Ni dieux, ni maîtres

On a tous entendu parler de la fameuse « Bande à Bonnot ». Mais ce que nous en savons tient aussi de la légende qui est née à l'époque et s'est vue embellie depuis.
Des anarchistes effectivement. Mais pas vraiment des théoriciens pour la plupart : plutôt des gens simples si l'on excepte Viktor Kibaltchiche (dit Victor Serge) qui ne fit pas réellement partie du groupe d'activistes. Pas des théoriciens donc mais des gens motivés quand même et qui s'informent, qui lisent, qui vivent leur quotidien suivant des principes qui leur sont propres : amour libre, végétarisme...
Nous sommes en 1911-1912.
Ce qui a frappé l'opinion également, c'est que les « bandits » sont les premiers à utiliser l'automobile à une époque où la police se contente du cheval, du vélo et du train.
La presse s'interroge alors sur la disparition des valeurs morales et même du « souci de l'avenir de notre race ». A ses yeux, les causes en sont les « la pléthore des grandes villes, l'abandon de l'enfance, la suppression de l'apprentissage, le défaut d'une éducation morale soutenue, le relâchement de la famille (...) » et une « littérature insensée ».
J'ai appris au passage que la police a enquêté à une adresse où habitait un certain Vladimir Oulianoff. Mais c'était une fausse piste et la révolution russe eut donc bien lieu 5 ans plus tard...
Sans doute que les policiers s'étant rendu sur place portaient la moustache puisqu'elle était à l'époque obligatoire dans la police ! Et si on remettait ça à la mode ? Maintenant, c'est vrai qu'il y a des femmes dans la police, mais les postiches, ça existe...
Ce livre nous en dit fort peu sur l'anarchie elle-même et c'est un peu frustrant. Mais on suit l'enquête dans tous ses détails et surtout, on prend « l'air du temps ». Par exemple, que disait alors l'anthropologie criminelle ? Que les adeptes de l'anarchie, souvent, « présentaient toutes les caractéristiques physiques de l'être disgracié par la nature (...), difformes, le front fuyant, les mains efféminées (...), beaucoup avaient des infirmités physiques ».
Et aussi ceci qui continue à faire peur aux automobilistes d'aujourd'hui, et qui est un ordre du préfet de police : « Toutes les fois que les chauffeurs d'automobiles chercheront à se soustraire (...) les agents ne devront pas hésiter à crever, à coup de sabre, les pneus de l'automobile ».

• 

  "Mort aux bourgeois" [Texte imprimé], sur les traces de la bande à Bonnot Renaud Thomazo

  de Thomazo, Renaud
  Larousse / L'Histoire comme un roman
  ISBN : 9782035833464 ; 14,00 € ; 07/06/2007 ; 287 p. ; Broché

  Go Amazon