me dis : Cette femme est toquée. En l’examinant, je constate non seulement qu’elle souffre, mais qu’elle marche difficilement parce que sa jambe s’est raidie. Elle et son mari sourient tous les deux comme des niais. Je soupçonne une tumeur de la moelle épinière, et les indices me donnent raison. Je demande au neurochirurgien de pratiquer une biopsie de sa moelle épinière, et il le fait. Après la biopsie, sa moelle épinière a encore moins de réserve et elle apprend à utiliser une sonde, commence un programme intestinal et n’a plus trop l’usage de son autre jambe. La biopsie revient, pas concluante. Ça me paraît incroyable. Je passe un temps fou à téléphoner au pathologiste, qui est renommé dans le monde entier, pour lui demander s’il ne peut pas revoir ça pour moi. J’appelle le neurochirurgien, qui me dit : « Je crois que j’en avais pris un bon bout. » « Eh bien, c’est des choses qui arrivent », dit-elle en souriant.

Je déclenche le grand jeu. Je la présente à mes confrères, on lui prend du liquide rachidien, on examine sa peau, ses poumons, son cerveau et son sang. À part une tumeur non expliquée de la moelle épinière et le fait qu’elle pisse et chie au lit, elle est en parfaite santé. Pendant quelques mois, sa tumeur ne grossit pas et je lui balance quelques drogues. Des pilules pour réduire les spasmes de sa vessie et de ses jambes, et quelques stéroïdes pour me sentir mieux.

Son mari sourit avec enthousiasme et me dit qu’il est tellement content de m’avoir. J’ai des envies de verrouiller la porte et de les garder enfermés pour toujours afin qu’ils ne sortent pas dans les rues. J’ai bien besoin de ça, lui hilare et elle maigre comme un squelette dans sa chaise roulante avec sa tumeur, annonçant à qui veut les entendre : « Regardez, voyez quel docteur épatant nous avons. Nous sommes si contents de l’avoir ! »

On ne peut pas faire grand-chose de plus. Rien n’a changé depuis des mois. Je me dis qu’elle aura une sorte de vie, mais au moins ce sera la sienne. J’ai de leurs nouvelles de temps en temps. Des ordonnances à renouveler, des demandes de physiothérapie supplémentaire. Ils habitent à cent miles de chez moi, et viennent parfois pour une visite d’un quart d’heure. On parle pendant treize minutes et puis je l’examine. J’essaie de prévoir ça quand il n’y a personne. Je suis toujours leur docteur préféré.

Un vendredi, son mari m’appelle. les symptômes semblent différents. Je leur dis de venir à la clinique — cent miles en voiture. Au scanner, on voit une tumeur large de deux pouces à l’arrière de son cerveau, là où trois mois plus tôt on ne voyait que du cerveau. Quelques minutes de plus, et la pression la tue. Son mari arrive en courant et me secoue la main en disant : « Je suis si content que vous soyez là. » Elle a la migraine et les yeux qui tressautent à cause de la tumeur, mais elle est contente de me voir, elle aussi. Ce soir-là, le neurochirurgien lui décalotte le crâne. Elle commence très vite à se sentir mieux. Plusieurs pathologistes et cancérologues de la ville déclarent qu’il s’agit d’une tumeur peu commune, mais pas rare.

Elle a commencé ses traitements et revient me voir aujourd’hui. Ils sont tous deux épanouis. Elle a les jambes maigres et rouges, avec des taches. Il n’y a plus dessus ni poil, ni peau. Les ongles de ses pieds font peur à voir. Elle dit : « Ah, regardez, regardez ! » Elle remue les pieds d’avant en arrière dans sa chaise roulante pour me montrer. Et puis elle dit : « Regardez ça. » Elle se soulève en poussant fort sur ses mains. Ses pieds et ses orteils pointent vers le bas parce qu’à la suite des dégâts subis par sa moelle épinière, ses tendons d’Achille ont rétréci et lui tirent les talons vers le haut. Son visage est large et rond, une face de lune à cause des stéroïdes. Une fine toison le recouvre. Ses sourcils sont arqués et son front ridé au maximum. Elle est tout sourire et ses yeux, qui tressautent toujours, regardent ses pieds pour me montrer qu’elle se tient debout sur les coussinets et les doigts de ses pieds. Elle a l’air d'une petite fille. Une ballerine. Son mari est fier et regarde ses pieds, lui aussi. Et puis elle se rassied et se plaint : « Ah, si je pouvais seulement me débarrasser de ce gros visage ! — Non, lui dis-je. Vous êtes belle. » Et c’est vrai.

