Paris 2119 de Zep (Scénario), Dominique Bertail (Dessin)

Catégorie(s) : Bande dessinée => Sci-fi & fantastique

Critiqué par Pucksimberg, le 2 mars 2019 (Toulon, Inscrit le 14 août 2011, 44 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (25 423ème position).
Visites : 3 957 

Un divertissement bien ficelé !

La bande dessinée se déroule au XXIIème siècle. La ville de Paris n’est pas bien rassurante. Un nouveau moyen de transport a été créé : le Transcore. Il permet de se téléporter par le biais de cabines. Tristan Keys, le héros, a du mal à suivre certains progrès techniques et préfère se déplacer dans la capitale à l’ancienne, en métro, quitte à côtoyer tous les marginaux. Il sent rapidement que le nouveau moyen de locomotion utilisé par le plus grand nombre semble avoir quelques problèmes. Et quand il se trouve confronté à un mort, il pressent que ce Transcore n’est pas aussi sûr que ce que l’on pourrait croire.

J’ai tout de suite été séduit par cette histoire et par ce récit futuriste dont le cadre est bien planté et les personnages suffisamment présentés pour intriguer le lecteur. Comme tous les récits d’anticipation, à la fois la ville paraît très moderne et différente de celle qu’on connaît et pourtant rappelle de manière un peu cauchemardesque ce qu’est la capitale d’aujourd’hui. Cet univers n’est donc pas si éloigné du nôtre.

Le scénario est bien ficelé. On ne s’y ennuie pas une seule seconde. Il existe des centaines d’œuvres futuristes. On pourrait s’en lasser et retrouver tous les clichés du genre. Pourtant cette œuvre possède un certain charme et suscite vraiment l’intérêt du lecteur. Les dessins sont beaux, les visages très réalistes et les couleurs froides sont en total accord avec l’univers dépeint. Cette BD a même un caractère cinématographique. Une transposition sur la toile pourrait donner un résultat très réussi.

Cet album est vraiment agréable à lire et le lecteur passe vraiment un bon moment. Un divertissement bien ficelé !

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Les mirages de la technologie

7 étoiles

Critique de Fanou03 (*, Inscrit le 13 mars 2011, 49 ans) - 1 juin 2022

J’ai craqué pour l’élégance du graphisme de Dominique Bertail, dépeignant ce monde post-moderne à la fois inquiétant et onirique, avec ces drones en forme d’animaux aux formes géométriques, comme ces baleines qui se baladent sous la pluie dans les vieilles rues pavées de Paris. Tristan Keys, le héros, est tout à fait charmant, tel un James Dean, romantique et rebelle, déambulant avec une nonchalance inquiète dans cet univers menaçant. Pour moi le fond est aussi réussi que la forme: sur un scénario assez conventionnel mais néanmoins séduisant, Zep pointe les mirages des technologies à travers celle de la téléportation, qui nous désincarne littéralement, et pose des questions sur le sens du voyage (« le temps du voyage n’est-il pas nécessaire pour appréhender une nouvelle destination ? »).

Bienvenue dans la réalité diminuée

7 étoiles

Critique de Blue Boy (Saint-Denis, Inscrit le 28 janvier 2008, - ans) - 23 juin 2019

Depuis quelques années, le créateur de Titeuf semble avoir pris goût à l’écriture de scenarii plus adultes. Cela s’est traduit par la publication ces dernières années d’œuvres dites « sérieuses », en confiant parfois les pinceaux à un autre que lui, comme pour « Esmera » où Vince avait réalisé le dessin. De façon fort légitime, Zep aspire à obtenir la reconnaissance critique et publique qu’il avait déjà avec ses plus jeunes lecteurs, comme un nouveau challenge sans doute… Jusqu’à présent, on ne peut pas dire que ces tentatives aient soulevé l’enthousiasme, même si l’accueil pour des ouvrages comme « Une histoire d’hommes » ou « Un bruit étrange et beau » est resté plutôt positif, avec des réactions allant du mitigé au sympathique. Poli, donc, ce qui parfois peut s’avérer pire qu’une descente en flammes.

Et il n’est pas certain que ce « Paris 2119 » change la donne. De nouveau, Zep nous livre matière à réflexion avec une thématique digne d’intérêt. Mais c’est la première fois qu’il aborde le registre de la science fiction, ou pour être plus précis, de l’anticipation. Comme le titre l’indique, ce récit nous transporte dans un Paris du futur, qui n’a guère changé dans son aspect mais semble particulièrement dépeuplé, et pour cause… Cloîtrés chez eux, les habitants ne déplacent plus que de façon virtuelle grâce au Transcore, ne se donnant même plus la peine de prendre le métro ! Ceux qui refusent de se soumettre aux diktats de cette société high-tech et déshumanisée passent pour de dangereux rebelles menaçant l’ordre établi. Tristan Keys en fait partie, par le simple fait qu’il apprécie les promenades « physiques » dans la capitale française et l’odeur de son métro, obligé pour cela de franchir les multiples bornes de reconnaissance faciale et de supporter l’omniprésence des drones de surveillance. Notre héros découvrira par hasard que derrière le prodige des voyages virtuels, ce qui se trame n’est rien de moins que la disparition de l’humanité…

Comme la plupart des récits d’anticipation, Zep a fait le choix de la dystopie, et l’effrayante réalité décrite ne paraît pas si invraisemblable. En cela, il nous met en garde sur les risques du tout technologique, nous invitant à prendre le temps de la réflexion, hors de nos écrans et de nos GPS si commodes. Ce thriller reste en soi assez captivant malgré certains raccourcis narratifs faciles et quelques ficelles un peu trop voyantes, comme l’emprunt à l’univers de « Bladerunner », d’un point de vue tant graphique que scénaristique. D’ailleurs, le dessin reflète bien d’une certaine manière la teneur de l’entreprise. Bertail fait le job, entre académisme de bon aloi et influences de Bilal ou Moebius, mais sans réellement affirmer un style propre. En résumé, l’auteur suisse pose les bonnes questions mais y répond de façon trop superficielle, en mettant en scène des personnages un peu caricaturaux, échouant à faire de « Paris 2119 » une œuvre vraiment marquante. Et ce n’est pas la pirouette scénaristique à la fin qui contredira cette impression. Bien sûr, on pourra toujours rester indulgent en mettant cela sur le compte d’un format trop court (80 pages), encore que…

Si louables soient les intentions de Zep, il ne parvient donc pas à nous surprendre outre-mesure avec cet opus qui comportait pourtant un certain potentiel. Et le lecteur de rester sur sa faim, un rien déçu par le manque de souffle et d’âme du projet.

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