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Forums  :  Vos écrits  :  Carcasse

Jonjon21 03/10/2005 @ 16:25:18
Les nuages commencent à se disperser. Des dizaines de mouettes blanches tournoient au-dessus du cimetière des Pins. Elles poussent de manière discordante une série de cris stridents. La scène au sol ne les intéresse pas. La nature sacrée d'un enterrement leur est inconnue.
Les doigts crispés sur son chapelet, Marianne n'entend plus le curé parler. Derrière un voile de crêpe, ses paupières sont closes. Aux yeux des autres villageois, elle paraît dévastée mais, en vérité, elle ne pense même plus à Antoine. Elle ne pense qu'à ces oiseaux qui l'assourdissent. Les dents serrées, la jeune veuve laisse une larme couler. Celle-ci glisse jusqu'au bout de son menton auquel elle reste suspendue indéfiniment.
Elle sent sa soeur la prendre par l'épaule. D'une voix rassurante, elle lui chuchote quelques mots à l'oreille. Marianne hoche la tête même si elle n'a pas compris. Ça lui suffit de la savoir près d'elle. Elle abandonne le chapelet pour s'accrocher à la main de son aînée. Elle tourne la tête et la contemple. Ses yeux sont tout bouffis. À son tour, Élisabeth se tourne vers sa soeur et elles s'observent longuement. Elles partagent certains traits semblables : de grands yeux bleus, un petit nez retroussé, des lèvres à baiser, roses et charnues. Par contre. Marianne mesure quelques centimètres de moins et a la peau plus pâle ce qui lui donne un air de jeune fille. Toutes les deux sont très jolies à leur manière.
Dans le ciel, les mouettes s'éloignent enfin. Bientôt, le curé se tait à son tour et la foule est plongée dans le silence. Toutes les respirations s'interrompent. C'est le moment pour chacun de déposer en guise d'adieu une rose sur le cercueil. Marianne sait qu'elle doit s'avancer la première. On baisse la tête respectueusement. Élisabeth tend une fleur à sa soeur. Dans un geste résigné, cette dernière la prend et en hume le parfum. Il lui rappelle le rosier qu'avait planté Antoine l'été dernier.
Elle reste immobile. On entend toussoter d'impatience. Quelques murmures désapprobateurs parviennent jusqu'à la veuve qui fait mine de ne rien remarquer. Elle sent une main la pousser vers le cercueil.
- Vas-y, lui dit tout bas sa soeur. Tu crées un malaise.
Dans un coin, le maire bâille sans retenue. Marianne fronce les sourcils. Autour d'elle, on la presse du regard.
- C'est à ton tour, insiste Élisabeth. Va poser ta rose sur le cercueil.
Une mouette crie très fort au loin. Une brise se lève et caresse les cheveux de la veuve. La nature s'anime : les branches des pins se balancent doucement, les brins d'herbe se courbent, le vent ride les flaques d'eau. L'automne manifeste sa présence. La jeune femme frissonne. Même le ciel qui se dégage lui paraît d'ardoise comme si les nuages l'avaient taché. L'atmosphère s'alourdit. À présent, tout le monde retient son souffle.
Profitant de l'immobilité de la foule, une mouette solitaire s'approche. Elle cerne les lieux au vol pendant quelques secondes en décrivant de grands cercles, puis plonge. Au départ, elle semble planer, entraînée par le vent, mais son rythme s'accélère rapidement. Elle se dirige directement vers l'un des pins quand le vent redouble d'intensité et la dévie de sa trajectoire. Elle s'écrase finalement sur le cercueil d'Antoine. Les villageois poussent une exclamation d'horreur. Le cadavre de l'animal glisse jusqu'au sol en laissant derrière lui une longue traînée de sang et de plumes.
La rose échappe des mains de Marianne. Ses yeux hésitent entre la carcasse et le cercueil ensanglanté. Alors que plus tôt, elle ne parvenait plus à bouger, à présent, tout son corps tremble. Quelques sons aigus s'échappent de sa bouche béante. Élisabeth ne parvient plus à la rassurer. Elle-même est muette de stupeur. La nature se tait. Aucun autre oiseau ne s'approche.
Quelques villageois tournent le dos et s'éloignent. Certains rentrent à la maison. Personne ne parle. Que dire de toute façon ? Quoi de plus à ajouter ? Élisabeth dépose sa main sur l'épaule de sa soeur, mais ne dit rien. À son tour, elle s'en va. Marianne s'accroche à son chapelet. Elle tombe à genoux et lève les yeux au ciel.
Les mouettes sont parties.

Jonjon21 03/10/2005 @ 18:56:16
C'est un texte pour mon cours de création littéraire. Thème libre.

Jonjon21 03/10/2005 @ 20:08:09
"lisez-moiiiiii", dit le texte.

Yali 03/10/2005 @ 20:11:29
"lisez-moiiiiii", dit le texte.

