Merci pour les explications Stavro, c'est compliqué mais intéressant.
Pour la pensée unique, "Elle possède en effet un avantage rhétorique qui consiste à renverser la charge de la preuve : au lieu d'avoir à développer une vision cohérente et de convaincre qu'elle peut être mise en œuvre de manière réaliste, on accuse l'adversaire d'être incapable de penser à une alternative à sa solution actuelle. De ce fait, il n'existe plus aujourd'hui « une seule » pensée unique mais plusieurs. Gustave Parking dit même dans une boutade : « Tout le monde est d'accord pour critiquer la pensée unique"
in http://fr.wikipedia.org/wiki/Pens%C3%A9e_unique
Pour la pensée unique, "Elle possède en effet un avantage rhétorique qui consiste à renverser la charge de la preuve : au lieu d'avoir à développer une vision cohérente et de convaincre qu'elle peut être mise en œuvre de manière réaliste, on accuse l'adversaire d'être incapable de penser à une alternative à sa solution actuelle. De ce fait, il n'existe plus aujourd'hui « une seule » pensée unique mais plusieurs. Gustave Parking dit même dans une boutade : « Tout le monde est d'accord pour critiquer la pensée unique"
in http://fr.wikipedia.org/wiki/Pens%C3%A9e_unique
Bien le bonjour. Voici quelques aspects du Monde Diplo de novembre. Plein de choses intéressantes je trouve. J'espère ne pas les avoir trop amochées...
« Amazon, l'envers de l'écran », Jean-Baptiste Malet, journaliste
Le fondateur et président-directeur général d'Amazon, M. Jeffrey Preston (« Jeff ») Bezos, libertarien et maniaque, inspire aux journalistes des portraits d’autant plus flatteurs qu’il a investi en août dernier 250 millions d’euros — 1 % de sa fortune personnelle — dans le rachat du vénérable quotidien américain The Washington Post.
En Europe, Amazon a choisi l’Allemagne comme tête de pont. Les travailleurs y ont la vie dure. Les ouvriers sont astreints au silence par le règlement intérieur. Tous, considérés comme des chapardeurs potentiels, subissent des fouilles minutieuses assurées par des vigiles : ils passent par des portiques de sécurité lors de leur sortie définitive ou de leur pause, ainsi raccourcie par ce fastidieux contrôle qui génère de longues files d’attente.
La spécificité du supermarché en ligne consiste à permettre à des commerçants, à travers sa plate-forme Marketplace, de proposer leurs produits à la vente sur son site, en concurrence directe avec sa propre marchandise. Ce système, efficace pour le consommateur, enrôle les libraires dans la promotion du géant qui vampirise leur clientèle et détruit leur activité.
Or, une librairie de quartier génère dix-huit fois plus d’emplois que la vente en ligne.
La production continue de colis échoit à une main-d’œuvre non qualifiée, recrutée au seul motif qu’elle coûte actuellement moins cher que des robots. Mais plus pour longtemps...
Dans l’unité dite de « production », les pickers (« ramasseurs »), guidés par leur scanner, arpentent les étagères. Afin de prélever inlassablement des articles, ils marchent plus de vingt kilomètres par prise de poste.
En fin d’année, chaque entrepôt a massivement recours à une main-d’œuvre intérimaire afin d’expédier les commandes des fêtes : chômeurs espagnols, grecs, polonais, ukrainiens, portugais convergent en autocar des quatre coins de l’Europe, enrôlés par des agences d’intérim. Et les managers diffusent de la musique à plein volume dans l’entrepôt pour exciter les travailleurs.
Hostiles aux syndicats, les cadres d’Amazon imposent des cadences épuisantes. Et en contrepartie, qu’est-ce qu’on propose aux ouvriers ? Du “have fun” : des tombolas pendant les pauses, des distributions de chocolats, de bonbons... les salariés sont régulièrement invités à venir pointer costumés en sorcières ou en basketteurs. Pendant ce temps, la productivité reste bien sûr enregistrée par informatique, les managers font même faire collectivement des échauffements et des étirements avant nos prises de poste.
Chose inouïe, le règlement intérieur impose que la productivité individuelle soit en hausse constante.
L’ambiance de travail est délétère ; tout le monde se surveille. Et les intérimaires sont traités comme de la viande. Forcément, les accidents du travail sont nombreux.
« La Russie est de retour sur la scène internationale », Jacques Lévesque, docteur en sciences politiques, Montréal
Au cours des derniers mois, le président russe Vladimir Poutine a remporté deux succès majeurs sur la scène internationale. Au mois d’août, il a offert l’asile à l’informaticien américain Edward Snowden, auteur de fuites retentissantes sur les systèmes de surveillance numérique de l’Agence nationale de sécurité (National Security Agency, NSA). Il a alors pu se targuer du fait que la Russie était le seul Etat capable de résister aux exigences de Washington.Mais le véritable succès de M. Poutine, d’une portée bien supérieure, a été remporté dans le dossier syrien. Grâce à la promesse qu’il a arrachée à M. Bachar Al-Assad de détruire, sous contrôle international, toutes les armes chimiques de son pays, M. Obama a en effet décidé de renoncer « provisoirement » aux bombardements punitifs qu’il envisageait. M. Poutine apparaît aujourd’hui comme l’homme d’Etat qui est parvenu à éviter une expédition militaire aux conséquences redoutées. Pour M. Poutine et son entourage, une débâcle de l’armée syrienne ferait de ce pays une base arrière aux combattants qui opèrent en Russie.
Mais Moscou cherche surtout à recouvrer une place et un rôle dans l’ordre international postsoviétique. De leur côté, les Etats-Unis cherchent à empêcher la réémergence de la Russie comme puissance un tant soit peu importante. Les partisans d’une telle analyse en voient la preuve dans les élargissements successifs de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) vers les pays baltes et plusieurs pays de l’Est, et dans la volonté américaine d’y inclure la Géorgie et l’Ukraine.
