Yali 29/09/2004 @ 15:23:03
   — Tu me files encore un coup de crosse l’Oisillon et je te jure que jamais tu ne verras tes quinze piges.
   — Sc’use Jim, mais j’ai pas de pelle sous la main.
   — Ouais, ben range ton flingue et sors-moi de là.
   L’oisillon s’exécuta en râlant que son nom à lui c’était Moi-neau et pas l’oisillon « Moi-neau, merde, c’était pas compliqué pourtant ! »
   Jim se débarrassa de la neige qu’abritaient ses vêtements, s’ébroua, frissonna, il était trempé comme une soupe, bordel quelle sale journée.
   — Moi-neau répétait l’oisillon.
   — Écoute l’Oisillon, je t’appellerai Moineau dès que t’en auras un peu plus sous la caboche. Promis !
   — Ouais, ben j’ai peut-être pas grand chose sous la caboche, mais je me trimballe pas avec un couteau planté dans le cul. Moi.
   Jim grimaça sur sa douleur en extirpant la lame de sa fesse. Évidemment, c’était peut-être pas le meilleur endroit pour le retrouver, n’empêche qu’à son couteau, il y tenait. Il le referma dans un claquement sec, le rangea dans sa veste, se massa le postérieur, puis se souvint.
   — Elle est où ?
   — La petite ?! T’as les yeux dessus !
   — Pas elle, l’autre ?
   — Une autre petite ?
   — Non, tête de piaf, une grande…
   — Moi-neau, pas piaf mais Moi…
   — Avec un suaire noir comme la nuit et une faux qui brille sous la lune.
   — …
   — …
   — T’es sûr que ça va Jim ?
   — Ben j’en sais trop rien, mais foutons le camp de là au plus vite . Je prends la petite, tu prends le chat et on regagne la camionnette avant de crever de froid.
   — Ben c’est que…
   — Discute pas merde.
   L’oisillon hésita, mais comme Jim s’enfuyait déjà avec la petite dans les bras, il haussa les épaules, se saisit du chat et courut pour les rattraper.
   — Jim faudrait peut-être que je te dise…
   — C’est important ?
   — Ben…
   — T’as buté quelqu’un, enfin, je veux dire : quelqu’un d’autre ?
   — Ben non mais…
   — Alors ta gueule et marche !
   — Mais…
   — Ta gueule j’ai dit, la petite dort.
   L’oisillon maugréa deux trois mots que Jim ne saisit pas. De toute manière y avait pas urgence à comprendre un môme aussi barré que celui-ci, non, aucune. Ce qu’il fallait pour l’instant, c’était remettre les pieds sur la route, la main sur la camionnette, dégotter des fringues sèches, accessoirement des pansements, une bouteille de mercurochrome, une de whisky, pourquoi pas, et surtout, surtout, mettre le plus de kilomètres entre eux et ce foutu pays. Voilà, ça c’était clair ! C’était un plan comme il les aimait, sans chichi, sans tralala et sans complication d’aucune sorte : du tangible, de la réalité sans faux baladeuse, sans suaire claquant au vent ni rien d’approchant. S’il y parvenait, Jim se promit de reconsidérer la vie dans son ensemble, se promit même de se trouver un petit boulot, une chambre propre, des habitudes, et pourquoi pas : une petite femme aimante. Ouais, c’était bien ça. Les casses, les arnaques, les meurtres et tout le fourbi, il ferait comme tout le monde, il irait voir ça au cinéma et point barre.
   Lorsque Jim déposa la petite sur la banquette de la camionnette en prenant soin de ne pas la réveiller, il y croyait dur comme fer à sa future nouvelle vie. Il se disait même qu’elle devrait avoir ce visage-là. Une nouvelle vie au visage de l’innocence ? Bien ça !
   — Ve fous le fat à l’arrière ?
   — Fais donc comme tu veux l’oisillon.
   Répondant ça, Jim ne releva pas la tête, se disait même, que la bouille d’une gosse dormante : y’avait sûrement rien de plus beau. Puis d’un coup, il fut pressé, tout à l’urgence de foutre le camp. Croiser la Mort et l’innocence en une nuit ne lui sembla soudain pas être chose naturelle. Ou trop ? Question de point de vue, n’empêche qu’à part des emmerdes il voyait pas bien ce que ça pouvait lui rapporter. Fallait y aller.
   — L’oisillon ?
   — Moi-neau !!
   — Ouais, ben ramène-toi, et à tire d’ailes encore !
   — V’arrive.
   Jim grimpa, étouffa une plainte en s’asseyant : pour conduire, un mal au cul y’a rien de moins pratique. Il serra les dents, le volant, puis il lança le démarreur sur sa douleur et adressa un merci au ciel lorsque le moteur se laissa convaincre. À partir de là, tout redevenait possible…
   Il se retourna sur l’Oisillon
   — Ben merde t’en fais une tête, qu’est-ce que t’as ?
   — Fuis allervique au chat, voilà fe que v’ai !
   — Allergique, merde mais pourquoi t’as rien dit l’oisillon ?
   — V’ai effayé !
   La camionnette s’ébranla dans un nuage de fumée grasse. Loin là-bas, le jour pointait.