NICOLAS WIEDER
Los Angeles, Californie

Dirlandaise

avatar 29/01/2006 @ 14:54:10
Je recopie le premier récit également alors, ils seront tous les deux rattachés à la critique du livre.

SANS LOGIS À PRESCOTT, ARIZONA

Au printemps dernier, j’ai changé de vie de manière radicale, et ce n’était pas une crise de maturité. À cinquante-sept ans, j’en ai bien passé l’âge. J’ai décidé que je ne pouvais pas attendre huit ans de plus ma retraite, et que je ne pouvais pas rester secrétaire juridique huit ans de plus. J’ai démissionné de mon emploi, vendu ma maison, mes meubles et ma voiture et donné mon chat à mes voisins, et je suis partie à Prescott, Arizona, une communauté de trente mille personnes nichée dans les Bradshaw Mountains, avec une belle bibliothèque, une université du premier cycle et une jolie place communale. J’ai investi le produit de la vente de tous mes biens et je touche une rente de trois cent soixante-quinze dollars par mois. C’est de cela que je vis.

Je suis anonyme. Je ne figure sur aucun programme gouvernemental. Je ne reçois aucune assistance, pas même des tickets-repas. Je ne mange pas à l’Armée du Salut. Je n’accepte pas la charité. Je ne dépends de personne.

Ma base, c’est le centre-ville, où tout ce dont j’ai besoin se trouve dans un rayon d’un mile et demi — facilement accessible à pied. Pour aller plus loin, je prends le bus qui fait le tour de la ville toutes les heures et coûte quinze dollars la journée. J’ai une boîte postale, coût : quarante dollars par an. La bibliothèque est connectée à Internet et j’ai une adresse électronique. Mon espace de rangement me revient à vingt-sept dollars par mois, et j’y ai accès vingt-quatre heures sur vingt-quatre. J’y range mes vêtements, mes produits de beauté et d’hygiène, quelques ustensiles de cuisine et mes papiers. Je loue un coin tranquille dans un jardin à peu de distance de mon lieu de rangement pour vingt-cinq dollars par mois. C’est ma chambre à coucher, comprenant une tente igloo, un sac de couchage, un matelas et une lanterne. J’ai sur moi, dans un gros sac solide, bouteille d’eau, lampe de poche, walkman, affaires de toilette et équipement pour temps de pluie.

Le Yavapai College a une piscine aux dimensions olympiques et un vestiaire pour femmes. J’y suis des cours et j’ai donc accès à ces installations ; coût : trente-cinq dollars par mois. J’y vais tous les matins pour faire ma toilette et prendre une douche. Je vais à la laverie avec un petit paquet de linge chaque fis que c’est nécessaire ; coût : quinze dollars par mois. Une allure présentable est l’un des éléments important de mon nouveau mode de vie. Quand je vais à la bibliothèque, personne ne peut deviner que je suis sans domicile. La bibliothèque est mon living. Je m’installe dans un fauteuil confortable et je lis. J’écoute de la belle musique sur la stéréo. Je communique avec ma fille par courrier électronique et je tape des lettres sur l’ordinateur. Je reste au sec quand il fait mouillé dehors. Malheureusement, la bibliothèque n’a pas la télévision, mais j’ai trouvé au collège un salon réservé aux étudiants où il y a un poste. Je peux presque toujours regarder L’heure des infos, Les Chefs-d’œuvre du théâtre et les films policiers. Pour satisfaire encore mes besoins culturels, j’assiste aux répétitions générales de la compagnie de théâtre amateur de la ville, gratuitement.

Me nourrir à bon marché et de façon équilibrée constitue la plus forte gageure. Mon budget m’autorise à dépenser deux cents dollars par mois pour manger. J’ai un réchaud à gaz de camping et un percolateur à l’ancienne. Tous les matins, je vais à mon petit entrepôt me faire du café, j’en remplis mon thermos, je charge mon sac à dos, me rends au parc et trouve un coin ensoleillé où savourer mon café et écouter sur mon walkman les premières émissions de la journée. Le parc est mon jardin. C’est un endroit merveilleux à fréquenter quand le temps est clément. Je peux m’allonger sur l’herbe, lire, faire la sieste. Les grands arbres m’offrent leur ombre bienvenue quand il fait chaud.

Mon nouveau mode de vie est resté confortable et agréable jusqu’ici parce qu’il a fait un temps délicieux à Prescott au printemps, en été et en automne, même s’il est vrai qu’il a neigé à Pâques. Mais j’étais bien préparée. J’ai une parka, des bottes et des gants, le tout chaud et imperméable.