En s’opposant à toute opération contre la Syrie, la Russie a constamment invoqué le précédent libyen de 2011. Elle s’était abstenue lors du vote de la résolution 1973, dont le but proclamé était de protéger les populations, mais qui a été détournée pour justifier une intervention militaire et le renversement de Mouammar Kadhafi.
Depuis 1996, l’objectif central et officiel de la politique extérieure est de renforcer la tendance à la multipolarité dans le monde, afin de réduire graduellement l’unilatéralisme américain. La Chine est ainsi devenue le premier de ses partenaires stratégiques. La concertation des deux pays au Conseil de sécurité est permanente, notamment sur le dossier syrien, tout comme elle l’a été sur ceux de l’Iran, de la Libye ou de la guerre d’Irak de 2003. La coopération n’a cessé de croître, tant sur le plan économique (exportation du pétrole et des armes russes) que politique et militaire : quasiment chaque année ont lieu des manœuvres et des exercices conjoints impliquant des forces aériennes, terrestres et navales.
Aujourd'hui, la Russie s'active à retisser un dialogue amorcé entre M. Obama et le nouveau président iranien.
« Le traité transatlantique, un typhon qui menace les Européens », Lori Wallach, directrice de Public Citizen's Trade Watch, Washington
L’accord de partenariat transatlantique (APT) négocié depuis juillet 2013 par les Etats-Unis et l’Union européenne prévoit que les législations en vigueur des deux côtés de l’Atlantique se plient aux normes du libre-échange établies par et pour les grandes entreprises européennes et américaines, sous peine de sanctions commerciales pour le pays contrevenant. S’il devait entrer en vigueur, les privilèges des multinationales prendraient force de loi et ses dispositions ne pourraient être amendées qu’avec le consentement unanime des pays signataires. Il dupliquerait en Europe l’esprit et les modalités de son modèle asiatique, l’accord de partenariat transpacifique (Trans-Pacific Partnership, TPP).
Parce qu’elles visent à brader des pans entiers du secteur non marchand, les négociations autour de l’APT et du TPP se déroulent derrière des portes closes. Instruction a été donnée de laisser journalistes et citoyens à l’écart des discussions. L’impérieuse volonté de soustraire le chantier du traité américano-européen à l’attention du public se conçoit aisément. En effet, les élus devront redéfinir de fond en comble leurs politiques publiques de manière à satisfaire les appétits du privé dans les secteurs qui lui échappaient encore en partie : sécurité des aliments, normes de toxicité, assurance-maladie, prix des médicaments, liberté du Net, protection de la vie privée, énergie, culture, droits d’auteur, ressources naturelles, formation professionnelle, équipements publics, immigration... Pas un domaine d’intérêt général qui ne passe sous les fourches caudines du libre-échange institutionnalisé. Il est d’ores et déjà stipulé que les pays signataires assureront la « mise en conformité de leurs lois, de leurs règlements et de leurs procédures » avec les dispositions du traité.
Trois mille trois cents entreprises européennes sont présentes sur le sol américain par le biais de vingt-quatre mille filiales, dont chacune peut s’estimer fondée un jour ou l’autre à demander réparation pour un préjudice commercial. De leur côté, les pays membres de l’Union européenne se verraient exposés à un risque financier plus grand encore, sachant que quatorze mille quatre cents compagnies américaines disposent en Europe d’un réseau de cinquante mille huit cents filiales. Au total, ce sont soixante-quinze mille sociétés qui pourraient se jeter dans la chasse aux trésors publics.
Cela signifie que les pouvoirs publics devront mettre la main à la poche si leur législation a pour effet de diminuer la valeur d’un investissement, y compris lorsque cette même législation s’applique aussi aux entreprises locales. Nulle contrepartie de la part des multinationales : elles n’ont aucune obligation à l’égard des Etats et peuvent engager des poursuites où et quand cela leur chante. On a pu voir récemment des sociétés européennes engager des poursuites contre l’augmentation du salaire minimum en Egypte ou contre la limitation des émissions toxiques au Pérou. Quant au géant de la cigarette Philip Morris, incommodé par les législations antitabac de l’Uruguay et de l’Australie, il a assigné ces deux pays devant un tribunal spécial.
Il n’y a pas de limite aux pénalités qu’un tribunal peut infliger à un Etat au bénéfice d’une multinationale. Il y a un an, l’Equateur s’est vu condamné à verser la somme record de 2 milliards d’euros à une compagnie pétrolière (7). Même lorsque les gouvernements gagnent leur procès, ils doivent s’acquitter de frais de justice et de commissions diverses qui atteignent en moyenne 8 millions de dollars par dossier, gaspillés au détriment du citoyen. Moyennant quoi les pouvoirs publics préfèrent souvent négocier avec le plaignant que plaider leur cause au tribunal. L’Etat canadien s’est ainsi épargné une convocation à la barre en abrogeant hâtivement l’interdiction d’un additif toxique utilisé par l’industrie pétrolière.
Les multinationales se montrent d’une remarquable franchise dans l’exposé de leurs intentions. Par exemple sur la question des OGM, l’Association nationale des confiseurs n’y est pas allée par quatre chemins : « L’industrie américaine voudrait que l’APT avance sur cette question en supprimant la labellisation OGM et les normes de traçabilité. ». Le géant Monsanto, s’indigne pour sa part que des produits contenant des OGM et vendus aux Etats-Unis puissent essuyer un refus sur le marché européen. Les normes de qualité dans l’alimentation sont elles aussi prises pour cible. L’industrie américaine de la viande entend obtenir la suppression de la règle européenne qui interdit les poulets désinfectés au chlore. A l’avant-garde de ce combat, le groupe propriétaire de la chaîne de restauration rapide Kentucky Fried Chicken (KFC).
