La fabuleuse histoire des France Brésil de Zoran Lucić
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Platinho
La Selecao nous a refait le coup de la Grèce en 2004 : une victoire sans jouer mais avec un parcours encore plus balbutiant. Et une veine incroyable ! Il va falloir son deuil de ce non duel, puisqu’une seule équipe jouait et remettre sur le métier l’éternel débat : qu’est-ce qu’une bonne équipe ? Celle qui pratique un beau football ou celle qui gagne ? La victoire du Portugal apporte un élément de réponse qui ne plaira pas aux amateurs du grand, du très grand sélectionneur brésilien Têlé Santana.
Parce que cette Selecao-là, même si elle remporte enfin un titre majeur, là où les générations bien plus talentueuses d’Eusebio ou de Luis Figo ont échouées, ne fait pas oublier la grande Selecao, l’autre, celle qui fait rêver encore et toujours, malgré une branlée hors norme, chez elle, violentée 7-1 par d’ultra efficaces et peu sentimentaux Allemands. La sélection portugaise, qui a joué petit bras, portée par un athlète hors norme, aussi bien dans son palmarès, que dans sa propension à s’auto-érotiser, aussi bien dans ses ballons d’or que dans son melon de platine, ne fera jamais oublier ni ne dépassera jamais sa sœur brésilienne, dût-elle remporter 3 fois de suite l’Euro… Surtout avec un jeu pareil !
Du Portugal, il n’est point question dans ce très intéressant bouquin paru chez Solar en 2014 pour la Coupe du Monde, et que j’ai dégotté pour 8€ sur une aire d’autoroute (prix d’origine : 29,90€). Ici, on parle du Brésil. Et de son pendant européen, la France. Si, si ! On ne l’imagine pas forcément aujourd’hui mais à l’époque de Platini, on qualifiait les Bleus de « Brésiliens d’Europe ».
Les matches entre ceux deux nations ont toujours été particuliers, pas forcément pour le score (2 dérouillées seulement : 5-2 pour le Brésil à la Coupe du Monde de 58 et 3-0 en 98 pour qui vous savez), mais parce qu’il y a dans ces 2 équipes une certaine vision romantique de ce quoi doit être le football. La Brésil a porté au plus haut niveau l’art du football : tout le monde joue mais, en plus, le métissage propre au pays se retrouve dans son équipe nationale. En France, le métissage existait bien avant la génération black-blanc-beur mais chez nous, il a fallu bosser davantage pour arriver à reproduire les aquarelles footballistiques des auriverdes. Les plus brésiliens de nos joueurs sont Platini, fils d’immigrés italiens, et Zidane, d’origine kabyle. On peut sûrement ajouter Kopa, dont les grands-parents viennent de Pologne, et Just Fontaine, né au Maroc, alors protectorat français. On disait donc métissage… J’en oublie, c’est certain et chacun ajoutera les noms qui manquent.
Dans les annales, et dans ma mémoire personnelle, la demi-finale de la Coupe du Monde de 1986, au Mexique, qui oppose donc la France au Brésil, reste un des plus grands matches de tous les temps. Un match, comme le dire Pelé, où « le ballon ne sort quasiment jamais des limites du terrain ». Inenvisageable de nos jours où le tacle glissé est pratiqué par tous les joueurs avec plus ou moins de bonheur : il faut donner le temps au bloc-équipe de se replacer. En 86, un concept de ce genre n’existait pas. Les joueurs, les grands joueurs, inventaient à chaque pas, jouaient les uns pour les autres et pas seulement les uns avec les autres. Différence subtile mais qui fait la différence.
Physiquement, on parle d’un temps où des échalas du genre Socrates étaient des techniciens très pointus et pas des tours de contrôle de la défense ou un point d’appui en attaque. En plus, le gars avait une conscience politique dans un pays, à l’époque, pas franchement peace and love, et était docteur en médecine. On imagine un discours autrement plus avancé que « l’important c’est les 3 points ». Impossible, aujourd’hui, d’imaginer sur un terrain un drôle d’oiseau comme Garrincha et sa jambe droite de 6 cm de plus que l’autre. Reverra-t-on un jour le descendant du mythique « carré magique » des Bleus : Platini, Giresse, Tigana, Genghini, pour la version un, avec Fernandez à la place de Genghini pour la version 2 ? La quatuor Giroud, Payet, Griezman, Pogba en a le potentiel.
Quand des joueurs de ce calibre se croisent, en match officiel ou amical, il y a immédiatement une sorte d’entente mutuelle. Ça va jouer. Ça va être de l’art. Du plaisir. Entre deux dépositaires d’une même vision. Une touche de balle, tout pour l’offensive ! Ça passe ou ça casse. La France s’est brisée les dents sur l’Allemagne en 82 en menant 3-1, le Brésil a chuté contre l’Italie la même année en menant 2-0. Dans les deux cas, une incapacité quasi congénitale à se contenter de défendre. La France menait au score et aurait dû gérer le reste du match mais non, Platini et les siens ont continué. Idem pour le Brésil. Venus pour jouer, pas pour faire mumuse avec la baballe.
De ce genre d’équipes à burnes, il ne reste pas grand-chose. Même la France de 98 ne jouait pas ce style de jeu : d’abord une défense hermétique. Celle de 2000 était déjà plus portée sur l’attaque mais elle était tellement au-dessus du lot à l’époque qu’elle pouvait tout faire. J’ai attendu longtemps de revoir mon équipe avec un tel niveau de jeu. J’attends toujours mais il se passe quelque chose à la génération actuelle. Reste que la question est toujours posée, éternelle et frustrante : c’est quoi, une bonne équipe de foot ? Quelque part, un brésilien doit avoir une petite idée.
Les éditions
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La fabuleuse histoire des France Brésil [Texte imprimé] Pierre-Louis Basse, Vincent Duluc, Nathalie Iannetta... [et al.] [illustrations originales de Zoran Lucić]
de Lucić, Zoran (Illustrateur)
Solar
ISBN : 9782263065255 ; 29,90 € ; 15/05/2014 ; 145 p. ; Relié
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