J'irai jusqu'à la mer. par Agnes Figueras-Lenattier, le 2 juin 2015

Laurent Hasse travaille comme réalisateur pour le cinéma et la télévision. Après un grave accident de voiture, il décide deux ans après de traverser la France en hiver 2007 du Sud vers le Nord. Il effectuera un périple de 1500 km avec juste un sac à dos, une boussole et une caméra. En 2012, sortira son film "Le bonheur terre promise" sélectionné dans de nombreux festivals internationaux et plusieurs fois récompensé. Puis début 2015, ce sera la parution de son livre intitulé "J'irai jusqu'à la mer.."

Deux ans avant d'entreprendre ce périple, vous avez été victime d'un grave accident de voiture. Vous n'étiez pas sûr de remarcher.. Avez-vous gardé des séquelles ?

J'ai pleinement retrouvé l'usage de mes jambes, et l'équilibre mais ce n'était pas gagné d'avance. En effet, lorsque je suis sorti de l'hôpital, les médecins m'ont laissé entendre que je serai obligé de marcher avec une canne tout au long de ma vie. D'une part j'ai eu beaucoup de chance, et d'autre part j'ai fait beaucoup de rééducation. J'ai également rencontré un ostéopathe qui m'a vivement conseillé de m'intéresser aux pratiques telles que le yoga, le Qi qong et le tai-chi. Et c'est lorsque je me suis mis au tai-chi, que j'ai senti qu'il se passait quelque chose. En tout cas au niveau de l'équilibre. Je suis d'ailleurs devenu un adepte de cette méthode. Malheureusement, j'ai perdu l'odorat, donc une bonne partie du goût.

Auparavant vous n'aviez jamais pensé à une telle aventure ?

Non pas de cette façon. C'est vrai ceci dit, que l'idée d'aller à la rencontre de personnes lambda croisées et rencontrées par hasard me trottait dans la tête depuis un bout de temps. Mais ce n'était pas très précis..

Vous avez fait ce voyage en hiver. Etait-ce par souci d'authenticité et de tranquillité ?

On pourrait parler d'une certaine forme de retraite, d'une recherche d'un moment à soi. Je voulais m'extraire de mon quotidien, de mes habitudes, des contraintes, de l'environnement familial, professionnel, de mes repères. J'avais envie et besoin de quitter Paris, ma vie de sédentaire, mon confort de petit bourgeois, et d'aller me frotter un peu à l'inconnu.

De nombreuses personnes vous ont offert un café, d'autres vous ont hébergé. Vous évoquez certaines de ces rencontres dans votre film ou dans votre livre. Comment s'est opérée la sélection ?

Je n'ai évidemment pas pu parler de tout le monde. J'ai essayé de ne conserver que les rencontres qui m'avaient vraiment plu, fait réfléchir ou avancer. Pour être caricatural, j'ai tenté de garder uniquement les philosophes. Que ce soit des jeunes de banlieue, ou des retraités dans le Cantal qui m'ont permis de me poser des questions sur le sens de l'existence et donc de ma propre existence.

Quel genre de contact avez-vous eu avec toutes ces personnes ?

Ces rencontres signifiaient un exercice de franchise. Quand ça n'allait pas, je le disais. De même, les gens qui m'accueillaient n'avaient pas tous le moral. Je pense que ça se sent et que ça se lit dans le livre. Je tendais une perche aux gens malheureux afin qu'ils se confient, et confessent ce qui clochait dans leur vie.

Pensez-vous les avoir un peu réconfortés ?

Oui j'en ai aidé certains. Je n'en avais pas du tout conscience, ce sont eux qui me l'ont dit. Après la sortie du film, ceux qui m'avaient accueilli m'ont avoué que lorsqu'ils ont regardé le film, ils ont compris que ce voyage avait pour but de me reconstruire. Ils m'ont avoué également que mon intrusion dans leur quotidien a eu aussi à sa manière cet effet là. Ils se sont demandés s'ils étaient heureux, et si tel n'était pas le cas comment ils pourraient faire pour le devenir. Ce qui leur manquait, et comment faire pour prolonger le bonheur. Il faut qu'un inconnu débarque chez eux pour qu'ils se posent ces questions. Sinon, on peut vivre au jour le jour sans s'interroger..

A chaque fois, vous demandiez aux personnes rencontrées leur conception du bonheur. Pourriez-vous évoquer quelques réflexions à ce sujet ?