Il en va de même avec les gaz à effet de serre. L’organisation Airlines for America (A4A), bras armé des transporteurs aériens américains, a établi une liste des « règlements inutiles qui portent un préjudice considérable à [leur] industrie » et que l’APT, bien sûr, a vocation à rayer de la carte. Au premier rang de cette liste figure le système européen d’échange de quotas d’émissions, qui oblige les compagnies aériennes à payer pour leur pollution au carbone. Bruxelles a provisoirement suspendu ce programme ; A4A exige sa suppression définitive au nom du « progrès ».
En somme, il s’agit purement et simplement de rayer le mot « régulation » de la carte.
Côté américain, on espère surtout que l’APT enterrera pour de bon le projet européen de taxe sur les transactions financières. L’affaire paraît d’ores et déjà entendue, la Commission européenne ayant elle-même jugé cette taxe non conforme aux règles de l’OMC. Dans la mesure où la zone de libre-échange transatlantique promet un libéralisme plus débridé encore que celui de l’OMC, et alors que le Fonds monétaire international (FMI) s’oppose systématiquement à toute forme de contrôle sur les mouvements de capitaux, la chétive « taxe Tobin » n'inquiète plus grand monde aux Etats-Unis.
Les Etats signataires se verraient contraints de soumettre leurs services publics à la logique marchande.
Les artisans de l’APT admettent eux-mêmes que leur objectif premier n’est pas d’alléger les contraintes douanières, de toute façon insignifiantes, mais d’imposer « l’élimination, la réduction ou la prévention de politiques nationales superflues », étant considéré comme « superflu » tout ce qui ralentit l’écoulement des marchandises, comme la régulation de la finance, la lutte contre le réchauffement climatique ou l’exercice de la démocratie.
Curieusement, presque toutes les études sur l’APT ont été financées par des institutions favorables au libre-échange ou par des organisations patronales.
« Le Venezuela se noie dans son pétrole », Gregory Wilpert, sociologue
Files devant les magasins, économie parallèle, coupures d'eau et d'électricité : le Venezuela, l'un des plus gros producteurs de pétrole du monde, va mal.
Avec l'arrivée de Chavez, l'argent du pétrole a été affecté à des problèmes sociaux, ce qui a nécessité une politique de contrôle des changes pour freiner la fuite des capitaux.
Cette politique a permis aux Vénézuéliens de consommer 50 % de calories de plus qu’en 1998, tout en réduisant les inégalités bien plus vite qu’ailleurs dans la région. Mais la redistribution de la rente pétrolière aux pauvres présentait évidemment un risque inflationniste, puisqu’en dopant la consommation intérieure plus vite qu’on n’accroît la production, on provoque mécaniquement une hausse des prix.
La gageure qui consiste à bâtir le socialisme dans un seul pays, quand le capitalisme gouverne partout ailleurs, ne favorise pas les desseins du régime bolivarien. Le Chili du début des années 1970 et le Nicaragua des années 1980 se sont heurtés au même obstacle. Dans ces deux pays, comme au Venezuela, la volonté politique de s’affranchir des lois du capitalisme a provoqué une fuite massive de capitaux, créant une instabilité face à laquelle les gouvernants se sont retrouvés démunis. Le contrôle des prix et des taux de change permet certes, dans une certaine limite, de remédier à cette contre-offensive, mais il crée d’autres problèmes d’ampleur, comme les pénuries.
Pour protéger l'industrie locale le gouvernement a décidé de limiter les importations aux produits uniquement fabriqués à l’étranger ; mais cette condition s’avère souvent intenable. Les aliments de base sont pour la plupart produits au Venezuela, mais en quantité insuffisante pour satisfaire la demande.
Les effets pervers du contrôle des changes ont encore empiré depuis début 2013. La première raison, vraisemblablement, en est l’initiative concertée des milieux d’affaires favorables à l’opposition pour exacerber les difficultés économiques du pays. A de multiples reprises au cours de cette année, les autorités ont découvert des hangars remplis jusqu’au plafond de bidons d’huile de cuisine et d’autres denrées alimentaires de base, manifestement soustraites au circuit de vente pour aggraver les pénuries.
En fin de compte, le système de contrôle des changes, outil d’une politique souveraine et anticapitaliste, se retourne à l’avantage des Vénézuéliens les plus riches. Les privilégiés qui ont accès au marché des changes officiel empochent des bénéfices exorbitants en acquérant des marchandises au taux légal pour les revendre aux prix vertigineux du marché noir.
La seule solution pour stopper l’évaporation des capitaux consisterait sans doute à réaffirmer le contrôle de l’Etat sur l’économie, au moyen par exemple d’une nationalisation totale du secteur bancaire ou d’un contrôle plus rigoureux des importations.
« Faillite de l'Union européenne en Palestine », Laurence Bernard, journaliste
L’Union n’a jamais pu, ou voulu, appliquer les déclarations et résolutions accumulées depuis décembre 2009 et exhortant le gouvernement israélien à « mettre immédiatement fin à toutes les activités d’implantation, à Jérusalem-Est et dans le reste de la Cisjordanie, y compris l’extension naturelle des colonies, et à démanteler toutes les colonies de peuplement sauvages installées depuis mars 2001 ».
Pourtant, elle a les moyens de le faire : avec un volume d’échanges de près de 30 milliards d’euros par an, l’Europe représente le premier partenaire commercial d’Israël, et un quart de ses exportations. L’Union pourrait ainsi menacer Tel-Aviv de rétorsions.
