Dieu et l'Etat : Signification de la fête du Christ Roi de Michel Viot

Dieu et l'Etat : Signification de la fête du Christ Roi de Michel Viot

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Spiritualités

Critiqué par AmauryWatremez, le 30 juin 2014 (Evreux, Inscrit le 3 novembre 2011, 54 ans)
La note : 7 étoiles
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Révolution chrétienne

J'ai eu le privilège de rencontrer le père Michel Viot par les bons offices de Myriam Le Corre, qui écrit régulièrement sur ce blog depuis quelques temps déjà. Comme tout « mauvais sujet » indocile d'une longue lignée d'« anars de droite », doté d'un sens de la contradiction un peu trop développé, quand quelqu'un me présente une personne comme étant un esprit supérieur j'ai toujours une forte tendance au scepticisme malgré toute la sincérité dont on peut faire preuve pour me convaincre de la valeur de celle-ci , je préfère m'en assurer moi-même, ce qui peut être un tort parfois. J'ai découvert un prêtre ayant une Foi forte, solide, et humaine, une doctrine réfléchie, raisonnée et construite sur les bases d'une culture immense, et dans le même temps capable de dire les choses nettement, crûment, sans détours ce qui ne peut que réjouir le gamin de Pantruche que je suis.

Le père Michel Viot, né en 1944, ancien pasteur protestant, évêque luthérien de Paris, ancien dignitaire de la Grande Loge Nationale française, revenu au catholicisme en 2001, ordonné prêtre , vicaire épiscopal, aumônier de prison, conférencier et auteur, a un parcours passionnant qu'il raconte dans « De Luther à Benoît XVI ». Il était également ami de Louis Pauwels qui a préfacé son livre « Chrétiens sans religion » paru en 1975. Cet itinéraire lui donne un point de vue unique, clair et raisonné sur les maux vécus par notre société, à commencer par la crise morale sans précédent dans l'Histoire que nous vivons depuis quelques décennies déjà, une crise morale annoncée pourtant par Bernanos dans « la France contre les Robots » ou Léon Bloy et d'autres auteurs pas forcément catholiques mais n'ayant de cesse d'avertir, telle Hannah Arendt, la philosophe Simone Weil sur le point de se convertir, ou encore Georges Orwell dans « 1984 » ouvrage sous forme de fable sombre décrivant notre monde tel qu'il est devenu, envahi d'écrans, de non-lieux, et en passe d'être déshumanisé.

Pour autant, Dans « Dieu et l’État : Signification de la fête du Christ-Roi » l'auteur ne livre aucune panacée mirobolante, ne moralise pas, ne se conduit pas en maître à penser, mais tente de comprendre pourquoi nous en sommes là et propose une voie solide et claire, un bouleversement induit par une véritable « Révolution chrétienne », titre d'un de ses précédents ouvrages. à travers l'étude de l'historique de la fête du Christ-Roi et sa signification spirituelle, philosophique et sociale pour notre monde, réhabilitant en passant, ce qui est considérable les figures de plusieurs papes déconsidérés par l'Histoire et la postérité : Benoît XVI, d'une intelligence remarquable, Paul VI, dédaigné de par la place qu'a pris la figure il est vrai extraordinaire de Jean-Paul II, comparant Innocent III à Benoît XVI, Madame Marie-Odile Bonnichon1 lui consacrant plusieurs pages en annexe à la fin de l'ouvrage du père Viot, et Pie XI dont la Lettre Encyclique « Quas primas » de 1925 sert de fil conducteur à l'ouvrage.

Le père Michel Viot commence donc par décrire la vacuité des valeurs proposées par notre société libérale libertaire que ce soit à gauche ou à droite. Il évoque également les tentations d'une jeunesse socialement précaire, à laquelle les parents n'ont pas su donner de repères, d'un Islam conquérant dont il constate « de visu » les dangers de par son ministère auprès des prisonniers, ces personnes exclues dans les marges, ces petits oubliés par l’Église même qui demande bien souvent aux fidèles, par la voix de ses évêques ou des curés de paroisse de se faire discrets sur ce que le Christ leur apporte et surtout sur ce que la connaissance de l’Évangile implique. Selon l'auteur, les peurs et les lâchetés, les compromissions petites et grandes, naissent aussi du travail de sape d'une véritable « cinquième colonne » d'idéologues ne croyant même plus en Dieu au sein de l’Église, de prêtres qui ne savent plus être pasteurs, d'aînés qui n'ont pas su transmettre leur Foi à leurs enfants alors que comme le rappelle Pie XI pour un chrétien il n'est de salut qu'en Christ, mort et ressuscité.

Ainsi, pendant les « Manifs pour tous », il était bien recommandé aux participants de ne pas se revendiquer de trop de leurs convictions chrétiennes et les intervenants sur les podiums lançaient de temps à autre un « les homos on vous aime » pour bien montrer que l'on ne se situait pas dans le camp des réactionnaires, en pure perte d'ailleurs puisque cela n'empêcha pas la presse et les belles consciences, c'est elles qui le prétendent, de montrer du doigt l'ensemble des manifestants comme forcément nostalgiques de quelque ordre noir ou moral alors que la royauté sociale du Christ devrait inspirer aux chrétiens de ne plus avoir peur, selon l'admonestation de Jean-Paul II au début de son pontificat. Et ne pas avoir peur c'est aussi oser évangéliser, oser décrire les persécutions en 2014, en particulier celles des chrétiens d'Orient qui souffrent de l'indifférence quasiment totale des clercs et des laïcs, ou de la société civile.

