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Yali 01/06/2005 @ 00:08:54
   Nous sommes demain, déjà, et bientôt, très bientôt, je m’en irai. Pas que je vous quitterai vraiment, ça non, mais je m’absenterai, et, ça me met tellement mal à l’aise que j’emploie le futur alors que, c’est ici que je vous dis au revoir, ici, et maintenant.
   Un peu de courage, me dis-je, puis je poursuis ces mots, accepte le présent, doucement, et doucement je pianote pour doucement encore vous remercier d’être. Mais comment faire, mais comment dire…
   — Pourquoi ne pas leur dire la vérité, tout bêtement ?
   — La vérité ?
   — Que tu les aimes et que c’est beaucoup grâce à eux que tu oses entreprendre.
   Elle n’a pas tort Kity. Comme à son habitude elle grimpe, se pause sur mon bureau, me balance un regard jaune satellisé d’autant de brillances, puis, comme seules les chattes savent le faire, clignent des yeux genre coulée douce pure séduction.
   — Un « Vous allez me manquer », ça irait ?
   — C’est banal à mourir, dit-elle
   — Banal, oui, mais si vrai !
   Sur le bureau, autant d’ordinateurs branchés sur Cl, sous le bureau, le serveur, j’hésite mille fois devant l’icône « réinitialiser », mille et une fois, puis finalement je clique. Clic, et toutes les préférences disparaissent et sagement vont se ranger dans un disque dur que je déconnecte et range dans la foulée. Dessus, il y a marqué « Canta Libris».
   À compter de cet instant, c’est comme si le monde avait stoppé sa course, comme si, dégagé de sa trajectoire, je me désatellisais, comme si je n’étais plus.
   — Vous allez me manquer, je répète
   — Banal !
   Je fous le feu à une clope, une Craven A, goût amer, et souvenirs qui déjà bouffent l’âme :
   « Parfum bleuté de Craven A
   Vous me manquez déjà »
   J’en mène pas large, j’ai le cœur en vrac, spoutnik, les idées au foutraque, la barbaque qui déjà saigne en pleurs, arsenic de mer
   — Vous allez me manquer !
   — Bana…
   — Ta gueule ! T’es chiante à force.
   Elle se passe une patte derrière l’oreille, dédaigneuse, vexée, s’étire, fait mine de s’en aller, puis non, revient, frotte son museau contre le mien, s’enroule dans sa queue et dit :
   — Je serais toujours là, même en absence
   — Tout comme moi, tu sais.
   — Et tout comme eux
   — Et tout comme eux, oui !
   — Alors peut-être qu’un « au revoir » suffit.
   — Accompagné d’un merci, un merci sincère et…
   — Plein de vie !
   Elle sourit. Sourit de son sourire de chatte, tandis que je compose un : « Merci sincère et plein de vie ».
   Merci
   Puis tranquille, elle appuie sur « envoyer ».

   Clic

   L’instant qui suit est un peu triste, un peu plein de sentiments partagés, confus, et déjà la mélancolie se paye une place grande comme une place, genre très grande place.
   J’arrive pas à faire le trie, pas encore, alors je me lève, la prends dans mes bras, lui propose un verre que dans un ronronnement elle accepte, et direction la cuisine.
   Un bol de lait pour elle, un verre de bière pour moi, santé !
   Je déguste ma mousse, elle son lait, je déguste ma peine, déguste tout court, puis, parce que toujours les sentiments quand ils sont vrais, absolus, sont source à pensées, j’en prends une qui passe, la décompose, et, observant cette idée retournée, je sais que déjà la vie se poursuit, se poursuit avec en moi : cette beauté vous.
   Et donc : merci vous.

Felixlechat

avatar 01/06/2005 @ 01:35:24
Merci à toi, ton texte est si sympa. Il y a les chats, il y a la mousse et puis, comment expliquer que tu t'en vas? Toi, une des âmes de cet endroit? FLC.

FéeClo
avatar 01/06/2005 @ 08:39:04
" À compter de cet instant, c’est comme si le monde avait stoppé sa course, comme si, dégagé de sa trajectoire, je me désatellisais, comme si je n’étais plus."

Pfff Yali, non... pas ça de grand matin. J'ai les larmes aux yeux. Pas dormi de la nuit car je dois prendre une décision difficile: partir... Et là je lis comment se vit l'instant, l'instant même où il faut quitter. Mais... comment le ferais-je moi? J'étais si décidée hier soir, et là... pouf... à la fois tout retombe... en même temps je sens combien c'est à vivre...

Merci à toi aussi! Tes mots sont beaux parce qu'ils sont sincères. Et dire que tu t'absentes pour offrir ça à ton retour: de la beauté! ;o)

Kicilou 01/06/2005 @ 14:25:55
Sniff... Je savais pourtant, depuis le temps que tu nous l'annonces ce breack mais te lire en parler comme d'un déchirement, c'est dur. Alors tu seras plus là du tout? même pas un "coucou" en badinage de temps en temps?
Mais tu pars dans une belle envolée, avec un si beau dernier texte (en attendant le prochain, plus tard ;-) ). Tu vas me manquer à moi aussi et j'espère que tu seras très vite de retour !
Au revoir et merci toi.

Saint Jean-Baptiste 01/06/2005 @ 23:29:19
C'est bien de prendre des grandes décisions Yali, mais c'est bien triste pour nous !
Mais on pense à toi, bon courage et bon vent !
Remplis-toi la tête de nouvelles images et de nouveaux souvenirs que tu viendras nous raconter à ton retour.

Nous, on se consolera en attendant, en lisant tes textes ! :o))

Saint Jean-Baptiste 01/06/2005 @ 23:30:01
En relisant tes textes !

Kilis 02/06/2005 @ 16:59:43
Yali
Le coeur en live
au bord des lèvres
et donné là plein
d'la soupe au ciel, je vous dis!

Mitzuko
avatar 02/06/2005 @ 18:37:49
Je reviens comme un fantôme....je t'ai lu aujourd'hui, Yali. J'espère pouvoir te relire car tu sais le partage, comme un secret...Tu sais...
Alors, à bientôt Yali..

Mitzuko.

Felixlechat

avatar 04/06/2005 @ 00:55:05
Yali, j'aime ce que tu es. FLC.

Thomasdesmond
avatar 06/06/2005 @ 11:04:37
Touchant ce texte...j'entends presque la musique en fond, avec la voix off... et quelle belle écriture, quel style...ouahhh

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