L’Union est aussi en mesure d’agir sur le commerce des armes avec Israël, qui continue de croître en dépit du code de conduite européen interdisant tout commerce d’équipement militaire avec des autorités « faisant usage de répression intérieure, d’agression internationale ou contribuant à l’instabilité régionale ». Les ventes d’armes israéliennes dans le monde ont atteint en 2012 le niveau record de 5,3 milliards d’euros, ravissant ainsi la quatrième place au palmarès des exportateurs d’armes à... la France.
Il y a un an, l’Union européenne obtenait le prix Nobel de la paix. Peut-être serait-il temps qu’elle s’en souvienne ?
« La Cour pénale internationale en accusation », Francesca Maria Benvenuto, avocate, docteure en droit international pénal à Naples
« Dix ans de lutte contre l’impunité », proclame fièrement le site Internet de la Cour pénale internationale (CPI). Depuis son entrée en vigueur, en 2002, ce tribunal d’un genre nouveau juge les personnes accusées de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, ou encore de crimes d’agression.
Accord international classique, le statut de Rome n’oblige que les pays qui l’ont accepté. Trois membres permanents du Conseil de sécurité, les Etats-Unis, la Russie et la Chine, ne l’ont toujours pas ratifié. Washington craint la mise en cause de ses soldats engagés dans des opérations de maintien de la paix. Moscou et Pékin redoutent des procédures liées à la Tchétchénie et au Tibet. Pour des motifs semblables concernant la Palestine, Israël n’a pas non plus reconnu la CPI.
Mais ce qui réduit encore davantage la marge de manœuvre de la Cour est le ius vitae ac necis (« droit de vie et de mort ») que le Conseil de sécurité détient sur elle. Il peut suspendre l’intervention, ou au contraire étendre la juridiction de la CPI à des Etats non parties (à travers un referral). Ce fut le cas pour le Soudan en 2003 et pour la Libye de Mouammar Kadhafi en 2011. L’action du Conseil se révèle donc éminemment politique et on y voit aisément la « loi des vainqueurs », une justice faite sur mesure pour les puissants.
« En Louisiane, prisons cherchent prisonniers », Maxime Robin, journaliste
En Louisiane, faire un « chèque en bois » demeure passible de dix ans d’emprisonnement, et la peine plancher pour un cambrioleur récidiviste est toujours de vingt-quatre ans incompressibles. Le taux d’incarcération y a doublé en vingt ans, atteignant un niveau que l’on ne connaît nulle part ailleurs sur le globe : un homme sur quatre-vingt-six, soit le double de la moyenne nationale, et treize fois plus qu’en Chine.
On crée donc des prisons privées.
Ces établissements créent des emplois, et la population rurale, très affectée par la crise du coton, en dépend de manière directe : l’emprisonnement est devenu un business.
Pour nombre d’habitants, la meilleure perspective d’emploi est de devenir gardien : mal payé (8 dollars de l’heure, soit environ 6 euros), ce travail offre tout de même une bonne retraite.
Le taux d’occupation doit se maintenir au plus haut afin d’assurer un retour sur investissement maximum.
L’Etat n’a construit aucune prison depuis vingt-cinq ans, et ces pénitenciers de campagne low cost abritent aujourd’hui plus de la moitié des condamnés de Louisiane. Les dépenses par détenu y sont réduites au minimum, ce qui se traduit par des conditions de vie déplorables. Après les dépenses d’entretien, les salaires des gardiens et les profits pour le shérif, il ne reste plus grand-chose pour les prisonniers qui dorment dans de vastes dortoirs de plusieurs dizaines de lits, jusqu’à quatre-vingts par dortoir.
La durée moyenne des séjours y est de huit ans et demi. sans espoir de formation. Dans les vieilles prisons d’Etat, les détenus bénéficient d’une aide psychologique et médicale, de loisirs et de programmes de réinsertion par le travail. Rien de tout cela n’existe dans les établissements des shérifs. Avec les recettes de leur prison, les shérifs — élus du peuple aux Etats-Unis — investissent dans du matériel neuf pour leurs escouades : voitures, armes, ordinateurs, gilets pare-balles…
« L'effet Manet », Pierre Bourdieu, sociologue
Dans un atelier de peinture sous le Second Empire, les élèves sont entre 18 et 25 par classe et travaillent de 8 ou 9h jusqu'à 16h, horaire caractéristique des institutions totales de type scolaire. La hiérarchie y est omniprésente. C'est aussi un appel à l'émulation.
Dès l’époque de Manet, on voit apparaître des imposteurs qui, ayant compris avant les autres la révolution en cours, opèrent une conversion au moins apparente et cumulent, pendant un certain temps, les profits de la conservation et ceux de la conversion. Dans tous les champs, par exemple, dans le champ de la haute couture, vous avez des révolutionnaires comme André Courrèges, et puis vous avez des arrangeurs comme Yves Saint Laurent. Dans tous les domaines, ce sont des gens qui, en général, viennent après, qui comprennent ce qui s’est passé et qui savent faire une version soft de la révolution hard, ce qui fait qu’ils ont beaucoup de profit. Dès le moment où la révolution symbolique est en marche, il y a place pour l’imposture de la révolution, le faire-semblant de la révolution. (…)
Il y a le célèbre tableau de Manet, le Déjeuner sur l'herbe, qui a fait scandale.
L’hérésiarque qui a produit le tableau produit un effet de scandale, rompt un ordre symbolique, l’accord entre les structures cognitives et les structures sociales qui est au fondement de l’expérience du monde social comme allant de soi. Les structures se présentent le plus souvent sous forme d’oppositions binaires : il y a celle entre le haut et le bas, esthétiquement, qui correspond à la hiérarchie des genres, il y a l’opposition masculin/féminin, l’opposition bourgeois/peuple, etc. Par exemple, ce qui a été vu tout de suite par un certain nombre de critiques « populaires » (c’est-à-dire de critiques écrivant dans des journaux populaires et soucieux de se faire bien voir de leur public en lui disant ce qu’il a envie d’entendre — le phénomène de l’Audimat existait déjà…), c’est le barbarisme sexuel, le fait que l’on ait des hommes bourgeois habillés et une femme nue supposée être une grisette populaire.