Pour en revenir à l’alimentation. Le Jack in the Box propose quatre articles à un dollar : le « Breakfast Jack », le « Jumbo Jack », un sandwich au poulet ou deux tacos au bœuf. Après avoir bu mon café dans le parc, je m’offre un « Breakfast Jack ». Il y a au Centre pour adultes un département d’aide alimentaire où je peux avoir un déjeuner copieux pour deux dollars. Pour le dîner, Jack in the Box, de nouveau. J’achète des fruits et des légumes frais chez Albertson. Une fois de temps en temps, je vais à la Pizza Hut – tout ce qu’on peut manger pour quatre dollars quarante-neuf. Quand je reviens le soir à mon petit entrepôt, je me fais du pop-corn sur mon réchaud à gaz. Je ne bois que de l’eau et du café ; les autres boisson sont trop chères.

J’ai découvert encore une façon de varier mes expériences alimentaires, tout en les combinant avec des soirées culturelles. Il y a une galerie d’art au centre-ville, et les vernissages des nouvelles expositions sont annoncés dans le journal. Il y a quinze jours, j’ai mis ma robe et mes collants, je suis allée au vernissage, j’ai profité du buffet et admiré les tableaux.

Je me suis laissé pousser les cheveux et je les attache en queue de cheval comme je faisais à l’école primaire. Je ne les teins plus. J’aime bien le gris. Je ne me rase plus les jambes ni les aisselles, je ne me vernis plus les ongles, je n’utilise plus de mascara, de fond de teint, de blush ni de rouge à lèvres. Le look nature ne coûte rien.

J’adore aller au collège. Cet automne, j’apprends la céramique, je chante dans une chorale et je suis des cours d’anthropologie culturelle, pour mon enrichissement, pas pour les diplômes. J’adore lire tous les livres que j’ai envie de lire mais pour lesquels je n’avais jamais le temps. J’ai aussi le temps de ne faire absolument rien.

Bien sûr, il y a des aspects négatifs. Mes amis de chez moi me manquent. Claudette, qui travaille à la bibliothèque, m’a prise en amitié. Elle a écrit des articles de fond pour le journal local et sait y faire pour obtenir des renseignements sur les gens. J’ai fini par lui raconter qui je suis et comment je vis. Elle n’essaie jamais de me persuader de vivre autrement, et je sais que je peux compter sur elle en cas de besoin.

Mon chat me manque aussi. Je ne perds pas l’espoir qu’un chat vienne m’adopter, de préférence avant l’hiver. Ce serait bien de dormir blottie contre une fourrure tiède.

J’espère pouvoir survivre à l’hiver. On m’a dit qu’il peut y avoir beaucoup de neige à Prescott et de longues périodes de gel. Je ne sais pas ce que je ferai si je tombe malade. Je suis une optimiste, d’une façon générale, mais ça m’inquiète. Priez pour moi.

B.C.
Prescott, Arizona

Bolcho
avatar 29/01/2006 @ 15:01:06
Si c'est comme ça, je recopie ma réaction première:
"N’est-ce pas que c’est beau ! Offrez-vous ce plaisir de lire 172 récits de toutes sortes et de qualités diverses. J’ai comparé mes coups de cœur avec ceux de Dirlandaise : nous ne sommes pas d’accord souvent (mais pour « Noël en famille » nous le sommes), mais nous avons tous deux aimé le bouquin, ce qui prouve qu’il y en a pour tous les goûts.
Allez quoi, lisez-le, comme ça on pourra tous comparer nos préférés."

Lincoln 29/01/2006 @ 15:28:19
Les deux histoires que tu nous proposes, Dirlandaise, sont bourrées d’optimiste. On peut être admiratif mais on se demande quand même comment font certaines personnes pour garder cette énergie dans les situations qu’elles rencontrent. Est-ce cela qu’on appelle l’énergie du désespoir? Pas forcément selon le deuxième texte.
Il nous reste alors la personnalité, certains ont l’optimisme vissé dans les intestins, d’autres le façonnent au gré des expériences et rencontres de la vie. Une façon détachée et sereine d’aborder les soucis ou les drames. Un don? Je ne sais pas. Une philosophie? Peut-être. Est-ce communicatif? Si seulement!
On peut aussi tenter de tromper le destin en feignant la bonne humeur alors que le désespoir nous ronge… pas bon pour l’ulcère à l’estomac. Ou essayer de jouer “les gros durs” en espérant que le mal se découragera… courageux, mais incertain.
Deux belles histoires qui donnent envie de lire le livre. Merci Dirlandaise et Bolcho.

