Trouille (BD) de Marc Behm (Scénario), Jean-Hugues Oppel (Scénario), Joe Giusto Pinelli (Dessin)
Catégorie(s) : Bande dessinée => Aventures, policiers et thrillers , Bande dessinée => Adultes
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Les fantômes de Joe
La collection Rivages/Noir a été créée en 1986, dans le but de faire découvrir ou redécouvrir l’œuvre des meilleurs écrivains de romans noirs. Le but étant louable, j’ai cependant de sérieuses réserves quant à la pertinence de l’entreprise. Est-ce vraiment possible de rendre toute l’atmosphère d’un polar, de faire vivre au lecteur les émotions et les angoisses générées grâce à l’œuvre écrite par le biais d’une bande dessinée ?
Je n’ai pas lu le roman de monsieur Marc Behm qui a inspiré cet album. Bien que je ne puisse établir de comparaison, je dois dire que je suis assez impressionnée par l’atmosphère qui se dégage ici grâce essentiellement aux dessins de monsieur Pinelli. Vraiment étranges ces dessins, ils plongent le lecteur dans une atmosphère brumeuse, glauque, surnaturelle et fantomatique. Je ne peux affirmer qu’ils me plaisent tous car souvent, ils laissent une impression d’inachevé, d’ébauches laissées en plan mais ils font mouche en ce sens qu’ils servent à merveille le propos de cette histoire d’un homme qui passe sa vie à fuir. Les représentations du milieu urbain de petites villes américaines m’ont laissé une forte impression. J’ai ressenti de l’angoisse à les regarder tellement le climat malsain et déprimant de ces cités est bien rendu. Je pense en particulier aux pages vingt-huit et vingt-neuf où on peut voir un pont dans la brume avec un éclairage tamisé par la pluie et la noirceur nocturne. C’est fantomatique comme atmosphère, on dirait un tableau d’Edvard Munch. D’ailleurs, c’est avant tout un album d’atmosphère car les textes sont bien mais sans plus. Ce sont les dessins qui prennent toute la place et projettent le lecteur dans un monde irréel ou les personnages évoluent et se débattent avec leur vie sans espoir et sans gloire. Ce sont tous plus ou moins des paumés, des êtres qui hantent les lieux mal famés, les bars enfumés, les tripots. Tout tourne autour du personnage principal, cet homme qui, à un moment dans sa vie, a ressenti l’urgence de fuir, à tout prix et sans s’arrêter, fuir encore et toujours plus loin afin d’échapper à quelqu’un ou quelque chose qui le hante et l’obsède. Un personnage désabusé, solitaire, aux abois, vivant de petits boulots et surtout et avant tout du poker, cette passion héritée de son père.
Un excellent travail mais j’enlève une étoile pour certains dessins que je n’ai pas aimés et pour les textes qui auraient gagné à être un peu plus travaillés.
« Depuis combien de temps fuyez-vous Joe ? Que redoutez-vous exactement ? Je le sens, vous êtes mort de p… — Taisez-vous ! — Je peux vous aider à guérir. Combien de fantômes marchent avec vous Joe ? »
Les éditions
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Trouille [Texte imprimé] adapté du roman de Marc Behm par Joe G. Pinelli, dessin et J.-H. Oppel, scénario mis en couleurs par Sébastien G. Orsini
de Oppel, Jean-Hugues (Scénariste) Behm, Marc (Scénariste)
Casterman / Rivages-Casterman-noir
ISBN : 9782203012127 ; 15,99 € ; 18/05/2009 ; 93 p. ; Album
Les livres liés
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Les critiques éclairs (2)
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Le jeune homme et la mort
Critique de Pucksimberg (Toulon, Inscrit le 14 août 2011, 44 ans) - 11 septembre 2012
C'est par ces injonctions que la bande dessinée débute. Le personnage principal ne parvient pas à vivre dans l'immobilisme et ne cesse de fuir. Ceci est dû à une femme. Une femme vue dans son enfance. A plusieurs reprises. Elle serait la mort et apparaitrait à Joe avant qu'il apprenne la disparition d'un être cher. A partir de ce jour, il a décidé de partir, de fuir constamment cette femme fatale invincible.