Et le tableau a été perçu comme trop grand (2,08m sur 2,64m) pour une scène de genre (type d'œuvre avec scène anecdotiques ou familières, situées assez bas dans la hiérarchie picturale), trop réaliste pour une scène de bain, trop public et officiel pour une image salace.
On redoute que ces artistes irresponsables qui bouleversent par exemple la hiérarchie entre le contemporain et l’ancien puissent toucher à celle du bourgeois et du peuple, etc. Cela dit, la stratégie de Manet n’est pas totalement inconsciente ; républicain, très à gauche, il voulait vraiment provoquer.
C'est pour cela qu'il commet des entorses à la perspective, qu'il met la femme dans une lumière frontale faisant disparaître le modelé, et qu'il s'interdit le procédé habituel des scènes de nus, cette euphémisation par la distanciation historique des sujets représentés (les Vénus, etc.), mais aussi par la technique. Cet effet de réalisme fait penser que c’est un pique-nique à Asnières. Si c’est un pique-nique, on s’interroge sur le modèle : pourquoi est-elle nue ? Est-ce qu’il ne se passe pas des choses troubles ?
Donc il y a transgression esthétique et transgression sexuelle. La femme est menaçante en tant qu’elle menace l’ordre symbolique et la hiérarchie des genres sexuels ; et elle menace aussi l’ordre social à travers les menaces qu’elle fait peser sur la reproduction. Et sur l’héritage. (…)
Pour comprendre une œuvre, surtout une œuvre de rupture, il est important de prendre en compte l’effet social qu’elle a produit. Je pense qu’on ne peut pas, quand on fait l’histoire des œuvres ou une histoire des actions humaines, ne pas engager une philosophie de l’action.
Est-ce qu’il n’y a d’action qu’intentionnelle ? Est-ce qu’une action qui n’est pas intentionnelle est automatique ou inintelligente ?
Tout mon travail d’ethnologue puis de sociologue m’a conduit à élaborer une théorie de la pratique ayant son principe, non pas dans les intentions conscientes ou dans des préméditations, mais dans des dispositions. Une théorie de la pratique, que j’appelle dispositionnaliste qui place au principe des actions, non pas nécessairement des intentions explicites, mais des dispositions corporelles, des schèmes générateurs de pratiques qui n’ont pas besoin d’accéder à la conscience pour fonctionner.
Cette théorie dispositionnaliste est à mettre en œuvre des deux côtés, c’est-à-dire du côté du producteur et du côté du récepteur. Le producteur met en œuvre des dispositions, ce qui ne veut pas dire qu’il ne sait pas ce qu’il fait, mais seulement qu’il ne sait pas tout ce qu’il fait. Et le récepteur met en œuvre aussi des schèmes d’interprétation qui peuvent être plus ou moins accordés, et qui s’expriment dans le sentiment de scandale lorsque ces schèmes sont frustrés. La communication entre une œuvre d’art et un spectateur est une communication des inconscients beaucoup plus qu’une communication des consciences. La compréhension est un cas particulier où les schèmes investis dans une production, une pratique, une œuvre, une parole, bref, dans une production symbolique sont identiques aux schèmes que le spectateur, le récepteur ou le lecteur investit dans la réception. Dans ce cas, il y a compréhension immédiate et sentiment d’évidence, mais ce sentiment de l’évidence peut aussi être le fait du malentendu, et lorsqu’il y a trop de discordance entre les schèmes du producteur et les schèmes du récepteur, il y a sentiment de scandale, indignation, etc. (…)
A la question : « Qui a peint Le Déjeuner sur l’herbe ? », je réponds évidemment que c’est Manet, c’est-à-dire un individu, situé et daté, doté d’un corps, inséré socialement, etc.
Mais, du point de vue sociologique, cet individu qui a fait ce tableau n’est pas le sujet selon la tradition occidentale, c’est un habitus inséré dans un champ. Un habitus, c’est-à-dire un être biologique socialisé, doté de dispositions permanentes socialement constituées dont il faut décrire la genèse sociale.
« Comment soigner les Afghans », Pierre Micheletti, médecin envoyé spécial
Pour prendre en charge efficacement la santé des femmes, dans un pays où elles ne peuvent être soignées que par des personnes du même sexe ou n’être reçues en consultation qu’accompagnées d’un homme de la famille, la formation de toute une génération de professionnelles — agentes de santé communautaires, infirmières, médecins, sages-femmes — est primordiale. Mais les obstacles sont multiples : faibles taux de scolarisation et d’alphabétisation, résistance forte des familles à les voir s’éloigner pour recevoir un enseignement…
Lorsque cette résistance est vaincue, surgit un nouvel obstacle inattendu avec la nécessité de gérer les marhams, des chaperons masculins mandatés par les familles, frères, beaux-frères ou cousins. Ils doivent accompagner les femmes partout pendant leur formation ou sur les lieux de leur affectation professionnelle. Il faut donc eux aussi les loger et les nourrir, et, pour qu’une femme soit autorisée à occuper un poste, prévoir la présence du marham, ou lui trouver un emploi.
Autre fléau : la consommation d’opium, dont l’Afghanistan est le premier producteur mondial. On compte aujourd’hui environ un million d’usagers, dont cent cinquante mille consomment l’héroïne par injection, avec des pratiques et dans des conditions d’hygiène désastreuses. Lors du départ des Soviétiques, en 1989, la production s’élevait à mille deux cents tonnes par an ; elle a atteint six mille neuf cents tonnes en 2009. Les revenus découlant de cette culture représentent environ 60 % du produit intérieur brut (PIB) afghan.
