Darius
avatar 01/06/2005 @ 09:11:48
Bonjour, Bolcho, tu sais que je lis toujours tes critiques, d'abord pour l'humour qui s'en dégage mais aussi, intriguée par le choix du sujet.

Dans la nuit des yeux, tu écris "Il y est sclauneur et, excellent ouvrier, deviendra bouveleur. Je fais exprès de ne pas traduire ces mots, pour que vous alliez les chercher dans les veines du savoir, la lampe au front et le pic à la main, comme lui. Et des mots de ce type, ses textes en sont riches. Il y a aussi les abatteurs, les recarreurs, la faille à la coupure, la faille au troussage, la colonne de canards, le chassage, les havries, les layettes failleuses, le cul de la vallée et il arrive que l’on troue à eau. Tout ça, c’est la vie de la bure."

Face à cette avalanche de mots, une petite question me vient à l'esprit : est il vraisemblable que l'auteur, descendu à la mine à 15 ans, ait connu tout ce vocabulaire ? Les mineurs l'utilisaient-ils vraiment entre eux ? Et qui donc le leur avait appris ? Puisque nous-mêmes ne le connaissons pas (ou plus.. je ne sais pas)

Si je me réfère à mon expérience, pour être née et avoir grandi dans un mileu paysan/ouvrier, j'ai remarqué que notre vocabulaire était bien pauvre par rapport aux travaux que nous effectuions et aux outils que nous employions pour le faire.
Et si je demande à ma mère, elle l'ignore tout autant que moi.
Peut-être mon père pourrait-il savoir, car tout cela était métier d'homme... mais il n'est plus là pour témoigner.

Qu'en penses tu ?

MOPP 01/06/2005 @ 12:38:48
Je me rappelle très bien de l'expression "faire monter le trait " : tout commençait par une petite "pique", une sorte de petite accélération dans le propos pour envenimer progressivement le débat.
Une chose étonnante : dans ses rêves à voix haute, mon père jouait un double rôle, celui du chef (porion ?)qui parlait français et lui, il répondait avec sa langue picarde...
Je me rappelle aussi le conflit en famille : mes parents me reprochaient de parler français !

Patman
avatar 01/06/2005 @ 13:35:07
Le porion était en effet le contremaître. Quant au mineur représenté sur les anciennes pièces de 50 centimes belges...Pas sur qu'il s'agisse de Malva. J'ai entendu dire qu'il s'agissait du mineur qui avait découvert les ossements d'iguanodon de Bernissart. A vérifier !

MOPP 01/06/2005 @ 15:59:51
Le porion était en effet le contremaître. Quant au mineur représenté sur les anciennes pièces de 50 centimes belges...Pas sur qu'il s'agisse de Malva. J'ai entendu dire qu'il s'agissait du mineur qui avait découvert les ossements d'iguanodon de Bernissart. A vérifier !


Oui, c'est exact, Patman, tu as raison, cela m'est revenu, mais je crois qu'à un moment, tout a été lié dans ma tête.

Saule

avatar 01/06/2005 @ 17:33:52
C'est plus récent mais je me souviens de l'expression "geules noires" pour parler des manifestants lors des fermetures des mines dans le limbourg.

Je ne sais plus comment on appellait les métallos qui montaient à Bruxelles pour tout casser, il y a 1-15 ans il me semble, était-ce aussi des gueules noires ?

Bolcho
avatar 01/06/2005 @ 18:36:19
Bonjour Darius !
En ce qui concerne ta question sur la richesse du vocabulaire, je ne sais pas trop quoi répondre, n'étant pas vraiment de ce milieu. Malva présente cette profusion lexicale comme très naturelle et partagée par tous. Je peux témoigner que le milieu de la presse manie lui aussi un jargon fécond. Mais peut-être que tout cela se dilue de plus en plus sous l'influence d'un "vernaculaire- TV" ?
En ce qui concerne la pièce de 50 centimes, voici ce que j'ai trouvé et qui parait assez précis:
http://users.skynet.be/bruttuss/delplancq.htm

Lucien
avatar 01/06/2005 @ 19:31:31
Le vocabulaire de tout métier est forcément très riche et très précis, et les hommes qui le pratiquent le connaissent nécessairement.
J'ai consacré un travail au vocabulaire agricole de mon village : le nombre de mots est considérable. J'avais recherché le vocabulaire dialectal, mais mon témoin connaissait pratiquement toujours aussi les mots français correspondants.

