Le siècle des camps: emprisonnement, détention, extermination, cent ans de mal absolu de Pierre Rigoulot, Joël Kotek (Co-auteur)

Le siècle des camps: emprisonnement, détention, extermination, cent ans de mal absolu de Pierre Rigoulot, Joël Kotek (Co-auteur)

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Histoire

Critiqué par Jules, le 2 février 2001 (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 10 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (3 745ème position).
Visites : 5 181  (depuis Novembre 2007)

Très complet, des plus instructif. A lire !

Il ressort clairement de ce livre que les camps sont un vrai produit du XXe siècle.
Il est aussi à noter que ce même siècle est celui des idéologies et de leurs excès. De là à faire un parallèle.
D'un côté le communisme et de l'autre le fascisme ou le nazisme. Dans ces deux systèmes, communisme et nazisme, il y a une nouveauté très moderne : toute personne peut devenir un danger pour la société aux yeux du pouvoir. Il suffit de penser ou d'avoir une capacité de résistance ou d'opposition au pouvoir en place. Dès lors, les camps deviendront la seule possibilité d’isoler les individus considérés comme dangereux, vu leur nombre. En effet, le système des prisons n’y suffirait pas, il faut de grandes surfaces et ouvertes. Ce type de camp est appelé " camp de concentration ". Ce sont des camps dans lesquels la vie est plus ou moins rude selon le cas. Que l’on prenne les goulags ou les camps de concentrations nazis, la logique est la même : le but est d’avilir, de maltraiter, de faire travailler, de mal nourrir, d’affaiblir. Si la conséquence en est la mort, tant pis, mais ce n'est pas le but premier du camp.
Il y a aussi le camp dit " d'internement ", destiné, par exemple, à enfermer des résidents d'un pays avec lequel on est en guerre. Comme les Américains l’ont fait pour les Japonais résidents sur leur territoire au moment du conflit avec le Japon. Ces camps étaient passables, alors que ceux instaurés au Japon ont vu décéder un très grand nombre de leurs occupants.
Le troisième et dernier type de camp est celui " d’extermination ". Il n’y en a eu que quatre : Belzec, Chelmno, Sobibor, Treblinka. Il y en a eu deux dits " mixtes " : Auschwitz-Birkenau et Majdanek. Ici, le but est d’éliminer par la mort et le plus vite possible. Rien, dans ces camps, n'est prévu pour garder les gens en vie, ni en logement, ni en nourriture. Seuls les Allemands ont créé de tels camps. Ils n’avaient jamais existé et ne sont plus apparus par la suite.
Le camp est un pur produit du pouvoir totalitaire. Partout, son but est le même : terroriser les populations pour asseoir le pouvoir, vaincre toute volonté de résistance. Si en Union soviétique le but était d’isoler et d’empêcher de déranger ceux qui détenaient le pouvoir, les nazis, eux, avaient aussi une volonté plus vaste : changer la société et les hommes, les rendre conformes au moule désiré. C’est Goering qui créa les premiers camps, sur base de ce qu'il avait vu en Afrique du Sud quand il était jeune. Par la suite, c'est Himmler et ses SS qui s'empareront de cette gestion.
Il me semble important de signaler que la notion de camp ne s'adapte pas du tout avec celle de démocratie et que ceux-ci ne seraient, spontanément, pas tolérés par les citoyens.
Outre tous ses aspects historiques et de documentation, je conseille vivement la lecture de ce livre. En effet, il montre aussi comment fonctionne l'engrenage de la terreur vis-à-vis du peuple, mais aussi l'engrenage de plus en plus fou du pouvoir. Ce livre peut aider à comprendre à quel point le citoyen doit être vigilant, à quel point il convient de réagir vite ! Chaque abandon de droits ou de pouvoir, par les citoyens peut les mener à la glissade fatale.

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Les éditions

  • Le siècle des camps [Texte imprimé], détention, concentration, extermination, cent ans de mal radical Joël Kotek et Pierre Rigoulot
    de Kotek, Joël Rigoulot, Pierre
    J.-C. Lattès
    ISBN : 9782709618847 ; 27,10 € ; 27/09/2000 ; 805 p. ; Broché
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Tant et tant de camps au XXème siècle !

10 étoiles

Critique de Anonyme11 (, Inscrit(e) le 18 août 2020, - ans) - 20 août 2020

Le 20ème siècle a vraiment été « Le siècle des camps » : complexes concentrationnaires, camps de concentration, de détention, d’internement, de transit, de rééducation, de travaux forcés jusqu’aux … centres d’extermination Nazis. Le camp a existé sous divers contextes politiques : les deux Guerres Mondiales, des Guerres Civiles, les Colonisations, des Dictatures, des régimes Totalitaires…

A travers cet ouvrage INCONTOURNABLE sur les camps, on constate tragiquement, que :
Qui dit conflits armés, dit camps. En effet, lors d’un conflit armé, sont enfermés et/ou exterminés, des ennemis extérieurs (militaires et/ou civils), voire même, UNIQUEMENT, des « ennemis » CIVILS de l’intérieur (Totalitarisme Communiste).