Perso j'arrive, mais plus tard :-)

Yali 03/10/2005 @ 21:25:17
Sur la forme
Ça manque d’unité, trop de diversité dans l’action à mon goût, trop de descriptions diverses, de sujets annexes qui font que l’on ne se canalise pas sur l’essentiel, les sœurs. Tu sèmes beaucoup, ici des mouettes et là des flaques d’eau (me suis dit, tiens pas la mer avec des mouettes ?). Pour les dialogues et qui sont peu, (je suis franc), je n’y crois pas un seul instant ! Qui parle comme ça Jonjon ?
Je comprends pas le titre ?
Sur le fond :
J’aime cette idée de ne rien raconter vraiment, de partager un bout de la vie (mort aussi) d'âmes simplement humaines.

Jonjon21 03/10/2005 @ 21:34:06
Sur la forme
Ça manque d’unité, trop de diversité dans l’action à mon goût, trop de descriptions diverses, de sujets annexes qui font que l’on ne se canalise pas sur l’essentiel, les sœurs. Tu sèmes beaucoup, ici des mouettes et là des flaques d’eau (me suis dit, tiens pas la mer avec des mouettes ?). Pour les dialogues et qui sont peu, (je suis franc), je n’y crois pas un seul instant ! Qui parle comme ça Jonjon ?
Je comprends pas le titre ?
Sur le fond :
J’aime cette idée de ne rien raconter vraiment, de partager un bout de la vie (mort aussi) d'âmes simplement humaines.


Le sujet principal n'est pas les soeurs... du tout. Et ce n'est pas un récit. C'est un tableau. Une critique sociale.

Mentor 03/10/2005 @ 21:40:18
"Carcasse"? Celle de la mouete sans doute, qui s'écrase et glisse à tere. Non?
Pas très attrayant comme texte Jonjon, non, pas très!
Bien écrit, avec une mise en situation efficace. On y est, on est dans l'assemblée, on est gênés, un peu, impatients, aussi, énervés enfin.
Les sentiments profonds de la veuve ne m'apparaissent pas clairement, et ça, ça me gêne un peu. On pourrait croire qu'elle n'est quasiment pas concernée par tout ça. C'est ce que tu voulais faire passer Jonjon? Mais alors: pourquoi? Qui était cet Antoine pour que sa mort touche si peu de monde, même pas sa femme?
Mes questions resteront sans réponse, hélas, je le sens.
Mais t'en fais pas, même si ce texte ne marquera pas un tournant dans l'histoire de la Littérature, il n'est pas mauvais du tout...
;-)

Kilis 03/10/2005 @ 21:42:28
ecoute JonJOn je veux bien te lire mais si tu n'acceptes pas les commentaires des lecteurs, ça ne t'avanceras pas à grand chose, hein,
Si on fait l'effort de te lire et qu'on prend la peine de commenter on peut ouvrir le débat, discuter mais dire: mais non, c'est pas ça que j'ai voulu dire... c'est un peu mépriser le lecteur, non? S'il a compris ça alors que tu voulais exprimer autre chose c'est à toi de réviser ta copie, non?

Saint Jean-Baptiste 03/10/2005 @ 21:45:37
C'est bien, Jonjon !
Mais d'une manière générale, je pense que les sujets tristes sont plus facile à exploiter. Trop facile peut-être ?
Cette scène de cimetière est un peu banale. De plus, je trouve que le style est par trop télégraphique : trop de phrases trop courtes.
(mais ça, c'est une question de goût).
Heureusement, tu as imaginé cette mouette surréaliste qui sauve le récit.
Finalement, si tu t'essayais dans un genre plus joyeux tu aurais sans doute plus de succès.
Alors, à la prochaine !

Yali 03/10/2005 @ 21:53:44
Le sujet principal n'est pas les soeurs... du tout. Et ce n'est pas un récit. C'est un tableau. Une critique sociale.

Une critique sociale sans époque ni lieu ? Ici rien ne me précise quand ni où. Ce pourrait être en 18éme comme au 20éme, en Irlande comme a Tahiti
Jonjon, faut jouer le jeu, tu demandes des avis, je t'en file un, et en aucun cas il est parfait, je te livre mon ressenti, c'est tout ;-)

Sahkti
avatar 03/10/2005 @ 22:13:06
Bon, Jonjon, tu demandes, je te dis... je n'aime pas. Pour plusieurs raisons. Tout d'abord, le coup de la mouette, pourquoi l'ai-je senti venir depuis le début? Il y avait l'hésitation entre la mouette qui fait un piqué et se ramasse ou le caca de mouette qui s'écrase sur le cercueil ou la face de Marianne. Dans les deux cas, du téléphoné attendu et un brin facile à mes yeux.
Ensuite la scène n'est pas trop crédible parce que figée, trop narrative, racontée un peu à la 6-4-2, à savoir qu'il manque une ambiance, de vraies émotions d'enterrement. Et puis cette phrase "Tu crées un malaise". A un enterrement, ça, je n'y crois pas une seconde. Surtout si la femme en question est l'héroïne du deuil qui se vit. On ne va pas lui dire cela.
Ni humour ni malheur dans ton texte, il ne se dégage pas vraiment de vie ou quoi que ce soit qui permette de se situer.