L’attitude des talibans à l’égard des ONG internationales reste incertaine. Il est vrai que certaines ont eu une attitude qui les a clairement positionnées comme de véritables supplétifs des forces armées étrangères. Celles-là pourraient être réduites à la paralysie ou contraintes de plier bagage dans les mois à venir, dans le sillage, pour quelques-unes, de leurs mentors de la coalition internationale.
« La traque méthodique de l'internaute révolutionne la publicité », Marie Bénilde, journaliste
Des serveurs utilisés à des fins publicitaires recensent désormais nos centres d’intérêt, nos liens sur les réseaux sociaux, nos goûts culturels, les lieux que nous visitons ou encore nos achats. Bref, bien qu’il ne s’agisse jamais officiellement de ficher une population, la catégorisation peut être si précise que, même sans connaître nommément le consommateur, une marque est en mesure de tout savoir à son sujet.
Une publicité pour machine à laver envahit tous les sites que vous consultez après que vous avez cherché à connaître le prix des modèles existants ? C’est bien le signe que vous êtes tracé, à travers les fameux cookies. Google, par ailleurs, s’est fait une spécialité de cibler en fonction du contexte éditorial à travers son programme AdSense : celui-ci adresse de la publicité en fonction de la thématique présente sur la page Web consultée.
Très peu d’utilisateurs comprennent totalement — et encore moins contrôlent — l’exploitation des données utilisées pour pousser l’activité publicitaire de Facebook. Les conditions générales d’utilisation du réseau social, qui modifie régulièrement ses paramètres de confidentialité, sont généralement illisibles. Les data centers, ces parcs de serveurs qui stockent les données, sont d’ailleurs la propriété des géants californiens et échappent à tout contrôle des autorités européennes.
Soustraits à l’économie réelle par des systèmes d’évasion dans des paradis fiscaux, ces géants ne payent pratiquement pas d’impôts sur les sociétés ou échappent à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Pour 2,5 à 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires en France, les entreprises Google, Apple, Facebook et Amazon ne versent que 4 millions d’euros alors qu’elles pourraient être redevables de 500 millions d’euros si le régime fiscal leur était pleinement appliqué.
« Machiavel contre le machiavélisme », Olivier Pironet
Au début du XVIe siècle, le philosophe florentin Nicolas Machiavel a ouvert la voie à la pensée politique moderne. On associe souvent son nom à l’action de gouvernants cyniques et manipulateurs. Forgée par ses détracteurs, cette « mauvaise réputation » cache en fait un authentique théoricien de la liberté et du pouvoir populaire.
Machiavel développe une problématique essentielle. Selon lui, chaque régime repose sur l’opposition fondamentale entre deux grandes classes, ou « humeurs » (umori) sociales, qui en détermine la forme : le peuple, c’est-à-dire le commun des citoyens, et les grands, ceux qui constituent l’élite sociale, économique et politique. Les seconds, minoritaires, veulent la domination ; le premier, majoritaire, la conteste.
Pour diriger, il faut choisir un camp. Pour Machiavel, ce ne peut être que celui du peuple, « car ses buts (…) sont plus honnêtes que ceux des grands, les uns voulant opprimer, l’autre ne pas être opprimé ». La monarchie, ce principato autoritaire que Machiavel voit également dans l’oligarchie, est incapable de résoudre la question sociale.Il faut donc lui préférer un régime républicain.
Mais cette république, comme le précisent les Discours, ne peut s’appuyer que sur l’institution de la discorde civile entre les élites et la plèbe, autrement dit sur la reconnaissance politique du conflit inhérent à la cité. L’idée d’une société pacifiée est un mythe, voire une aberration. C’est pourquoi il est essentiel de mettre en place un dispositif légal par lequel le peuple puisse faire entendre ses revendications et ses droits.
Le Florentin préconise l’instauration d’une république populaire (stato popolare) fondée sur l’autorité suprême d’une assemblée au sein de laquelle le peuple peut participer, au même titre que les grands, à la direction des affaires de la cité : « Le grand nombre sert à sévir contre les grands et contre l’ambition des riches ».
« Amazon, l'envers de l'écran », Jean-Baptiste Malet, journaliste
Le fondateur et président-directeur général d'Amazon, M. Jeffrey Preston (« Jeff ») Bezos, libertarien et maniaque, inspire aux journalistes des portraits d’autant plus flatteurs qu’il a investi en août dernier 250 millions d’euros — 1 % de sa fortune personnelle — dans le rachat du vénérable quotidien américain The Washington Post.
En Europe, Amazon a choisi l’Allemagne comme tête de pont. Les travailleurs y ont la vie dure. Les ouvriers sont astreints au silence par le règlement intérieur. Tous, considérés comme des chapardeurs potentiels, subissent des fouilles minutieuses assurées par des vigiles : ils passent par des portiques de sécurité lors de leur sortie définitive ou de leur pause, ainsi raccourcie par ce fastidieux contrôle qui génère de longues files d’attente.
La spécificité du supermarché en ligne consiste à permettre à des commerçants, à travers sa plate-forme Marketplace, de proposer leurs produits à la vente sur son site, en concurrence directe avec sa propre marchandise. Ce système, efficace pour le consommateur, enrôle les libraires dans la promotion du géant qui vampirise leur clientèle et détruit leur activité.
Or, une librairie de quartier génère dix-huit fois plus d’emplois que la vente en ligne.
La production continue de colis échoit à une main-d’œuvre non qualifiée, recrutée au seul motif qu’elle coûte actuellement moins cher que des robots. Mais plus pour longtemps...
Dans l’unité dite de « production », les pickers (« ramasseurs »), guidés par leur scanner, arpentent les étagères. Afin de prélever inlassablement des articles, ils marchent plus de vingt kilomètres par prise de poste.