C'est difficile d'en mettre une en avant parmi tant d'autres. Elles sont toutes constitutives l'une de l'autre. Mais je pense par exemple à ce boulanger qui au départ se disait incapable de définir le bonheur. Et qui a fini par avouer que s'il devait l'expliquer à ses enfants il leur dirait " Regardez ce beau paysage, regardez où l'on est et comme on est heureux; c'est cela notre bonheur." Pour lui le bonheur signifie le fait d'être en paix là où il est, et d'apprécier pleinement l'instant et le lieu dans lequel il vit. Pour d'autres, ce sont des notions plus philosophiques. Comme cette maman bibliothécaire qui parle du bonheur comme une abstraction conduisant à une exaltation émotionnelle. Les deux définitions m'aident à comprendre ce qu'est le bonheur. Un qui dit vivre le bonheur sans arriver à le définir, et l'autre qui met des mots très précis dessus.

Et vous vous situez au milieu ?

En tout cas, j'ai compris que je ne trouverais pas une définition qui serait gravée dans le marbre, valable pour tout le monde, et pour toutes les phases de l'existence. Je me suis rendu compte que c'était un concept mouvant aux contours très flous, qui évolue avec le contexte, l'âge, la sagesse, et les rencontres. Ce voyage l'a démontré. Je m'étais fixé un objectif celui d'aller plein Nord et d'atteindre la mer. Et aujourd'hui dans le quotidien, je suis redevenu sédentaire et parisien. Mon bonheur est aussi une direction de pensée.

Avez-vous fait des rencontres malencontreuses ?

Dans le livre, j'évoque une rencontre malheureuse avec un chien, animal ennemi du marcheur. Dans la Beauce, je me suis fait attaquer par un doberman qui gardait une ferme où j'avais l'intention d'aller dormir. Je pensais pouvoir pénétrer tranquillement dans l'enceinte de cette ferme, et ce n'était pas le cas. Le chien m'a ouvert la lèvre. Sinon en banlieue parisienne, en Seine Saint-Denis, j'ai eu maille à partir avec des dealers. Un randonneur à cet endroit n'est pas habituel, et j'ai eu un peu peur car ils se sont intéressés d'un peu trop près au contenu de mon sac. En outre, j'ai commis l'erreur de leur dire que j'arrivais de la frontière espagnole à pied. " Tu dois avoir des choses intéressantes dans ton sac, fais le voir" ont-ils rétorqué. Il a fallu se débattre un peu et partir assez rapidement..

Depuis ce périple pensez-vous être plus heureux qu'avant ?

Je suis assurément beaucoup plus serein; heureux je ne sais pas. Plein d'éléments dans mon quotidien sont encore des motifs d'agacements, de douleurs, de peines, de tristesse. Mais je vis tout ça différemment. J'ai trouvé dans cette expérience une sorte de sérénité, de paix, des éléments essentiels au bonheur.

Votre but était d'atteindre la mer. Lorsque vous y êtes parvenu qu'avez-vous ressenti ?

J'ai pleuré comme une madeleine, et j'étais submergé par des émotions inconnues à ce jour. C'était une immense joie, et en même temps du doute. La crainte de l'après, le fait de se dire " Je suis allé au bout de mon rêve qu'est-ce que je peux espérer par la suite, qu'est-ce qui va se passer maintenant, comment vais-je gérer ce trop plein d'émotions? J'ai ri, pleuré. Heureusement, il n'y avait personne aux alentours, car on aurait pu me prendre pour un fou..

Cette peur de l'après était-elle justifiée ?

C'est dur de revenir à la vie " normale". Il existe des paliers de décompression. Je ne fais pas d'apnée, mais je pense que c'est comparable aux plongeurs en apnée qui descendent très bas. Disons que c'est très dur de passer d'une vie où l'on n'a rien hormis un sac à dos, une boussole, une paire de chaussures et un sentiment de liberté absolue à un retour chez soi. On est très vite happé par les contraintes du quotidien, avec un travail, un frigo à remplir, des traites à payer. Tout ce qui pollue l'existence. Des petits riens mais qui sont indispensables, la difficulté étant de transposer dans la vie sédentaire les acquis de la vie nomade..

Il existe sûrement des moments où vous avez eu envie de renoncer !

Oui, mais heureusement j'ai résisté. Mais c'est vrai que lorsque des journées se passent sans l'émerveillement recherché, on se demande ce que l'on fait là en plein hiver dans la neige. Quand le pays est laid, dans une brume totale, que l'on ne voit rien et qu'aucune rencontre ne se produit, on a envie de jeter l'éponge. Mais heureusement j'ai continué car j'aurais été dans une immense frustration, avec un sentiment d'inaccompli. Je serais rentré piteux à Paris..