Comme le rappelle le père Michel Viot, la République a toujours été tentée par le laïcisme, et encore maintenant, les valeurs issues de la Révolution sont pour certains politiques une véritable religion avec dogmes. La Révolution naît de la haine du catholicisme, exprimée avec violence par l'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793 et la Constitution Civile du Clergé. Le lecteur se souviendra également de ce qui est arrivé aux Vendéens qui ne faisaient que mettre en application leur droit à l'insurrection pourtant autorisé par la Convention. La répression de celle-ci fût atroce préfigurant les horreurs modernes : l'« Oradour » des Lucs, les fours crématoires d'Angers, les exécutions en masses de Nantes, les méfaits des « Colonnes Infernales » etc...

Le concordat de 1802 et l'article 1 de la Constitution garantissait une relative bienveillance 2, mais il y eut la loi sur la laïcité de 1905. La haine et le mépris de quelques uns parmi les politiques étaient moins prégnantes que dans les régimes totalitaires du début du XXème siècle, le désir d'« Humanité nouvelle » libérée du passé, de son histoire, de ses racines des dictateurs s'opposant à la royauté sociale du Christ. La haine du catholicisme se manifesta assez rapidement par le démantèlement de l'Empire austro-hongrois dés le traité de Versailles en 1919, dont on sait les conséquences catastrophiques sur l'équilibre européen le tout menant à la Seconde Guerre Mondiale.

Cependant, il existait un respect mutuel malgré les antagonismes et l'on écoutait les voix des catholiques dont on respectait les opinions du « Sillon » de Marc Sangnier à « l'Action Française ». Depuis quelques temps, le père Viot perçoit dans les déclarations et prises de position officielles de ministres et anciens de la République, en particulier Vincent Peillon, ex-ministre de l'Éducation et Christiane Taubira, Garde des Sceaux, dans les lois sociétales édictées dans le but de produire là aussi un être humain nouveau là encore dégagé des contingences traditionnelles et de la Loi Naturelle un anti-christianisme militant bien plus affirmé, bien plus dangereux quant aux dommages occasionnés sur la morale commune sous le
couvert de progrès techniques discutables comme du reste d'un humanisme hypocrite qu'on met en avant à tout bout de champs. François Hollande, le président de la République, n'est plus dans une attitude saine de neutralité bienveillante mais dans une opposition marquée aux valeurs chrétiennes. Paradoxalement, un Islam radical, pourtant minoritaire, un Islam se réclamant des traditions coraniques alors qu'il est une création contemporaine, un Islam qui donne des coups de canifs dans le contrat républicain quotidiennement, est beaucoup mieux toléré, respecté, ses revendications pourtant communautaristes étant exaucées sans heurts, toutes objections raisonnables ou légitimes étant considérée en somme comme une jalousie des autres communautés religieuses..

L'instauration du Règne Social du Christ n'a rien d'une théocratie, ce Règne ne se manifestant de toutes façons pour de bon qu'à la toute fin des temps. Il s'agit simplement pour les chrétiens de travailler au Bien Commun en réaffirmant dans leur vie les valeurs chrétiennes dont la première est l'Amour du prochain et la Charité, et en particulier leur souci des plus faibles, de ceux qui ne peuvent pas se défendre, des plus pauvres, des plus démunis et dont les appareils d’Église se sont parfois éloignés. Des valeurs solides et des idéaux élevés amènent ainsi de grands hommes et de grandes femmes à se révéler et à se mettre au service de tous avec l'exemple de Sainte Thérèse de Lisieux ou Sainte Jeanne d'Arc canonisées par Pie XI, ce qui n'est pas un hasard, sur ses valeurs sans failles. L’Église devrait être un facteur solide de la société. Il ne s'agit pas pour autant d'en rester au stade de bonnes intentions, mais de revenir à une plus juste répartition des rôles entre l’État et l’Église, dont la nécessaire neutralité envers la foi religieuse, bas qui permettrait aussi de pacifier le dialogue inter-religieux.

« Un seul être vous manque et tout est dépeuplé » tel est l'alexandrin célèbre que Lamartine a donné dans ses premières méditations poétiques et que spontanément tout lecteur applique à l'amour humain.s

Mais si, changeant de registre, il était appliqué à Dieu, le Seul, l'Unique - que le mot être fut écrit non plus avec une minuscule, mais avec une majuscule- sa portée en serait du tout au tout changée si, appliquée à Dieu et à l'environnement désastreux que nos gouvernants sont en train de mettre systématiquement en place, il serait d'une autre portée. Quel sermon un Lacordaire eût pu nous donner sur un tel thème ! Non seulement la cathédrale et Basilique Notre Dame de Paris aurait été archi comble comme au temps où il y donnait ses conférences de Carême. Mais il eut été obligé de sortir du sanctuaire, comme son compatriote, Bernard de Clairvaux, prêchant à la deuxième Croisade de la basilique de Vézelay, pour accueillir les foules qui se seraient pressées pour entendre et reprendre cœur à l'écoute d'une vérité si pressante et si nécessaire. Cette vérité si peu qu'elle soit amoindrie dans les lois ou les textes ne tarde pas à ébranler gravement les institutions, et si elle est détruite autant qu'il est concevable de le faire, le monde en perd son équilibre et sa force, et peut de même dangereusement basculer dans le chaos.

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Les éditions

  • Dieu et l'État [Texte imprimé], signification de la fête du Christ-Roi père Michel Viot avant-propos de Mgr Marc Aillet
    de Viot, Michel
    Via Romana
    ISBN : 9791090029675 ; 9,00 € ; 01/11/2013 ; 80 p. ; Broché
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