Yali 29/09/2004 @ 15:24:08
Pardon pour le retard ;-)

Sorcius
avatar 29/09/2004 @ 19:56:17
Ben voilà, on retrouve nos deux compères dans leur splendeur verbale. Voilà qui redonne de la vie et surtout un grand champs libre au suivant...

Kilis 29/09/2004 @ 19:57:02
Bon épisode Yali. Une écriture qui coule, sans trop de fioritures. Pas de dispersion. On comprend tout. Efficacité: rassemlement de tous les personnages, tous dans la fourgonnette et hop! c'est reparti...

Qui fait le 9?
Je sais plus où est la bonne liste et si j'ai une place prévue quelque part dans votre monde...

Tistou 29/09/2004 @ 20:07:03
La suite vient de partir Kilis. Et c'est à Erika24 de jouer pour rendre le n°10 pour le 01/10.
Calendrier à jour lundi prochain.

Kicilou 29/09/2004 @ 20:46:01
Joli!! On retrouve le style du début! (normal, c'est le même auteur ;-) ) ça fait du bien. On plonge facilement dans ce bel épisode.
La seule remarque que j'ai à faire c'est que je n'ai pas très bien compris comment Jim s'est planté tout seul son couteau dans le c...
Mais j'ai peut-être loupé quelque chose.
En tout cas, très agréable à lire!!

Erika 24
avatar 30/09/2004 @ 09:24:56
On retrouve pleinement le style Yali et ça fait du bien. Bah oui quoi, on a plus de textes de lui !!!! Pffffff
J'ai pas bien suivi le coup du couteau mais c'est pas grave hein, je vais relire plusieurs fois !

Tistou 30/09/2004 @ 11:05:37
Merci Yali d'avoir repiqué au truc.
On commence à voir des récurrences intéressantes au niveau des personnages, comment allons nous tous pouvoir gérer ceci? Surtout que le format 3 000 signes c'est court, non?
Tu t'en es très bien sorti de la douleur dans les fesses et du coup feutré sur la tête en fin d'épisode de Monique. Ca faisait un peu piège!
Et tu m'as laissé une situation propre, merci. Pauvre Moineau, il va traîner son allergie peut être un certain temps!

Benoit
avatar 30/09/2004 @ 19:25:07
Le coup du couteau, c'est pas très clair... Et il reparle de la faucheuse alors qu'il a compris que c'étaient des branches de sapin...
Mais bon, on est reparti sur la route, on a retrouvé le rythme de croisière du récit. En avant!

Olivier Michael Kim
01/10/2004 @ 09:10:09
Le coup de l'allergie, fa me fait marrer !
C'est très bien Yali !

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