Roi, Dame, Valet de Vladimir Nabokov

Roi, Dame, Valet de Vladimir Nabokov
(King, queen, knave ( trad de Korol' Dama Valet (Король, дама, валет)))

Catégorie(s) : Littérature => Russe

Critiqué par Krapouto, le 25 novembre 2010 (Angouleme Charente, Inscrit le 4 mars 2008, 79 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (13 269ème position).
Visites : 6 909 

Le pion prend la dame

Vladimir Nabokov - ROI, DAME, VALET
1928 ( en russe) 1968 version anglaise ( King, Queen, Knave)

Nabokov revendique dans ce roman un hommage à Flaubert : les allusions , les clins d’oeils à Madame Bovary ne manquent pas.
.
Berlin, entre-deux guerres.
Un jeune homme, Franz, et un couple voyagent, sans se connaître, dans le même compartiment. L’homme, Dreyer, homme d’affaires, a accepté d’offrir à un vague neveu un emploi dans son entreprise, ce que sa femme, Martha, lui reproche.
Arrivé à destination, le jeune Franz se rend chez son oncle, et chacun s’aperçoit avec surprise qu’ils ont voyagé ensemble, mais on s’en doutait complètement !
Franz assume son emploi sans brio ni enthousiasme dans le grand magasin de Dreyer. L’esprit de Dreyer est occupé par ses affaires et l’arrivée d’un inconnu qui lui propose une invention révolutionnaire : des mannequins automates . Martha se bovarise, et l’ennui la pousse à devenir la maîtresse de Franz.
L’amour naît entre les deux amants, en même temps que la recherche d’une solution pour supprimer le mari.
Une scène cocasse de tentative de le noyer lors d’une promenade en canot fait penser à une séquence du « viager » avec Michel Serrault (« Venez faire un tour de pédalo ! ») Toujours est-il que rien ne se passe comme prévu . La fin est inattendue, mais la chute est inexistante.

On reste donc sur sa fin et sur sa faim, malgré tout un excellent livre, agréable et prenant. Sans doute un peu grâce au talent du traducteur (Georges Magnane) qu'on oublie trop souvent dans les critiques.

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Tout un monde

10 étoiles

Critique de Ravenbac (Reims, Inscrit le 12 novembre 2010, 59 ans) - 23 octobre 2011

Franz, jeune homme timide et sans caractère, monte à Berlin chez son oncle dans l’espoir d’obtenir un emploi. Dreyer est un homme d’affaires qui a réussi. Il possède un grand magasin où l’on vend du prêt à porter masculin et des articles de sport. Sa femme Marthe, bourgeoise sans imagination, s’ennuie. Très vite elle devient la maîtresse de Franz. Marthe ne supporte plus son mari depuis longtemps et rêve de le quitter pour Franz. Mais elle n’est pas prête à renoncer à la vie bourgeoise que lui offre l’encombrant Dreyer. Aussi elle ourdit avec le pâle Franz un plan !
De l’aveu même de son auteur, l’intrigue de Roi dame valet « n’a rien de bien nouveau » : une banale histoire d’adultère. Mais la façon de la traiter ne l’est pas. Le livre est écrit sous le signe du jeu. Ce qui retient l'attention au milieu de cette farce boulevardière, ce sont tous les petits détails étranges que Nabokov sème sur son chemin : un cinéma en construction ; des pantins mécaniques fascinants ; le propriétaire de l'appartement de Franz, vieillard torve qui s'invente une femme ; un homme monstrueux privé de nez… Le roman est ancré dans une sorte de brouillard onirique, à l'orée du fantastique, et ce grâce à des inventions narratives brillantes. L’épisode où Franz, ayant cassé ses lunettes avant d’aller voir son oncle, traverse pour la première fois un Berlin flou, presque irréel, est brillantissime.
Roi dame valet, écrit en 1928, est le second roman de Nabokov. On y trouve déjà ce qui fait le charme du romancier : une grande élégance de style, et un humour acerbe et misanthrope vraiment drôle ; et surtout le pouvoir de créer un monde sui generis.
Souvent chez Nabokov les objets ont une vie propre, comme presque vivants : « L’énorme aiguille noire de l’horloge est encore au repos, mais elle est sur le point d’accomplir son saut de chaque minute. » C’est la première phrase du livre. Franz, pâle figure romanesque, attend patiemment son train en partance pour Berlin. Et bientôt notre hôte, chef de gare démiurge, est près de « mettre en branle tout un monde ».
Un monde enchanteur.

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