Bolcho
avatar 03/10/2005 @ 22:55:12
Allez Jonjon, courage. Tu as quand même trouvé un lecteur séduit par ton texte : moi. Je n’ai pas grand-chose à lui reprocher. Il y a une atmosphère, une saison, un tableau effectivement. Parmi les choses que j’aime bien, il y a cette quasi non existence du reste de l’assistance qui n’est manifestement là que pour le décor, comme dans presque tout enterrement qui se respecte et qui charrie sa cargaison de conventions sociales en même temps que de solidarité ou quelque chose du genre. Et les idées de la veuve qui se perdent un peu ailleurs, elles me paraissent assez justes elles aussi (« tu crées un malaise »). Pas gêné non plus par le côté peut-être un peu prévisible de la fin comme le dit Sahkti. Pourquoi faudrait-il toujours surprendre le lecteur ? L’amener en douceur là où on veut qu’il aille, c’est aussi jouer avec lui. La surprise de la non surprise, c’est aussi une surprise. J’sais pas si je suis très clair, là.
Bref, tu as quand même marqué un point…

Jonjon21 04/10/2005 @ 14:14:44
Je ne suis pas fâché. Pourquoi vous dites tous que je suis fâché? Je disais simplement que si on perçoit que les figures centrales de l'histoire sont Marianne et Isabelle c'est qu'on ne l'a pas lu de la "meilleure" façon. En ce qui concerne l'époque, je ne crois pas que ce soit important de situer l'histoire. Ma critique sociale est évidemment une critique du XXIe siècle... je ne vais pas perdre mon temps à critiquer le XVIIIe. :-P Et puis... jsuis vraiment désolé que très peu de gens aient apprécié... j'étais vraiment fier du résultat... ah bien... tant pis!

Jonjon21 04/10/2005 @ 14:17:38
Et la surprise dont tout le monde parle...
Je ne crois pas que ce soit la chute de la mouette...
Je crois que c'est le départ des autres mouettes.
Mais ce n'est pas une surprise du genre : "WOW! QUELLE SURPRISE", mais plutôt... "Ouf! C'est bien triste!" ou qqc comme ça... enfin, c'est ce que j'espérais...
Je défends pas mes textes comme ça d'habitude, désolé...

Jonjon21 04/10/2005 @ 14:41:07
Mais sérieusement, merci pour les commentaires. Quoi que vous pensiez, je les prends très au sérieux.

Loupbleu 04/10/2005 @ 16:45:56
Ton texte n'est pas mal, mais j'ai l'impression qu'il ne fonctionne pas très bien. Voilà quelques trucs, ce ne sont pas des critiques à vrai dire, mais des axes de réflexions sur ton texte (tu en fais ce que tu veux !).

Sur le fond, c'est une idée surprenante et pas mal. Critique sociale, je me demande... Finalement, le texte est centré autour de la mouette qui s'écrase (ça c'est une image forte !) et je pense qu'il faudrait recentrer là-dessus, pas mal de descriptions périphériques détournent un peu notre attention. Je suis pas sûr d'avoir vu ce que tu voulais faire passer. Peut-être trop de liberté laissée au lecteur à mon goût.

Concernant le style : je sais que c'est une façon, d'écrire court, même souvent recommandée, mais en l'occurrence, je trouve que c'est un peu trop, ça rend un rythme trop haché et trop monotone.

Il y a pas mal d'images qui font aussi presque un peu "cliché" (cri strident de la mouette, la larme et les yeux bouffis, etc.), rien de rédhibitoire, mais peut-être ça gagnerait à ce que tu imagines d'autres formules plus personelles.

Enfin, un dernier truc (bon, là c'est un peu mon petit délire, mais après tout...), je pense que pour décrire la scène comme un tableau, on pourrait imaginer de faire circuler le regard du lecteur comme notre oeil circulerait sur une toile (trouver un élément - par exemple un regard - qui fait passer de l'enterrement aux mouettes, etc.).

Bref, après ces remarques, je répète que ton texte est plein d'idées, ça n'est pas mauvais du tout, et bravo de t'être attaqué à un thème complexe comme ça !

Tistou 07/10/2005 @ 16:14:57
Ben moi il m'a plu ce texte. Il m'a plu par sa capacité à nous plonger dans une atmosphère, à restituer une ambiance, d'enterrement, à raconter une tranche de quelque chose.
Je le prends en bloc, pour ce qu'il est : un texte, pas une histoire. Juste un texte qui vise à essayer de nous faire ressentir quelque chose. Et j'ai ressenti Jonjon.
Tu as de la chance d'étudier dans cette matière !

Jonjon21 07/10/2005 @ 19:45:28
Merci pour tous les commentaires. Je vous ferai part de ce que mon prof en a pensé, lui. :)

Sahkti
avatar 07/10/2005 @ 19:46:18
Merci pour tous les commentaires. Je vous ferai part de ce que mon prof en a pensé, lui. :)
Ha oui, volontiers, ce serait intéressant ça!

Zou 18/10/2005 @ 15:49:19
Et voilà, Jonjon21 nous a annoncé sur Conv et Bad avoir reçu la note de 8,5/10 pour cette "nouvelle". Donc je fais remonter. C'est ma contribution, moi qui n'avait pas critiqué !

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