Les Bedaines de Coton (Ou la Vie de Charley Patton) de Cyril Maguy, Bertrand Lanche (Dessin)

Les Bedaines de Coton (Ou la Vie de Charley Patton) de Cyril Maguy, Bertrand Lanche (Dessin)

Catégorie(s) : Arts, loisir, vie pratique => Musique

Critiqué par Débézed, le 17 juin 2019 (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 76 ans)
La note : 8 étoiles
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La vie de Charley Patton

Adolescent j’ai été nourri à la musique yéyé qui déferlait alors sur l’Europe occidentale, une musique qui m’a vite lassé, m’incitant à chercher du côté de sa source, vers les Buddy Holly, Elvis Presley, Little Richard, Bill Halley, Ray Charles et consorts. Mais là n’était pas réellement l’origine, il fallait grimper encore un peu plus haut sur l’échelle du temps, aller dans les champs de coton du vieux sud des Etats-Unis, le fameux Cotton Belt, pour rencontrer les fondateurs de ce grand courant musical qui est encore aujourd’hui à l’origine de presque toute la musique populaire. Et c’est ainsi que j’ai découvert tout un peuple de misère qui a transcendé sa douleur en la chantant en s’accompagnant d’instruments rudimentaires.

C’est à ce voyage que nous invite Cyril Maguy en chantant, en treize chapitres, la vie de Charley Patton, l’un des pères du Delta Blues, le blues du delta du Mississipi. Il a demandé à Bertrand Lanche de mettre des images sur les textes de ses chansons, des dessins dignes de ceux qui illustrent les meilleures bandes dessinées. Charley Patton est né en 1891 dans le sud du Mississipi où il a passé une partie de sa vie, à Dockery, avant de voyager pour fuir le racisme imposé par les « Bedaines de Coton », les propriétaires blancs qui exploitaient leurs plantations de coton en exploitant leurs esclaves noirs. Cyril Maguy chante avec Charley la violence, l’humiliation, la souffrance, la misère du peuple sacrifié sur l’hôtel du coton. Il chante aussi les divertissements pour oublier le malheur, « Les gens bougent, se trémoussent et se secouent le popotin. Toutes les jolies frimousses qui entonnent mes refrains. » Des soirées comme il en existent encore dans des villages entre Houma et la Nouvelle-Orléans, les fameux « fais dodo ». Patton ne fut pas seul, tout peuple se mit à jouer cette musique que certains disaient être la musique du diable surtout quand elle coulait des doigts de Robert Johnson à qui Cyril Maguy rend hommage dans cet album. Robert Johnson que j’ai découvert au hasard de mes excursions à la médiathèque et qui m’a enchanté.

Suivant Patton, Cyril Maguy prend la route en chantant le départ, l’exil loin vers le nord, la nostalgie, les routes interminables vers des villes inconnues qui resteront à jamais anonymes, simplement des salles de concert pour un soir. Et au bout du chemin la mort qui vient bien trop tôt, emporter l’artiste comme elle en a tant emporté avant l’heure. Et Cyril chante « Oh death » comme d’autres chantent « Oh Lord » dans les églises.

J’aime trop cette musique pour rester insensible, elle m’emporte sur la route entre La Nouvelle-Orléans et Natchez où j’ai voyagé juste le temps de découvrir les vestiges du temps où les « Bedaines de coton » exploitaient ceux qui devinrent les pères d’une musique qui inonda le monde. Et, j’ai vite fouillé dans mes vieux CD pour retrouver Lonnie Johnson, Leadbelly, Big Bill Bronzie, Billie Holiday et ses incroyables lamentations, Robert Johnson, Bessie Smith et tant d’autres… Merci à tous ceux qui ont contribué à la création de ce magnifique moment de musique en couleur. Je crois que je vais garder ce document pour moi et que je le ferai écouter à mes petits-enfants seulement quand ils seront très très sages.

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