Moi, ce que j'aime, c'est les monstres de Emil Ferris

Moi, ce que j'aime, c'est les monstres de Emil Ferris

Catégorie(s) : Bande dessinée => Sci-fi & fantastique

Critiqué par Nathavh, le 16 décembre 2018 (Inscrite le 22 novembre 2016, 59 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (14 304ème position).
Visites : 3 475 

juste exceptionnel

Attention énooorme coup de coeur c'est splendide, magistral , un nom à retenir Emil Ferris.

Ce n'est pas pour rien que ce roman graphique est le coup de ♥ de nombreux libraires. Emil Ferris est sans contexte à découvrir de toute urgence et ce pour de multiples raisons.

En 2002 l'année de ses 40 ans, lors d'une réception en son honneur, elle a été piquée par un moustique qui lui a transmis le virus de l'encéphalopathie provoquant rapidement une paralysie de ses membres. Emil pensait ne plus jamais marcher, ne plus jamais dessiner.

A force de courage et de détermination, elle a peu à peu retrouvé l'usage de son corps et de ses mains. Au départ sa fille lui scotchait un stylo à bille dans la main...

Elle a décidé de prendre des cours de dessin et a commencé à dessiner dans des cahiers pour créer un grand roman graphique de plus de 800 pages, celui-ci en est la première partie.

Il fut compliqué de le faire éditer, faillite de l'éditeur, mais finalement il fut publié en 2017. Monsieur Toussaint Louverture a fait le bon choix de se charger de l'éditer en français, sur un papier de qualité rendant au mieux ses fabuleux dessins.

Emil Ferris est sans conteste devenu un grand nom dans le genre "Comics". Son travail est remarquable et l'originalité réside dans le fait que tout est entièrement réalisé au stylo à bille.

Osez cette expérience fabuleuse, croyez-moi vous n'en serez pas déçu.

L'histoire me direz-vous ? J'y arrive.

C'est une double histoire qui nous est contée. Nous sommes à Chicago dans le quartier Uptown fin des années 60.

Karen est une petite fille qui aimerait être mordue par un monstre pour qu'elle et sa famille le deviennent. Les monstres la fascinent. Elle lit le mensuel Ghaty chaque mois et dessine ces monstres dans un cahier. Elle vit avec son grand frère Deeze et sa maman. Elle nous raconte ses secrets et ceux de sa famille, de ceux qui l'entourent.

C'est aussi l'histoire d'Anka Silverberg, sa voisine. Anka a été retrouvée morte, une balle en plein coeur, porte fermée. Elle a été tuée dans le salon mais c'est dans son lit qu'on l'a retrouvée... Un mystère.

Karen va enquêter sur sa mort et sur le passé douloureux d'Anka, rescapée juive des camps.

Ce roman graphique aborde la pauvreté, le commerce du sexe, la mafia, la discrimination, l'école, le racisme mais aussi la réalité des juifs durant la guerre, l'assassinat de Martin Luther King... mais aussi les monstres qui se trouvent peut-être en nous !

Textes (assez denses) et dessins se partagent l'espace. L'art est omniprésent, l'auteure revisite les tableaux des musées avec Brio.

C'est une expérience UNIQUE , déstabilisante parfois, fantastique. Un univers incomparable, onirique, original.

Les dessins sont SUBLIMES, EXTRAORDINAIRES, bluffants, chargés d'émotions.

Un travail remarquable.

Une expérience à vivre de toute urgence.

Un lire à offrir ou à s'offrir, vous ne serez pas déçus.

Immense coup de coeur ♥♥♥♥♥


Les jolies phrases

Si on pouvait voir avec un oeil de verre, le monde aurait-il l'air plus fragile ?

Il disait que quand les gens ont peur, ils sacrifient leur liberté à leur sécurité. Hitler l'avait compris !

Parfois des choses si terribles surviennent que les gens veulent que le monde soit à l'image de ce qu'ils ressentent au plus profond d'eux.

Les méchants, eux, le contrôle, ça les connaît ... Ils veulent que le monde entier soit effrayé pour pouvoir mener la danse.

Ne laisse jamais la noirceur des autres faire tomber la nuit en toi.

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Le loup-garou c’est nous

8 étoiles

Critique de Blue Boy (Saint-Denis, Inscrit le 28 janvier 2008, - ans) - 6 décembre 2019

Emil Ferris, acclamée à Angoulême, signe ici une autobiographie coup de poing, extrêmement personnelle et totalement atypique, devant laquelle les mots semblent impuissants à en disséquer le contenu. Dans ce journal intime, l’autrice fait s’exprimer une fillette de dix ans, Karen Reyes — en quelque sorte son double fictionnel —, fascinée par les monstres et les loups-garous. Elle y décrit son quotidien dans le Chicago populaire des années 60, entre une mère étouffante, un peu perchée dans une mystique de pacotille, et un grand frère dur et doux à la fois, bad boy tatoué, artiste dans l’âme et bourreau des cœurs.