Bolcho
avatar 29/01/2006 @ 15:52:31
Et pour vous accrocher définitivement, je vous en mets deux autres, le premier du livre d’abord (et l’un des plus courts) :

La poule

Un dimanche matin où je marchais dans Stanton Street, je vis une poule à quelques mètres devant moi. Je marchais plus vite que la poule, et je la rattrapai donc peu à peu. Au moment où nous atteignîmes la 18e avenue, je la talonnais. La poule prit vers le sud dans l’avenue. Arrivée devant la quatrième maison, elle tourna dans l’allée, gravit en sautant les marches du seuil et frappa sur la porte métallique à coups de bec acérés. Après un instant, la porte s’ouvrit et la poule entra.
Linda Elegant, Portland, Oregon

Et le second, à propos duquel Dirlandaise et moi avons pareillement été émus (et qu’ainsi chacun sache bien que nous avons des cœurs de midinettes…) :

Noël en famille

C’est mon père qui m’a raconté cette histoire. Elle s’est passée au début des années vingt, à Seattle, avant ma naissance. Il était l’aîné de six frères et une sœur, dont certains n’habitaient plus la maison.

Les finances de la famille étaient mal en point. Les affaires de mon père s’étaient effondrées, il n’y avait pratiquement pas de travail et le pays était proche de la crise. Nous eûmes un arbre de Noël, cette année-là, mais pas de cadeaux. Nous ne pouvions tout simplement pas nous le permettre. Le soir de Noël, nous sommes tous allés nous coucher avec un moral assez bas.
Chose incroyable, à notre réveil, le matin de Noël, il y avait une montagne de cadeaux sous l’arbre. Nous avons essayé de nous dominer pendant le petit-déjeuner, mais nous avons expédié le repas en un temps record.
Et alors, ç’a été la fête. Ma mère est passée la première. Nous l’entourions, pleins d’impatience, et quand elle a déballé son paquet, nous avons vu qu’elle avait reçu un vieux châle qu’elle avait « égaré » plusieurs mois auparavant. Mon père a reçu une vieille hache au manche cassé. Ma sœur, ses vieilles pantoufles. Un des garçons, un pantalon rapiécé et chiffonné. Moi, j’ai eu un chapeau, celui-là même que je croyais avoir oublié dans un restaurant en novembre.
Chaque vieillerie provoquait une surprise totale. Bientôt, nous riions tellement fort que nous pouvions à peine dénouer les ficelles du paquet suivant. Mais d’où venaient ces largesses ? C’était mon frère Morris. Depuis plusieurs mois, il avait subtilisé de vieux objets dont il savait qu’ils ne nous manqueraient pas. Et puis, la veille de Noël, sans bruit, après que nous étions tous allés nous coucher, il avait emballé les cadeaux et les avait entassés sous l’arbre.
Je me souviens de ce Noël comme de l’un des plus beaux que nous ayons jamais eus.
Don Graves, Anchorage, Alaska

Darius
avatar 30/01/2006 @ 08:32:01
Incroyable, mais ce "Noël en famille" me fait penser furieusement à un récit de vie qu'une participante a lu lors d'un atelier d'écriture.
Egalement une histoire touchante d'une petite fille juive dans les années 30 qui vivait qque part dans l'ancienne Tchéchoslovaquie dans une maison où, à son grand désarroi, les arbres fruitiers ne donnaient pas de fruit. Un jour, alors qu'elle rentrait chez elle, quelle ne fut pas sa surprise de voir des fruits tous plus beaux les uns que les autres accrochés aux arbres !!! Devinez ce qui s'était passé ?

Tous ces récits de vie auxquels j'ai participé, là, c'est sûr qu'on pourrait en faire un livre à la manière de Paul Auster. D'ailleurs, une revue du récit de vie, le numéro 1 va sortir en février, grâce à l'initiative de Daniel Simon, l'un des animateurs-écrivain.

La revue s'intitulera "Je" et sera présentée lors de la foire du livre de Bruxelles.

Darius
avatar 30/01/2006 @ 08:59:28
Voir le lien ci dessous concernant la revue "Je"

http://img65.imageshack.us/my.php?image=je1qm.png

Page 1 de 1
 
Vous devez être connecté pour poster des messages : S'identifier ou Devenir membre

Vous devez être membre pour poster des messages Devenir membre ou S'identifier