Nos secrets de famille de Serge Tisseron

Nos secrets de famille de Serge Tisseron

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Psychologie

Critiqué par Rotko, le 1 octobre 2003 (Avrillé, Inscrit le 22 septembre 2002, 50 ans)
La note : 7 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (39 865ème position).
Visites : 4 476  (depuis Novembre 2007)

les bouches cousues !

Au départ, la distinction est établie entre les secrets individuels qui font partie de notre intimité et les secrets de famille qui font des ravages chez celui qui les découvre sur le tard ou qui en pâtit durant sa vie. L'enfant, notamment, est bien conscient des silences établis, et il bâtit tout autour des architectures secrètes et douloureuses. Car les secrets ont toujours des "suintements"; Ils entraînent des séquelles qui peuvent traverser des générations. De ce côté, Tisseron rejoint Anne Ancelin Schûtzenberger,("Aïe, mes aïeux").
Comme elle, Tisseron évoque des exemples précis, mais il se répète, si bien que le livre est à parcourir plus qu'à lire. Des idées intéressantes, comme les secrets d'Etat dans les régimes totalitaires, sont indiquées mais non développées. En fin d'ouvrage, une bibliographie complaisante rappelle que Tisseron a étudié Hergé et son oeuvre. On pense aussi à des romanciers qui s'inspirent de ce thème : Anna Enquist, "Le secret", (Actes Sud) et Bernhard Schlink, dans "la petite fille au lézard" (in "amours en fuite") pour des récits de grande qualité.

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Chuuuuut !

8 étoiles

Critique de Shelton (Chalon-sur-Saône, Inscrit le 15 février 2005, 67 ans) - 26 octobre 2011

Au moment où on parle avec insistance de la génération de la transparence, Internet, réseaux sociaux et compagnie, de ce besoin extraordinaire de se raconter, de tout rendre public, il est certainement opportun de lire ou relire ce très bon texte de Serge Tisseron.

Serge Tisseron est un psychiatre et psychanalyste qui a eu au moins le mérite, du moins à mes yeux, de se lancer dans une nouvelle approche de l’image et de la bande dessinée. C’est ainsi qu’il fut celui qui comprit l’existence d’un secret de famille chez Hergé avant qu’une biographie vienne donner des éléments concrets. Ce n’est donc pas par hasard que ce livre est arrivé, c’est le fruit de recherches et de rencontres avec de nombreux patients en souffrance.

Mais qu’est-ce qu’un secret de famille ? Dans une première partie de l’ouvrage, Serge Tisseron explique qu’il y a des secrets qui détruisent et des secrets qui construisent. Cette première distinction, pas toujours évidente, est capitale à intégrer pour aider un jeune à se construire. Oui tout n’est pas bon à dire et rendre public, non, tout n’est pas à cacher… En fait, nous pourrions même dire que tout n’est pas bon à dire à n’importe quel moment. En effet, il y a des temps pour dire et des temps pour cacher. On mesure que certains aveux nécessitent un temps de maturation car trop rapides ils auraient eu des conséquences néfastes, voir dramatiques. Le problème c’est que généralement nous sommes les plus mal placés pour mesurer cette notion seuls. C’est pour cela que nous devons avoir au minimum des amis, parfois des professionnels, pour nous aider à voir en nous ce qui ne doit pas être enfermé… c’est aussi une excellente approche de cet outil magique et pernicieux, Internet. Oui, l’outil permet de rendre public, de dire, de révéler… que l’internaute en arrive à mettre sur la place publique des secrets qui n’auraient pas du s’y trouver…

J’ai beaucoup apprécié la réflexion sur le bébé et ses parents. Le bébé face à ses parents est dans une situation délicate. Il peut se sentir dans la dépendance totale. Quelle est son autonomie ? Tout petit les parents le font penser, le font parler. Peut-il exister sans eux ? En dehors d’eux ? Il n’imagine pas pouvoir penser sans être transpercé par un regard inquisiteur et perspicace… sauf à partir du premier mensonge ! Certes, on lui dit bien que la morale réprouve cet acte, mais il obtient ainsi la certitude qu’il peut enfin penser de façon indépendante : il peut cacher sa pensée et se créer une réserve de secrets personnels inviolables !

C’est ainsi que se construit le jardin personnel ou la collection des secrets. Mais si certains sont agréables à collecter et conserver, d’autres sont plus pernicieux et se transforment en poisons fortement toxiques qui détruisent irrémédiablement les belles plantes de notre jardin. Mais rien n’est jamais général. Le même secret chez l’un ou l’autre n’a pas les mêmes conséquences. Les connotations que nous accolons à nos secrets en font de belles ou de terribles choses que ce soit sentimental, sexuel, poétique, criminel, métaphysique, onirique…

On peut penser que les secrets de famille qui détruisent peuvent provenir de trois origines différentes : ceux qui tombent sous le coup de la loi sociale, ceux qui déclenchent la honte et ceux indicibles qui plongent dans l’angoisse… mais nous savons bien que certains s’affranchissent de la loi sociale en grande sérénité et que la honte et l’angoisse ne sont pas au même niveau chez chacun d’entre nous…

On découvre aussi que le secret peut être porté par une entité comme un état, une entreprise, une dictature… on peut cacher, réécrire l’histoire, infliger un « secret de famille » à tout un peuple…

C’est un excellent livre qui doit permettre à chacun de se lancer dans une lecture de sa propre vie où, peut-être, n’y a-t-il rien de très secret ou destructeur à révéler pour être mieux… Mais si c’est le cas, alors vous devriez y voir beaucoup plus clair par la suite…

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