La guerre en directe...

La seconde guerre mondiale a touché profondément de très nombreuses générations car, grâce à une médiatisation mieux organisée et, certainement, plus manipulée que lors des conflits précédents, elle a atteint les zones les plus isolées des pays les moins concernées. Il n’est donc pas étonnant de voir un grand nombre d’auteurs se l’être appropriée pour en faire des œuvres d’art. La bande dessinée n’a pas échappé à ce mécanisme, y compris du coté des plus grands auteurs… même chez un certain Hugo Pratt.
Le personnage d’Ernie Pike est journaliste de guerre sorte d’équivalent aux grands reporters qui couvrent, depuis quelques années, les conflits comme le Viêt-Nam, le Rwanda, la Somalie, la Bosnie ou l’Irak… Il a suivi les combattants tout au long du conflit, du Japon à l’Italie, de l’Afrique aux Ardennes, de la pleine mer au cœur des tranchées creusées dans le sable… Il est inspiré d’un journaliste véritable, un certain Ernie Pyle qui, lui, est mort à Okinawa, en 1945. Il s’agit, bien sûr, d’une interprétation libre qui permet au scénariste, un certain Hector German Oesterheld, d’aborder la guerre sous tous les angles. Au départ, le lecteur peut croire que les auteurs sont trop fascinés par les récits de la guerre, mais en fait, c’est une impression car ils s’attachent à montrer toute l’absurdité de la guerre tout en louant les qualités humaines extraordinaires de ceux qui se retrouvent sur le champ de bataille. Ces pauvres malheureux n’ont rien de mandé mais ils risquent leurs vies à chaque instant, alors, ils montrent du courage, de l’abnégation, de l’amitié, de la pitié… Ils en sortent grandis, humains à l’infini… mais la guerre est bien montrée comme une absurdité, une horreur, une ineptie… Une phrase d’Ernie Pike va montrer l’esprit de la série : « Ce sera peut-être un récit amer, mais je crois qu’on y trouvera du bon héroïsme… Un récit qui regarde en face la réalité, sans fausses pudeurs, avec toutes ses vacheries… Sans bons ni mauvais… Mais, avec un protagoniste odieux, cruel et infâme plus que tous les autres : la guerre ! ».
Les récits sont d’une longueur variable. Hugo Pratt a commencé à dessiner cette série en mai 1957 et, très rapidement, d’autres dessinateurs vont participer à l’œuvre, Lopez, Bartolini, Munoz, Breccia, Moliterni… Mais, la réédition des éditions Casterman ne concerne, a priori, que les travaux de Hugo Pratt.
Le premier volume nous présente certains récits que l’on a déjà lus ici ou ailleurs… ce qui n’enlève rien à leurs qualités. Les Francs-Tireurs permettra de voir la rencontre sur le champ de bataille de deux hommes, un en uniforme régulier, l’autre en résistant, tous les deux viennent du même village, étaient amoureux de la même femme… Mystère à Burma montre des Japonais à l’œuvre guerrière, Un lieutenant allemand permet de prouver que les êtres humains étaient disséminés dans tous les camps, L’arme secrète de Judas O’Leary est un grand classique du genre avec la cornemuse qui devient une arme absolue, enfin, le récit le plus connu est ce récit tragique, Les deux amis, que j’avais déjà lu mais qui a encore fait couler quelques larmes le long de mes joues… Guerre, amitié et folie… tout ne pouvait que finir dans le drame absolu…
La narration graphique est d’une humanité intégrale et totale et c’est un album qui ne laissera personne indifférent tant la guerre est une atrocité qu’il faut connaître et comprendre pour lutter efficacement contre sa propagation sur notre pauvre planète…
Quel bonheur de voir ces courts récits réédités et offerts aux plus jeunes lecteurs !

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  Ernie Pike [Texte imprimé] [dessins de] Pratt [scénario de] Oesterheld

  de Pratt, Hugo (Illustrateur) Oesterheld, Hector (Scénariste)
  Casterman
  ISBN : 9782203344006 ; 19,70 € ; 01/12/2003 ; 78 p. ; Cartonné

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