Quelle tâche difficile que d’évaluer ce pavé hors norme, qui ose à ce point défoncer tous les codes du neuvième art ! Impossible de rester indifférent à une œuvre aussi démentielle, tant sur la forme que sur le fond. Il va sans dire que plus d’un lecteur sera désarçonné devant ce monument éditorial ardu (dont nous n’avons ici que le livre premier…). Il faudra une certaine persévérance — et du cran peut-être — pour aller jusqu’au bout de ce voyage labyrinthique dans les tréfonds d’une âme humaine aussi torturée que celle d’Emil Ferris. Comme son autrice, cet ouvrage n’est pas dans la norme, il possède quelque chose de monstrueux et de bancal, avec ce dessin au stylo bille plaqué sur les pages d’un vulgaire cahier à spirales, mais une monstruosité envoûtante oscillant entre la laideur simpliste du crobard et la pure beauté, que l’on admire telle une dentelle découpée au scalpel.

Des cases sporadiques nous rappellent qu’il s’agit bien d’une bande dessinée, mais Emil Ferris s’autorise ici toutes les libertés de mise en page. On n’est pas toujours certain du sens de lecture, mais malgré ce foutoir apparent, on réalise que la narration est bien présente et respecte une certaine cohérence. L’aspect insolite de l’objet finit par exercer une certaine fascination, pour peu que l’on se donne la peine de poursuivre au-delà des trente premières pages. Et comme son titre le suggère, de monstres il est beaucoup question. A commencer par la principale protagoniste, la jeune Karen, un peu complexée par son physique « pas facile » et qui s’identifie aux monstres des comics de son grand frère Deeze. Après la mort étrange de la belle voisine, Anka, rescapée de la Shoah, dont on peut penser qu’il s’agit d’un meurtre maquillé en suicide, la fillette va revêtir une panoplie de détective trop grande pour elle afin de mener l’enquête à sa manière.

Impossible de parler de cette œuvre fleuve en une seule chronique, mais l’ouvrage fait la part belle aux « outcasts », ces êtres à l’écart des codes policés imposés à nos cerveaux par la société de consommation, ces monstres avec leur part d’ombre mais leur lumière aussi. Il y est aussi question de résistance, que ce soit à travers le personnage d’Anka (lorsqu’elle évoque sa vie dans l’Allemagne nazie), de Frankin (sorte de sosie « black » de la créature de Frankenstein) face au racisme ou encore de Karen, harcelée par ses camarades de classe en raison de sa différence. Et cette résistance, c’est très souvent celle qui doit s’exercer contre la meute imbécile. Ce livre est donc aussi un pavé au sens physique, un pavé que l’on rêve d’envoyer à la figure des salopards qui jouissent à exercer leur pouvoir de domination sur les plus faibles, les femmes et les minorités en général.

Emaillé de couvertures de comics horrifiques représentant des scènes d’agressions contre des femmes par des monstres de toutes sortes — saisissantes métaphores de la domination masculine, ces publications étant destinées le plus souvent aux jeunes mâles américains — le livre révèle le talent graphique de cette autrice inclassable qui la situe entre le style expressionniste et la mouvance alternative – avec ces hachures qui peuvent rappeler un Crumb ou un Joe Sacco. C’est fou tout ce qu’on peut faire avec un Bic quatre couleurs !

On attendra donc le livre second pour se faire une idée définitive de cette œuvre émotionnelle, sombre et déstructurée, née en grande partie de la maladie d’Emil Ferris, piquée par un moustique qui l’a laissé handicapée durant plus de dix ans. Cette première BD aura permis à cette femme courageuse, qui fut d’abord illustratrice, de retrouver sa motricité. Publiée dans l’année de son 55e anniversaire, elle fut rapidement repérée dans le milieu du neuvième art, encensée par des pointures comme Art Spiegelman (forcément) ou Chris Ware, et si bien accueillie en France qu’elle décrocha le Fauve d’or lors de la dernière édition du FIBD d’Angoulême. Une œuvre si riche, si dense, qu’elle mériterait aisément une deuxième lecture, si ce n’est plusieurs.

Waouh .. belle découverte

9 étoiles

Critique de Faby de Caparica (, Inscrite le 30 décembre 2017, 62 ans) - 6 janvier 2019

Bonjour les lecteurs ....

Voici un roman graphique de plus de 400p sur un papier imitant un cahier d'écolier à spirales.

Tout ce qu'on peut dire c'est qu'Emil Ferris est une très grande artiste au coup de crayon ( bic ) magistral.
L'auteure a un destin extraordinaire: piquée par un moustique, on lui diagnostique une méningo-encéphalite aux conséquences assez lourdes.
Peu de chance de pouvoir remarcher et impossible de tenir un stylo ( son outil de travail).
A force de volonté, elle va réapprendre à dessiner.
Elle mettra 6 ans à réaliser ce roman de plus de 800 pages.
Ceci est le premier tome d'une histoire délirante. et certainement en partie autobiographique.

Karen, 10 ans, adore les monstres et s'imagine être un loup-garou.
Un jour, sa voisine Anka est retrouvée morte, une balle dans le coeur.. suicide ? Karen mène l'enquête et va de découvertes en découvertes. Non seulement sur le passé d'Anka, mais également au sujet de son entourage proche et de la vie de son quartier.
C'est l'histoire du Chicago des années 1960, du côté des laissés pour compte, des oubliés, des invisibles.
Son journal intime où elle raconte son histoire est un véritable joyau artistique.

L'histoire m'a assez déroutée au départ, la trame qui peut paraître simple au premier abord, se révèle complexe et il faut prendre le temps de digérer chaque page.
Mais la lecture devient très vite addictive et je ne peux que reconnaître la beauté du dessin ... réalisé uniquement avec des pointes "Bic" .. il est époustouflant, riche en détails et est presque vivant .
Vivement la suite ....

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