Avez-vous beaucoup souffert physiquement durant ce voyage ?

Comme tout marcheur quel que soit l'endroit où il se trouve. Que l'on soit au Népal ou dans la Beauce, il existe effectivement un moment où le corps dit stop. En outre, je n'étais pas du tout préparé ce qui est d'ailleurs un peu inconscient. Les trois 1ers jours ça va très bien, et après les chevilles doublent de volume avec ampoules, tendinites. Je me suis même foulé la cheville. Ce sont des petits bobos inhérents à ce type de voyage. J'ai eu aussi une grosse angine blanche à l'approche de Paris. Un médecin m'a prescrit des antibiotiques. " Je suppose que l'arrêt de travail n'a pas beaucoup de sens" m'a t-il dit. "Effectivement je suis sur la route sans travail et par choix donc effectivement ça n'a pas beaucoup de sens lui ais-je répondu. La seule posologie que j'ai respecté c'est la prise de médicaments. Et puis je suis resté deux jours alité avant de reprendre la route.

Vous avez été dans le Triangle des Bermudes. Vous dites que c'était la perspective de nouvelles émotions. C'est à dire ?

Déjà, je ne savais pas qu'il existait un triangle des Bermudes en France. On me disait quand tu rentres dans ce coin là c'est magique et improbable. Il régnait donc un petit côté 4ème dimension. Je trouvais cet aspect à la fois extrêmement séduisant et en même temps un peu effrayant. J'étais en quête de ces émotions neuves. J'étais à deux doigts de me dire que derrière un arbre pouvait surgir un lutin, un elfe ou un personnage mythologique. Mon imagination vagabondait. Tant mieux, ça veut dire que l'on peut s'émerveiller et rêver partout et de toute chose..

Qu'est-ce que ça vous a apporté de faire le film d'un côté et le livre de l'autre ?

Le livre est arrivé sur le tard. Ce n'était pas une volonté de ma part, c'est un accident dans ma vie. Plein de choses dans ma vie sont des accidents. Je me fais renverser par une voiture, deux ans après ça débouche sur un voyage, 2 ans après sur un film. Et encore deux ans après sur un livre. J'ai été contacté par un éditeur qui m'avait entendu parler du voyage à la radio. Il trouvait que c'était une belle histoire pouvant faire l'objet d'un livre intéressant. J'ai commencé par décliner la proposition dans la mesure où j'essaie d'être cinéaste. C'est mon métier, ma passion, et quand je fais des films je me considère comme un artisan passionné. Et je n'ai pas du tout la prétention d'être écrivain. Et puis j'ai tendance à croire que l'écrit est supérieur à l'audiovisuel. Je sacralisais l'écrit parce que je ne faisais référence qu'aux grands auteurs. Pour moi un livre c'était Le Clézio, et je pensais que c'était un domaine intouchable. Puis finalement, cet éditeur a réussi à me convaincre d'essayer. Je suis parti de carnets de voyage que j'ai tenu tout au long de cette traversée de la France. Tous les soirs, je consignais tout ce qui s'était passé, comment j'avais vécu la journée, mes rencontres, mes émotions..

Quel est maintenant le plus significatif pour vous ?

Ce n'est pas tant par rapport au contenu, mais je pense que j'aurais tendance à valoriser le livre. Mais j'attache plus d'importance au film, dans la mesure ou c'était ma volonté première de traverser la France. Et de reprendre la caméra après cet accident qui m'a mis hors course..

Vous semblez parler davantage de vos émotions dans le film !

Je ne me rends pas très bien compte, mais je dirais plutôt que pendant que je faisais ce voyage, la caméra était tout le temps tournée vers les autres et jamais vers moi. Alors que le soir venu quand je noircissais mon carnet avec mon stylo, j'écrivais la plume tournée vers moi. Donc, si la caméra est tournée vers l'autre, et la plume vers moi, je serais enclin à dire que le film est plus dirigé vers des personnes extérieures et que le livre est plus un je.

C'est peut-être parce que dans le film on vous voit !

Ceci dit dans le film, j'ai utilisé des extraits de mes carnets de voyage. Toute la voix off du film dite par moi consiste en des extraits de mon journal. Et la voix incarne davantage le personnage d'où peut-être le fait pour le spectateur de mieux sentir le marcheur, le réalisateur et l'écrivain.

Comme c'était la première fois que vous écriviez un livre, avez-vous souffert lors de l'écriture ?

