Les dents de la mère... ?

La « chair interdite », c'est le sexe de la femme décrit à travers les coutumes, les lois, les opinions... et dans ses représentations à travers les âges et les civilisations.
On y trouve parfois de bien jolies choses, comme ses vers de Voltaire : « Je cherche un petit bois touffu, / Que vous portez, Aminthe, / Qui couvre, s'il n'est pas tondu, / Un gentil labyrinthe. / Tous les mois on voit quelques fleurs / Colorer le rivage ; / Laissez-moi verser quelques pleurs / Dans ce joli bocage. »
Mais, le plus souvent, l'intense bêtise des messieurs...
La vulve est très longtemps perçue comme laide, sale, puante et, pire que ça, elle fait carrément peur car elle peut être le siège d'un plaisir féminin, ce qui plonge le christianisme dans des abîmes de terreur. Puis, viennent ceux qui vont prétendre que la vulve rend les femmes folles, hystériques donc. Qu'à cela ne tienne, il suffit alors de leur retirer les ovaires pour tout arranger. On va donc pratiquer l'ovarectomie jusque 1907 aux USA (pour des problèmes « émotionnels », de l'hystérie et même pour des règles douloureuses): 100 000 femmes dont 30% qui en meurent. Le docteur Kellogg (Mr Corn-flakes...), quant à lui, préconise un seul rapport sexuel par mois (il est membre de l'Eglise adventiste du 7e jour).
Les chapitres sur les poils pubiens méritent eux aussi le détour. La tonte est d'abord et très souvent une punition : Babylone 1500 ans av J-C mais aussi l'Espagne de Franco entre autres. De nos jours, depuis 2000 environs, c'est l'inverse : il faut être glabre. Non seulement cela, mais on vous vend des crèmes pour changer la coloration des muqueuses, des produits pour intervenir sur l'odeur et même des opérations chirurgicales pour modifier la longueur des petites lèvres. Le délire consumériste, quoi.
Quant aux techniques de protection en période de règles, personne ne s'y est intéressé avant longtemps ; d'ailleurs, dans les filatures de coton « on recouvre les planchers de paille pour que le flux menstruel des travailleuses, debout de longues heures, puisse être facilement ramassé (...) ». Les femmes ne sont pas seulement à leur table de travail, mais à l'étable...
Ce livre vous promènera ainsi du clitoris honni (« la dent qui permet de mordre dans la pomme du plaisir », il faut donc l'enlever...) à l'accouchement sans douleur, introduit au début des années 1950 et fustigé illico comme « moyen de propagande communiste »...
Il vous dira aussi la vulve utilisée comme une arme : été 1958, au Cameroun, des milliers de femmes protestent contre la réforme agraire en se déshabillant entièrement en rue. C'est l'anlu. Elles exposent leurs parties intimes et deviennent de plus en plus nombreuses, finissant par imposer leurs vues. Des « femen » avant la lettre et en plus efficaces ?

Bon, y-a-t-il un serpent à l'intérieur ou seulement des dents ? Vous le saurez en lisant ce passionnant bouquin qui parle aussi, bien sûr, des moyens anticonceptionnels, de l'avortement, crime « de haute trahison » dans la France de 1942 (ben oui, il faut fabriquer de futurs soldats...), des religions (dans la Bible : « Tu enfanteras avec douleur et tes désirs te porteront vers ton mari, mais il dominera sur toi » !!) et de plein d'autres choses.
Féministes de tous les pays et de tous les sexes, unissez-vous !

L'auteur nous gratifie en plus de titres de chapitres tout en humour : « La pucelle à l'oreille », « Des poilus aux poilues » (les premières représentations de poils pubiens après 14-18), « Les suffragettes s'en tamponnent », « Guerres pubiennes en Occident », « Saigneurs de guerre », « Chair et paix », etc.

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  La chair interdite [Texte imprimé] Diane Ducret

  de Ducret, Diane
  Albin Michel
  ISBN : 9782226257048 ; 19,90 € ; 01/10/2014 ; 350 p. ; Broché

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