Darius
avatar 02/06/2005 @ 08:26:48
merci Bolcho et merci leura.

En ce qui concerne ce que tu viens d'ajouter leura, là, je m'y retrouve plus.

En effet, tous ceux qui effectuaient le travail connaissaient le vocabulaire dialectal mais contrairement à ton témoin, ils ignoraient la version française.
Là, j'ai connu quelques expressions lorsque je vivais chez mes parents, mais je serais incapable de traduire car je ne suis pas sûre que les mots existaient en français.

En tout cas, merci d'avoir éclairé ma lanterne..

Darius
avatar 02/06/2005 @ 08:32:57
Sorry Lucien.... j'ai été trop rapide, j'ai lu "L" et automatiquement j'ai pensé "Leura". L'habitude, quoi !!! Car on se retrouve souvent, Leura et moi, dans les mêmes débats !!

Intéressant ton dictionnaire agricole. Dans mon village, qqun en a également rédigé un, mais il s'est surtout penché sur le nombre de mots allemands utilisés par les paysans, ignorants souvent qu'il s'agissait de l'allemand (il s'agit d'un village situé à l'est du pays)

MOPP 02/06/2005 @ 09:16:30
Pour ceux et celles que cela intéresse : il existe un musée de la vie rurale particulièrement intéressant. Toutes les professions liées à cette vie, y sont représentées, les objets-outils exposés, le vocabulaire attribué et expliqué. Ce musée se situe à HUISSIGNIES, non loin d'AUBECHIES (archéosite), de BELOEIL (château des de Ligne), non loin de BERNISSART-HARCHIES (iguanodon et ex-charbonnage, lac) : une perspective de randonnée en Hainaut occidental.

Bolcho
avatar 02/06/2005 @ 12:56:24
A propos d’estompement du vocabulaire professionnel, une collègue (vous voyez bien qu’on travaille !), « carolo » (de Charleroi donc) bon teint, fait l’hypothèse suivante qui me paraît particulièrement intéressante en ce qui concerne notamment le milieu de la mine. Une génération a fait une sorte de serment, celui de ne plus jamais descendre dans la mine et en tous les cas de ne jamais laisser les enfants y aller. Une sorte de tabou a été mis sur la mine et ce qui l’entourait, y compris son langage propre. D’où l’oubli actuel, même dans les régions et les familles qui ont été intimement mêlées au charbon. Ce serait donc la volonté d’ascension sociale qui serait à l’origine d’un oubli presque volontaire. On pourrait retrouver un processus semblable touchant d’autres milieux, notamment la paysannerie. Ma collègue fait le parallèle avec le féminisme. Une génération de femmes décide que ses filles ne seront plus dominées et elle ne transmet donc plus ni les gestes ni le langage marqué comme typique des occupations féminines traditionnelles : nettoyage, cuisine, etc.
Allez « la collègue » ! On attend tes interventions personnelles sur Critlib. Cela m’évitera de de jouer porte-parole. Le chœur de ceux et celles qui attendent des avis sur le théâtre d’aujourd’hui, je l’entends déjà clamer son impatience. Coros, exprime-toi.

Darius
avatar 03/06/2005 @ 08:36:04
Bien d'accord avec l'hypothèse de ta collègue, Bolcho, en ce qui concerne "l'estompement du vocabulaire professionnel".

Lorsque je me rappelle mon enfance, il était mal venu si on faisait des études de continuer à utiliser ces mots de la paysannerie qui étaient pourtant bien savoureux - mais c'est plus tard qu'on en comprend la richesse - . Et voilà comment j'apparais dans une génération sacrifiée..

Pour ce qui est des gestes transmis de mère en fille, tu as également raison (enfin, ta collègue..).
Je me souviens avoir lu "du côté des petites filles" de Belotti, livre dans lequel elle explique comment les petites filles sont conditionnées par leur mère à se centrer sur le nettoyage.
Et bien, depuis cette lecture, je me suis désintoxiquée complètement de cette habitude, mais comme pour toute drogue, cela m'a prit du temps.

Le revers de la médaille, c'est qu'à présent, impossible de revenir en arrière, et pourtant ma maison aurait bien besoin d'un coup de balai de temps en temps. Il n'y a que la cuisine qui a retrouvé grâce à mes yeux....

Reste plus que ma fille prenne un jour le contrepied de ce que je ne fais pas dans la maison, mais pour l'instant, c'est assez mal parti.. Y a pas un bouquin qui prône les joies du récurrage ???

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