Sa vie est organisée en fonction de ce besoin de se déplacer : il a plusieurs comptes en banque, empoche pas mal d'argent grâce à des parties de poker où il est souvent chanceux et les jours où il est malchanceux il n'hésite pas à travailler aux champs. Les femmes ont un rôle capital dans cette oeuvre. Elles seront charnelles, parfois des guides. Cette créature qui apparaît avant un décés n'est-elle pas elle-même d'apparence féminine ?
J'ai beaucoup apprécié aussi les dessins et l'absence de vignettes clairement délimitées. Ce choix de passer plus rapidement d'un dessin à l'autre comme s'il y avait un fil conducteur donne un rythme personnel à cette histoire. Joe G.Pinelli parvient à retranscrire une atmosphère parfois écrasante, angoissante, mais aussi sensuelle dès que le personnage principal rencontre une jolie demoiselle. Ses dessins rappellent parfois certains tableaux d'Edward Hopper.
Une bande dessinée passionnante entre fantastique et reconstitution d'une certaine Amérique.
Un bon polar des familles...
Critique de Shelton (Chalon-sur-Saône, Inscrit le 15 février 2005, 68 ans) - 23 janvier 2010
Un homme, Joe Egan, est obsédé par la mort dont il sait que lorsqu’elle s’approche, elle est contrainte de se montrer sous les traits d’une femme, la fameuse faucheuse. Quand elle décide de vous rendre visite, l’issue est annoncée sans aucune surprise et la fuite est impossible… Joe peut aller au bout du monde, on sait d’entrée de jeu qu’il sera rattrapé et qu’il devra mourir…
En fait, c’est probablement une évidence, mais Joe est tout simplement confronté à sa nature humaine. Tout humain en naissant rencontre la faucheuse et sait qu’un jour elle reviendra, spécialement pour lui, et qu’alors ce sera la mort. Oui, l’homme acquiert le droit de mourir le jour de sa naissance…
Joe va avoir une vie agitée. Il sera, on peut le dire ainsi, un grand joueur de poker. Or, cette activité professionnelle, cela en est bien une, oblige à beaucoup bouger car on est souvent rattrapé par ses dettes, ses pertes, ses gains et ses tricheries éventuelles. Ici ou là, il rencontre des femmes généreuses et énigmatiques qui l’accompagnent, au moins quelques instants dans cette vie d’errance… Maxie Hearn aura un rôle particulier, celui de pouvoir le faire revenir sur ses traces… Oui, l’homme aime à revenir sur ses chemins, retrouver ses connaissances… C’est la nostalgie pré-mortem…
Jean-Hugues a réussi à transformer ce roman oppressant en une sorte de quête rythmée et infernale que Joe G Pinelli a pu mettre en images, sans répétition, sans alourdir le récit, au contraire, en le dynamisant. Ce n’est pas une bande dessinée classique, ce n’est pas un roman graphique, c’est plutôt une histoire racontée à plusieurs voix… celle du romancier qui a créé ces personnages, qui les fait vivre jusqu’à la mort… celle du scénariste qui fait vivre Joe sans insister sur ses motivation, qui se dit que si on veut en savoir plus, on pourrait bien aller chercher nos éléments dans le roman… là, juste ce qu’il faut, rien de plus… celle du dessinateur qui ne s’encombre pas des traditionnelles bulles, qui dessine comme il ressent l’histoire, qui transmet les émotions comme ses pinceaux et crayons peuvent s’adresser à nous…
Au final, l’issue du roman que l’on sait fatale depuis le départ est accueillie presque comme un soulagement… Oui, c’est fait, l’ordre est rétabli, les choses sont rentrées dans l’ordre, l’homme est venu, il a vécu et il est reparti…
Vous trouvez cela noir ? Peut-être, après tout, je n’y avais pas songé…
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