En fin d’année, chaque entrepôt a massivement recours à une main-d’œuvre intérimaire afin d’expédier les commandes des fêtes : chômeurs espagnols, grecs, polonais, ukrainiens, portugais convergent en autocar des quatre coins de l’Europe, enrôlés par des agences d’intérim. Et les managers diffusent de la musique à plein volume dans l’entrepôt pour exciter les travailleurs.
Hostiles aux syndicats, les cadres d’Amazon imposent des cadences épuisantes. Et en contrepartie, qu’est-ce qu’on propose aux ouvriers ? Du “have fun” : des tombolas pendant les pauses, des distributions de chocolats, de bonbons... les salariés sont régulièrement invités à venir pointer costumés en sorcières ou en basketteurs. Pendant ce temps, la productivité reste bien sûr enregistrée par informatique, les managers font même faire collectivement des échauffements et des étirements avant nos prises de poste.
Chose inouïe, le règlement intérieur impose que la productivité individuelle soit en hausse constante.
L’ambiance de travail est délétère ; tout le monde se surveille. Et les intérimaires sont traités comme de la viande. Forcément, les accidents du travail sont nombreux.
« La Russie est de retour sur la scène internationale », Jacques Lévesque, docteur en sciences politiques, Montréal
Au cours des derniers mois, le président russe Vladimir Poutine a remporté deux succès majeurs sur la scène internationale. Au mois d’août, il a offert l’asile à l’informaticien américain Edward Snowden, auteur de fuites retentissantes sur les systèmes de surveillance numérique de l’Agence nationale de sécurité (National Security Agency, NSA). Il a alors pu se targuer du fait que la Russie était le seul Etat capable de résister aux exigences de Washington.Mais le véritable succès de M. Poutine, d’une portée bien supérieure, a été remporté dans le dossier syrien. Grâce à la promesse qu’il a arrachée à M. Bachar Al-Assad de détruire, sous contrôle international, toutes les armes chimiques de son pays, M. Obama a en effet décidé de renoncer « provisoirement » aux bombardements punitifs qu’il envisageait. M. Poutine apparaît aujourd’hui comme l’homme d’Etat qui est parvenu à éviter une expédition militaire aux conséquences redoutées. Pour M. Poutine et son entourage, une débâcle de l’armée syrienne ferait de ce pays une base arrière aux combattants qui opèrent en Russie.
Mais Moscou cherche surtout à recouvrer une place et un rôle dans l’ordre international postsoviétique. De leur côté, les Etats-Unis cherchent à empêcher la réémergence de la Russie comme puissance un tant soit peu importante. Les partisans d’une telle analyse en voient la preuve dans les élargissements successifs de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) vers les pays baltes et plusieurs pays de l’Est, et dans la volonté américaine d’y inclure la Géorgie et l’Ukraine.
En s’opposant à toute opération contre la Syrie, la Russie a constamment invoqué le précédent libyen de 2011. Elle s’était abstenue lors du vote de la résolution 1973, dont le but proclamé était de protéger les populations, mais qui a été détournée pour justifier une intervention militaire et le renversement de Mouammar Kadhafi.
Depuis 1996, l’objectif central et officiel de la politique extérieure est de renforcer la tendance à la multipolarité dans le monde, afin de réduire graduellement l’unilatéralisme américain. La Chine est ainsi devenue le premier de ses partenaires stratégiques. La concertation des deux pays au Conseil de sécurité est permanente, notamment sur le dossier syrien, tout comme elle l’a été sur ceux de l’Iran, de la Libye ou de la guerre d’Irak de 2003. La coopération n’a cessé de croître, tant sur le plan économique (exportation du pétrole et des armes russes) que politique et militaire : quasiment chaque année ont lieu des manœuvres et des exercices conjoints impliquant des forces aériennes, terrestres et navales.
Aujourd'hui, la Russie s'active à retisser un dialogue amorcé entre M. Obama et le nouveau président iranien.
« Le traité transatlantique, un typhon qui menace les Européens », Lori Wallach, directrice de Public Citizen's Trade Watch, Washington
L’accord de partenariat transatlantique (APT) négocié depuis juillet 2013 par les Etats-Unis et l’Union européenne prévoit que les législations en vigueur des deux côtés de l’Atlantique se plient aux normes du libre-échange établies par et pour les grandes entreprises européennes et américaines, sous peine de sanctions commerciales pour le pays contrevenant. S’il devait entrer en vigueur, les privilèges des multinationales prendraient force de loi et ses dispositions ne pourraient être amendées qu’avec le consentement unanime des pays signataires. Il dupliquerait en Europe l’esprit et les modalités de son modèle asiatique, l’accord de partenariat transpacifique (Trans-Pacific Partnership, TPP).
Parce qu’elles visent à brader des pans entiers du secteur non marchand, les négociations autour de l’APT et du TPP se déroulent derrière des portes closes. Instruction a été donnée de laisser journalistes et citoyens à l’écart des discussions. L’impérieuse volonté de soustraire le chantier du traité américano-européen à l’attention du public se conçoit aisément. En effet, les élus devront redéfinir de fond en comble leurs politiques publiques de manière à satisfaire les appétits du privé dans les secteurs qui lui échappaient encore en partie : sécurité des aliments, normes de toxicité, assurance-maladie, prix des médicaments, liberté du Net, protection de la vie privée, énergie, culture, droits d’auteur, ressources naturelles, formation professionnelle, équipements publics, immigration... Pas un domaine d’intérêt général qui ne passe sous les fourches caudines du libre-échange institutionnalisé. Il est d’ores et déjà stipulé que les pays signataires assureront la « mise en conformité de leurs lois, de leurs règlements et de leurs procédures » avec les dispositions du traité.
