The puritan gift: Reclaiming the american dream amidst global financial chaos de Will Hopper, Ken Hopper
Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Economie, politique, sociologie et actualités
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L'esprit puritain
Le puritanisme protestant engendra-t-il le capitalisme ou bien en est-il l'enfant ? Si la question torture les historiens de l'économie, les auteurs, eux, ne prennent pas position. Ils se contentent de constater que les deux se marient très bien : vouloir établir le royaume de Dieu sur terre (démarche puritaine) est un objectif qui engage une société entière sur le long terme et, au final, sert l'intérêt collectif face auquel les intérêts individuels s'effacent (essence du capitalisme).
Plus qu'un mariage heureux, c'est ce qui pour eux a fait le succès des Etats-Unis. L'Amérique, terre inhospitalière, a su en effet vite surpasser l'Europe et d'autres colonies (on pense à l'Australie) sur le plan économique. Pourquoi ? Grace à l'esprit puritain de ses pionniers, qui ont forgé la mentalité de tout un peuple.
Ils reviennent bien sur sur cette histoire, de l'arrivée des premiers colons à Jamestown à la Seconde Guerre mondiale en passant par la conquête de l'Ouest et la Révolution Industrielle (née en Angleterre mais qui décollera en Amérique, ce n'est pas un hasard...), mais pas seulement. Ils mettent surtout en lumière comment cet esprit religieux puritain, avec en tête l'objectif cité plus haut, donna naissance à une manière radicale d'aborder et de diriger les entreprises. C'est ce qu'ils nomment l'Age d'Or : des patrons venant de l'entreprise même, pour laquelle ils travaillent depuis des années, en connaissent parfaitement les rouages et s'identifient avec les employés -dont la plupart sont issus à travers des promotions.
Ce modèle, ce "don" pour reprendre le titre du livre, fera tellement ses preuves qu'il sera repris à l'étranger -notamment en Asie, où le Japon a considérablement bénéficié de l'influence américaine après 1945. Seulement voila : quand d'autres pays décollent économiquement en l'adoptant les américains eux, parallèlement, l'abandonnent progressivement pour se tourner vers une autre approche, qui elle sera catastrophique et la source de bien des maux -dont la récente crise.
Ce tournant radical n'est autre que le Taylorisme, cette division scientifique du travail (qui n'a en fait absolument rien de scientifique) qui va s'imposer et, en quelques décennies, gangréner la façon même de diriger les entreprises. Logique : on commence par diviser à l'extrême la production, on finit par diviser aussi à l'extrême la direction.
Appliqué au management le Taylorisme va accoucher d'un nouveau type de dirigeant. Puisque tout devient fractionné et spécialisé, des experts sont requis pour prendre le contrôle. Le Culte des Experts déboule donc et fait son entrée; des diplômés en finance et comptabilité, formés sur les bancs des écoles et qui ne connaissent rien aux entreprises qu'ils seront chargés de diriger accaparent le pouvoir.
Les directeurs, comités, consultants se multiplient, et l'autorité se dissout dans une hiérarchie tellement confuse que l'on ne sait plus qui est en charge, ce qui mène à des décisions souvent désastreuses (les auteurs citent, entre autres, General Motors, la NASA et le fonctionnement des hôpitaux). Pire : puisqu'à l'école on leur apprend que diriger est avant tout de la théorie, on en arrive à un point où la performance des meilleures entreprises se "mesure", en fonction de leur valeur sur le marché de la Bourse ou toutes autres valeurs chiffrées. Financiers obsédés par les mesures statistiques, ces nouveaux patrons ne s'identifient plus, dès lors, aux employés -avec qui ils ne sont pas en contact- mais avec les actionnaires -issus du même monde académique qu'eux. Ils utilisent le système comme un moyen de faire du profit, toujours plus de profit, encore plus de profit sans plus se soucier du bien-être collectif. L'esprit puritain a été trahi, l'économie ne sert plus l'homme; elle est devenue une mathématique qui s'emballe et devient folle (c'est l'époque des conglomérats et des Milton Friedman Prix Nobel).
Le résultat ne pouvait être qu'un désastre.
Est-on pour autant face à un mur ? Non d'après les auteurs, parce que la récente crise aura au moins eu le mérite d'obliger de plus en plus de grandes entreprises à repenser leur façon de diriger, la réorientant vers l'esprit pionnier qui avait fait ses preuves. Un court chapitre leur est dédié : l'esprit puritain renaitrait-il de ses cendres pour venir nous sauver ?
Une mise en perspective originale, qui est aussi un réel plaisir à lire.
Les éditions
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The puritan gift: Reclaiming the american dream amidst global financial chaos de Ken Hopper, Will Hopper
de Hopper, Will Hopper, Ken
I. B. Tauris
ISBN : 9781845119867 ; 16,71 € ; 17/03/2009 ; 352 p. ; Paperback
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