Les premiers camps PROVISOIRES de prisonniers datent au moins du 19ème siècle, comme par exemple, ceux de la guerre civile Américaine, dite de Sécession entre 1861 et 1865. Puis ce fut Cuba en 1895, lors de la guerre coloniale des Espagnols qui déportèrent et « reconcentrèrent » une partie du peuple Cubain dans des camps.

Le 20ème siècle, lui, connaît un développement exponentiel des CAMPS, en voici une liste non-exhaustive, permettant de rendre hommage à la MEMOIRE de toutes ces victimes :
– En 1900, les camps Britanniques en Afrique du Sud contre les Boers ;
– En 1904, les camps de travaux forcés et le génocide, par les Allemands, des Héréro (peuplade d’Afrique du Sud) ;
– Chaque pays belligérant lors de la Première Guerre Mondiale était « équipé » de ses propres camps de prisonniers ;
– En 1915, les camps lors du génocide Arménien par les Turcs ;
– En 1936, les camps Portugais sous Salazar à Tarrafal ;
– En 1936, les camps sous Franco en Espagne ;
– A partir de 1940, les camps sous le régime Fasciste de Mussolini ;
– Entre 1938 et 1944, les camps Français sous la Troisième République, puis les camps sous le gouvernement de Vichy. D’abord, donc en 1938 ce sont les camps pour réfugiés étrangers. Puis à partir de 1942, il s’agit désormais des camps pour les Juifs, les sordides camps de Pithiviers, de Beaune-la-Rolande et dramatiquement le camp de Drancy : « dernière étape avant les camps de la mort » Nazis.
– Comme pour la Première Guerre Mondiale, durant la Seconde Guerre Mondiale, chaque pays belligérant possédait ses camps : la France, Les Etats-Unis, le Japon, le Canada, l’Australie, etc..
– En 1955 : les camps de regroupement et d’internement en Algérie par l’armée Française ;
– En 1973, au Chili, Pinochet et ses centres de détention, d’interrogatoires et de tortures ;
– En 1992, les camps de concentration de l’ex-Yougoslavie ;
– Et malheureusement, on peut continuer longtemps cette sinistre litanie sur les camps de concentration…

Mais c’est avec l' »Archipel du Goulag » Communiste et avec l' »Univers concentrationnaire » Nazi au 20ème siècle, sous ces deux grands régimes Totalitaires que les camps de concentration prennent des DIMENSIONS PHENOMENALES et deviennent : PERMANENTS. Ces camps sont d’une NECESSITE VITALE dans le cadre de la mise en place et du fonctionnement d’un régime TOTALITAIRE, comme le résume très bien Hannah Arendt en une phrase, citée par les auteurs du livre, page 727 :

« Aucun gouvernement totalitaire ne peut exister sans terreur et aucune forme de terreur ne peut être efficace sans camp de concentration ».

Désormais, avec cette simple phrase tout est dit. Dans le « monde » Totalitaire, les camps de concentration n’ont plus uniquement comme fonction de « parquer » les ennemis, mais ils font partis INTEGRANTES du système Totalitaire. Les camps de concentration Totalitaires deviennent GIGANTESQUES : Il sont des MILLIONS de prisonniers et des MILLIONS à y mourir. De plus, dans le principe du régime Totalitaire, les camps ont une vocation de répression totale, car créés pour y enfermer des ennemis afin de les TRANSFORMER, de les REEDUQUER, pour les rendre conformes à l’IDEOLOGIE obligatoire.
Dans ce système, il faut transformer la nature humaine pour former ainsi : le « peuple nouveau ». Ou bien, les EXTERMINER purement et simplement comme cela est le cas, aussi bien chez les Communistes que chez les Nazis.
En effet, des MILLIONS d’innocents sont morts dans les camps de concentration de : faim, de froid, de maladie, d’épuisement, exécutés, etc..

En résumé, dans le régime Totalitaire, le camp de concentration devient le moyen de TERREUR par excellence, une gigantesque entreprise de déshumanisation : la vie humaine NE VAUT PLUS RIEN.

Dans l’immonde régime Nazi, on trouve deux grands types de camps :
D’abord une foultitude de camps de concentration dans lesquels les « ennemis » innocents sont déshumanisés. Notamment, le camp de Dachau ouvert en mars 1933 par Himmler et Goering, à peine deux mois après l’accession de Hitler à la chancellerie.
Ensuite, à partir de 1941, sont créés les CENTRES D’EXTERMINATION ou centres de mise à mort immédiate utilisés pour l’extermination des Juifs d’Europe (la Shoah). Dans ces centres d’extermination (équipés de chambres à gaz et de fours crématoires) les déportés, dès leur arrivée, y sont immédiatement exterminés. Il s’agit des quatre centres d’extermination de : BELZEC, CHELMNO, SOBIBOR, TREBLINKA…, plus, les deux camps mixtes de concentration et d’extermination de : AUSCHWITZ-BIRKENAU et MAJDANEK.

