La milice française de Michèle Cointet

La milice française de Michèle Cointet

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Histoire

Critiqué par TRIEB, le 29 septembre 2013 (BOULOGNE-BILLANCOURT, Inscrit le 18 avril 2012, 73 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (23 201ème position).
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LES COMPTES DE L'HISTOIRE

Les Français ont eu, longtemps, du mal à regarder en face l’histoire de l’Occupation, du régime de Vichy considérés comme des révélateurs désagréables de certains pans de l’histoire de France, de l’existence de courants d’idées contraires à nos valeurs républicaines. Michèle Cointet, historienne spécialisée dans l’histoire de la Collaboration, de la Résistance, et du gaullisme, énonce dans son livre La Milice française un terrible constat : la Milice, par ses crimes et ses exactions, s’est hissée au même niveau de barbarie que les SS, confirmant ainsi le caractère décisif, et douloureux, d’un réexamen de cette période de l’Histoire de notre pays, dramatique à plus d’un titre.
Ce qui frappe, dès les premiers paragraphes, c’est le malentendu originel sur lequel est fondée la création de la Milice le 31 janvier 1943. Laval, en confiant le commandement de ce corps à Joseph Darnand, pense que « ses hommes l’aideront sans trop l’engager . Sur cette erreur commence l’aventure de la Milice française. »

Qui s’engageait dans la Milice ? Des employés, des cadres, des artisans et commerçants. Ce sont les classes moyennes, originaires d’un milieu urbain qui dominent. Ce constat contredit l’idée, couramment répandue, que la Milice aurait recruté chez les déclassés.
Quelles étaient, selon Michèle Cointet, les principales motivations d’un engagement dans la Milice ? L’auteure recense l’anticommunisme, l’antisémitisme, la revanche contre le Front populaire, la république ; le tout porté à un niveau de haine et de rancœur inimaginable . Ainsi, Bénouville s’exclame-t-il lors d’une réunion de la Légion de Nice en 1940 : « Il faut que justice se fasse, il faudra que les têtes tombent. »Ou encore Joseph Lécussan, tristement célèbre dirigeant régional de la Milice à Lyon, déclare-t-il : « Il y a des Français qui se sont exclus de la communauté nationale. Ce sont d’abord les Juifs que la race sépare de nous. ( …) Pour ceux-là, aucune pitié : ils doivent être tués . Il n’existe d’ailleurs qu’une seule solution au problème juif : les supprimer. »

Tout est dit, déjà. Les exactions perpétrées par les Miliciens sont de tous ordres : violences contre des habitants de villages, prises d’otages, tortures plus atroces les unes que les autres, instauration de cours martiales on ne peut plus expéditives . On retiendra bien sûr l’assassinat de Victor Basch, président de la ligue des Droits de L’homme, celui de Jean Zay et de Georges Mandel, crimes à ajouter à la liste des crimes commis par la Milice. Cette dernière se distingua lors de la prise du plateau des Glières, en 1944, lorsque la Wehrmacht décida de s’emparer de ce camp retranché sur lequel des centaines de maquisards s’étaient réfugiés. La répression y fut effroyable …
Ce qui ressort de la lecture de ce livre, c’est un démenti cinglant : non, la Milice ne fut jamais un frein à la répression de l’occupant allemand ; elle fut tout au contraire son auxiliaire zélé, le concurrençant dans la barbarie, resituant en cela le rôle du régime de Vichy dans l’Europe de Hitler.
Ouvrage à lire en raison même de cette remise en perspective à laquelle cet essai apporte une contribution décisive.

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Travail historique de précision

8 étoiles

Critique de CHALOT (Vaux le Pénil, Inscrit le 5 novembre 2009, 76 ans) - 14 août 2024

Historienne spécialisée, Michele Cointet a écrit une histoire passionnante de la Milice française de 1943, date de sa création à sa disparition en 1945 avec la défaite des nazis. Quelles étaient les motivations de ces hommes et femmes qui ont décidé de s'engager dans une collaboration active ?
Pour certains c'était l'anticommunisme.... pour d'autres l'aventure et pour d'autres la soif de voir la France devenir un pays fasciste puissant...
Laval a créé cette milice le 31 janvier 1943,10 ans et un jour après qu'Hindenburg nommé Hitler chancelier....
Il n'y a pas de hasard en politique, du moins très peu. Cette milice brutale, active dirigée par Joseph Darnand n'était pas qu'une force supplétive mais une armée implacable servant les intérêts politiques de ces initiateurs faisant des paris sur l'avenir. Darnand qui n'est pas très cultivé est pétri par la soif de l'action. Il a même envisagé de rejoindre la France libre avant de décider de participer et d'organiser cette milice sinistre qui va multiplier le contrôle et les actions criminelles et notamment des assassinats et des tortures.
L'auteure n'oublie personne et aucun fait. Elle montre les divergences entre les différents dirigeants de l'État français , les courbettes cachant des coups bas et les complots.
On peut s'interroger sur les raisons qui ont poussé les Darnand et autres chefs miliciens à poursuivre et à amplifier leurs actions contre la résistance sachant bien que les rapports de force n'étaient plus en faveur d'Hitler.

Jean-François Chalot

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