Je n'ai pas ressenti l'angoisse de la page blanche dont parlent tous les auteurs. Comme j'avais le journal de bord, la difficulté consistait à faire une synthèse. Qu'est-ce qui des années après est toujours pertinent et intéressant; qu'est-ce qui peut être supprimé, ou au contraire mérite d'être développé ?

La synthèse vous avez du la faire aussi dans le film.

Oui, d'ailleurs le montage du film a été beaucoup plus douloureux que l'écriture. Ce voyage est tellement important pour moi et les rencontres tellement représentatives de ce que je suis devenu, que dans l'idéal j'avais le souhait que tout le monde soit dans le film. Or le montage implique de faire des choix, et c'est très pénible. Ce fut donc très violent, et il a fallu que je supprime plein de choses. Sinon le film aurait duré plusieurs heures, ce qui est impensable. Alors que dans un livre, il n'existe pas ce carcan qui enferme. Le livre aurait pu faire 500 pages, ça serait resté néanmoins un livre.

Dans le livre vous faites beaucoup de descriptions de paysages. Dans le film les images parlent d'elles-mêmes. C'était un exercice très différent !

C'est la même histoire, le même voyage, mais effectivement la manière de procéder est très différente. Comme vous le dites si un lever de soleil est magnifique que ce soit dans le Tarn, dans les forêts corréziennes, il suffit de mettre la caméra au bon moment, d'attendre la bonne lumière, et on a un plan magnifique que l'on peut utiliser dans le film. Quand on est devant sa page blanche, il faut arriver à trouver les mots justes pour définir la beauté d'un paysage. C'était un exercice que je ne connaissais pas..

Vous avez sûrement du voir de magnifiques animaux !

Oui plein. J'ai pu m'émerveiller devant des biches, des cerfs, des sangliers, des oiseaux. J'ai vu aussi malheureusement des animaux morts. Cela peut paraître puéril, mais je ne soupçonnais pas que je puisse être aussi enthousiaste de me retrouver en tête à tête avec des biches. Ce sont des moments magiques que l'on n'imagine pas lorsqu'on regarde des émissions parfois un peu stupides sur les animaux. Les plans sont parfois très bons, mais on n'est pas émerveillé car ce sont des images en 2D sur un écran. Or quoi de plus fantastique que d'être plongé en pleine nature, d'entendre des craquements de brindilles et d'apercevoir subitement l'animal. Vraiment magique.

Qu'avez-vous pris le plus de plaisir à filmer ?

Malheureusement l'animal est très difficile à filmer. Je n'étais pas un chasseur à l'affût, et lorsque je me retrouvais devant des chevreuils, je profitais de l'instant égoïstement. Si j'avais sorti la caméra ils auraient filé, et je n'ai donc pas filmé beaucoup d'animaux. En revanche, j'ai vraiment été séduit par des levers ou couchers de soleil. Lorsque le jour se levait à peine, j'avais le sentiment ou le pressentiment que la plaine devant moi serait très très belle, une fois le soleil sorti de l'horizon. Je me disais " Je suis à pied, je ne suis pas pressé, personne ne m'attend, je peux m'asseoir une heure ou une heure et demi s'il le faut afin que le soleil se lève et que la belle lumière rose du matin apparaisse. Et quand cela se produisait, c'était comme un cadeau. J'étais comme un pêcheur au bord de l'eau et ça mordait. L'apparition du soleil signifiait la concrétisation de ce que j'avais fantasmé une heure avant. C'était génial..

Côté livre, quelle est l'idée essentielle que vous avez voulu dégager?

Partager une expérience peut implicitement inviter au voyage. Si par procuration, le lecteur fait un beau voyage tant mieux. S'il se dit c'est à la portée de tout le monde de l'entreprendre et qu'il franchit le pas c'est encore mieux. J'ai envie de dire "Ecoutez vos envies, votre cœur, et entreprenez votre voyage quel qu'il soit..

Comment avez-vous procédé pour les titres? Etiez-vous totalement libre pour les choisir?

Pour le film oui puisque c'est un film fait en électron libre, pratiquement une auto production. Je n'avais de compte à rendre à personne, hormis à moi-même. Comme mon but lorsque j'ai entrepris ce voyage était de retrouver un sens à la vie et de chercher le bonheur, je me suis dit que le mot bonheur devait être présent dans le titre. Pendant un bon moment, j'ai cherché quinze titres différents. Comme le bonheur est indéfinissable, le mot tout seul ça ne fonctionnait pas, et accolé à un autre mot, ça ne marchait pas non plus. Finalement le film s'appelle " Le bonheur terre promise" avec entre bonheur et terre des petits points de suspension. Je voulais que l'on retrouve l'idée du territoire que j'avais arpenté des mois durant, et puis l'idée d'une promesse de trouver quelque chose. Assez vite " Terre promise" est apparue, et j'ai mis des petits points de suspension pour laisser justement de la suspension. Mais comme " Terre promise" a une connotation religieuse, j'ai longtemps hésité. Et puis, j'ai fini par me dire que la religion n'avait pas à s'accaparer cette expression, et que l'on pouvait l'utiliser hors contexte aussi.