En ce qui concerne les camps de concentration Communistes, ils servent, eux, à y enfermer les « ennemis de classe » INTERIEURS et CIVILS en masse, qui ne sont coupables DE RIEN, mais considérés par le Parti Unique Totalitaire Bolchevique (Communiste) comme potentiellement : NUISIBLES.
Les auteurs décrivent fort bien cet objectif IDEOLOGIQUE à travers l’utilisation des camps de concentration, pages 13 et 14 :

« Domaine de l’arbitraire, le camp vise les masses, l’individu collectif. Sa fonction est de concentrer (d’où son nom), dans des quantités importantes, non pas tant des individus que des membres de catégories « nationales », « raciales » ou « sociales » perçues comme suspectes ou nuisibles, par définition. En août 1918, Lénine réclame la mise en quarantaine des « douteux dans un camp de concentration hors de la ville » : les « douteux », pas les coupables, comme a raison de le souligner Soljenitsyne. Le 5 septembre 1918, la mesure est officiellement adoptée par un décret des commissaires du peuple (sovnarkom) visant à « garantir la République soviétique contre ses ennemis de classe, en isolant ces derniers dans des camps de concentration ».

Egalement, page 31 :

« De camp de détention pour ennemis de l’extérieur (civils ou militaires) à camp d’enfermement pour ennemis intérieurs, le pas sera très rapidement franchi par les bolcheviks. C’est Trotski, en effet, qui, le 8 août 1918 ordonne la création, à Mourom, et à Arzamas, de deux camps pour « les agitateurs louches, les officiers contre-révolutionnaires, les saboteurs, les parasites, les spéculateurs qui y seront internés jusqu’à la fin de la guerre civile ». Non sans raison, Soljenitsyne souligne que, pour la première fois, « le mot (camp) est appliqué aux citoyens du pays lui-même ». Le transfert de sens est compréhensible : l’ennemi est désormais intérieur. C’est le contre-révolutionnaire, suspect par essence, qu’il convient d’interner préventivement.
Le système concentrationnaire soviétique vient à point nommé : les prisons et autres bastilles tsaristes n’auraient pas suffi à contenir la grande masse de suspects qui jaillissent de partout. Sa fonction, une fois de plus, n’est pas de châtier pour des délits jugés, mais de mettre hors d’état de nuire, à titre préventif, des individus « subjectivement coupables ».

Les auteurs présentent de manière détaillée, les camps de concentration de l’ensemble des pays qui ont subi la répression Totalitaire Communiste, tels que, en : U.R.S.S. (Goulag), Pologne, Hongrie, Roumanie, Bulgarie, Chine (Laogai), Vietnam, Cambodge, Laos, Cuba, Corée du Nord, etc..

Mais si le bagne existait, effectivement, déjà sous le régime Tsariste en Russie, comme le décrivent : Dostoïevski, Tolstoï, Tchekhov dans leurs ouvrages, les conditions : d’arrestations, de jugement, de vie et surtout le NOMBRE de prisonniers, étaient sans commune mesure avec les innommables camps de concentration du régime Totalitaire Communiste.

De nos jours, il existe parfois des débats, voire des polémiques afin de savoir lequel des deux Totalitarismes : Communiste ou Nazi, a été le plus monstrueux.
Pour ma part, ce débat n’a pas de sens et peut-être indécent pour la Mémoire de ces MILLIONS de victimes. En cela, je trouve que Jacques Rossi Le manuel du Goulag qui a passé 19 ANNEES de sa vie au Goulag Soviétique, résume très bien ce point de vue :

« A ce propos, je considère comme inutile de chercher à savoir lequel des totalitarismes, dans notre siècle, fut le plus barbare, dès lors que tous deux ont imposé la pensée unique et laissé des montagnes de cadavres ».

Pour conclure, de manière générale, RIEN, absolument rien, ne peut justifier toutes ces horreurs.
Un crime est un crime, et une victime est une victime !
Pourtant, AUJOURD’HUI dans de nombreux pays du monde : on enferme et on exécute toujours arbitrairement et sommairement.
Et demain… Demain, l’Homme recommencera, il trouvera perpétuellement de « bonnes raisons » pour : opprimer, réprimer, enfermer, et… exterminer son prochain.

Confer également, d’autres ouvrages tous aussi passionnants sur le même thème, de :
– Nicolas Werth Le Goulag (CD audio) ;
– Mémento Goulag : Mémoire et jugement du communisme ;
– Anne Applebaum Goulag : Une histoire ;
– Raymond Duguet Un bagne en Russie : Solovki ;
– Francine-Dominique Liechtenhan Le laboratoire du Goulag : 1918-1939.

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