Et pour le livre?

Comme je voulais plus l'axer sur une expérience personnelle, il fallait employer l'usage de la 1ère personne. C'était aussi une volonté de l'éditeur. On a cherché ensemble pendant longtemps, et on s'est dit que c'était autre chose qu'une quête de bonheur. Plutôt un voyage, un témoignage, une expérience de vie. Et j'ai pensé alors que la seule chose que je savais avant de partir, c'était que mon but était d'atteindre la mer. J'ai donc voulu un titre avec le je et le mot mer dedans..

Comment avez-vous conçu la musique dans le film?

C'est une musique composée par Nicolas Repac, compositeur et guitariste de talent. La difficulté venait du fait que je voulais travailler avec lui, mais sans guitare. Je souhaitais que l'on utilise uniquement des instruments à cordes frottées très doux comme le violoncelle, la contrebasse. La musique devait retranscrire mes états d'âme. Ce compositeur a du tenir compte de la variété des séquences certaines étant mélancoliques, d'autres plus euphoriques. Sa musique traduit ma petite voix intérieure, au même titre que lorsqu'il a rajouté de la guimbarde. Celle-ci représente la pulsation, le souffle, et vient scander le pas. Cette musique accompagne bien le film, les images, mais si on l'écoute sans ces différents éléments, elle n'évoque rien. Je trouve cela important. Il existe le film, le livre, mais il n'y aura pas le CD de la musique car ça ne donnerait rien de bon.

Vous avez été dans de nombreux pays pour faire la promotion de votre film. Avez-vous vu une différence question philosophie du bonheur. Ou est-ce que la conception du bonheur est la même partout?

C'est surtout une différence d'une classe sociale à l'autre. Malheureusement et c'est valable dans tous les continents et dans tous les pays, trop de gens associent le bonheur à la possession, à l'avoir et non à l'être. Quand ils cherchent un synonyme au bonheur, ils pensent à biens matériels, à grosse maison, grosse voiture. Mais heureusement j'ai rencontré des personnes à l'étranger pour qui le bonheur est à chercher ailleurs, c'est à dire en soi. Après que l'aide vienne de la philosophie, de la religion ou de croyances peu importe. Mais selon moi, ceux qui sont dans le vrai et j'espère en faire partie se disent que le bonheur est quelque part en soi, qu'il est dans l'être. C'est cette petite voix là qu'il faut écouter. Le matériel n'a pas d'importance. En tout cas, j'ai passé deux ans et demi de ma vie à faire le tour du monde pour parler de mon film. C'était un pur bonheur. On pourrait croire que le sujet est terriblement franco français. L'histoire d'un petit français qui traverse la France pour aller à la rencontre des habitants de ce pays. Et pourtant le film a été sélectionné dans une quarantaine de pays. Cela veut dire que la quête du bonheur est universelle, et que quelque soit le pays, le spectateur y trouve son compte. Le sujet réel ce n'est pas la France, mais ce que l'on fait de notre vie..

En France comment ont réagi les gens dont vous parlez dans le film et dans le livre?

Ce sont les meilleurs ambassadeurs ou attachés de presse du livre et du film. Cela me fait plaisir car ça signifie qu'ils se retrouvent dans les images que j'ai pu filmer ou dans mes écrits. Ils ne se sentent pas trahis, et revoient bien l'échange que l'on a eu. Dernièrement, une dame qui m'avait hébergé dans le Tarn m'a dit qu'une amie à elle lui avait offert mon livre par pur hasard pour son anniversaire. Elle l'a découvert avec beaucoup de curiosité et en a fait une petite fiche de lecture fort sympathique..

Le fait d'avoir goûté à l'écriture d'un livre vous a t-il donné envie d'en écrire un autre?

Oui, j'avoue que j'y ai pris goût. Je suis arrivé à la fin d'une première version d'un roman. Je pense que je ferai lire la deuxième, troisième ou quatrième version. Je vais d'abord commencer par décanter tout ça, et relire à froid. C'est une fiction, et comme je pense que l'on ne parle bien que de ce que l'on connaît quelque peu, le personnage principal possède pas mal de traits et de points communs avec moi.

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