Trois mille trois cents entreprises européennes sont présentes sur le sol américain par le biais de vingt-quatre mille filiales, dont chacune peut s’estimer fondée un jour ou l’autre à demander réparation pour un préjudice commercial. De leur côté, les pays membres de l’Union européenne se verraient exposés à un risque financier plus grand encore, sachant que quatorze mille quatre cents compagnies américaines disposent en Europe d’un réseau de cinquante mille huit cents filiales. Au total, ce sont soixante-quinze mille sociétés qui pourraient se jeter dans la chasse aux trésors publics.
Cela signifie que les pouvoirs publics devront mettre la main à la poche si leur législation a pour effet de diminuer la valeur d’un investissement, y compris lorsque cette même législation s’applique aussi aux entreprises locales. Nulle contrepartie de la part des multinationales : elles n’ont aucune obligation à l’égard des Etats et peuvent engager des poursuites où et quand cela leur chante. On a pu voir récemment des sociétés européennes engager des poursuites contre l’augmentation du salaire minimum en Egypte ou contre la limitation des émissions toxiques au Pérou. Quant au géant de la cigarette Philip Morris, incommodé par les législations antitabac de l’Uruguay et de l’Australie, il a assigné ces deux pays devant un tribunal spécial.
Il n’y a pas de limite aux pénalités qu’un tribunal peut infliger à un Etat au bénéfice d’une multinationale. Il y a un an, l’Equateur s’est vu condamné à verser la somme record de 2 milliards d’euros à une compagnie pétrolière (7). Même lorsque les gouvernements gagnent leur procès, ils doivent s’acquitter de frais de justice et de commissions diverses qui atteignent en moyenne 8 millions de dollars par dossier, gaspillés au détriment du citoyen. Moyennant quoi les pouvoirs publics préfèrent souvent négocier avec le plaignant que plaider leur cause au tribunal. L’Etat canadien s’est ainsi épargné une convocation à la barre en abrogeant hâtivement l’interdiction d’un additif toxique utilisé par l’industrie pétrolière.
Les multinationales se montrent d’une remarquable franchise dans l’exposé de leurs intentions. Par exemple sur la question des OGM, l’Association nationale des confiseurs n’y est pas allée par quatre chemins : « L’industrie américaine voudrait que l’APT avance sur cette question en supprimant la labellisation OGM et les normes de traçabilité. ». Le géant Monsanto, s’indigne pour sa part que des produits contenant des OGM et vendus aux Etats-Unis puissent essuyer un refus sur le marché européen. Les normes de qualité dans l’alimentation sont elles aussi prises pour cible. L’industrie américaine de la viande entend obtenir la suppression de la règle européenne qui interdit les poulets désinfectés au chlore. A l’avant-garde de ce combat, le groupe propriétaire de la chaîne de restauration rapide Kentucky Fried Chicken (KFC).
Il en va de même avec les gaz à effet de serre. L’organisation Airlines for America (A4A), bras armé des transporteurs aériens américains, a établi une liste des « règlements inutiles qui portent un préjudice considérable à [leur] industrie » et que l’APT, bien sûr, a vocation à rayer de la carte. Au premier rang de cette liste figure le système européen d’échange de quotas d’émissions, qui oblige les compagnies aériennes à payer pour leur pollution au carbone. Bruxelles a provisoirement suspendu ce programme ; A4A exige sa suppression définitive au nom du « progrès ».
En somme, il s’agit purement et simplement de rayer le mot « régulation » de la carte.
Côté américain, on espère surtout que l’APT enterrera pour de bon le projet européen de taxe sur les transactions financières. L’affaire paraît d’ores et déjà entendue, la Commission européenne ayant elle-même jugé cette taxe non conforme aux règles de l’OMC. Dans la mesure où la zone de libre-échange transatlantique promet un libéralisme plus débridé encore que celui de l’OMC, et alors que le Fonds monétaire international (FMI) s’oppose systématiquement à toute forme de contrôle sur les mouvements de capitaux, la chétive « taxe Tobin » n'inquiète plus grand monde aux Etats-Unis.
Les Etats signataires se verraient contraints de soumettre leurs services publics à la logique marchande.
Les artisans de l’APT admettent eux-mêmes que leur objectif premier n’est pas d’alléger les contraintes douanières, de toute façon insignifiantes, mais d’imposer « l’élimination, la réduction ou la prévention de politiques nationales superflues », étant considéré comme « superflu » tout ce qui ralentit l’écoulement des marchandises, comme la régulation de la finance, la lutte contre le réchauffement climatique ou l’exercice de la démocratie.
Curieusement, presque toutes les études sur l’APT ont été financées par des institutions favorables au libre-échange ou par des organisations patronales.
« Le Venezuela se noie dans son pétrole », Gregory Wilpert, sociologue
Files devant les magasins, économie parallèle, coupures d'eau et d'électricité : le Venezuela, l'un des plus gros producteurs de pétrole du monde, va mal.
Avec l'arrivée de Chavez, l'argent du pétrole a été affecté à des problèmes sociaux, ce qui a nécessité une politique de contrôle des changes pour freiner la fuite des capitaux.
Cette politique a permis aux Vénézuéliens de consommer 50 % de calories de plus qu’en 1998, tout en réduisant les inégalités bien plus vite qu’ailleurs dans la région. Mais la redistribution de la rente pétrolière aux pauvres présentait évidemment un risque inflationniste, puisqu’en dopant la consommation intérieure plus vite qu’on n’accroît la production, on provoque mécaniquement une hausse des prix.
La gageure qui consiste à bâtir le socialisme dans un seul pays, quand le capitalisme gouverne partout ailleurs, ne favorise pas les desseins du régime bolivarien. Le Chili du début des années 1970 et le Nicaragua des années 1980 se sont heurtés au même obstacle. Dans ces deux pays, comme au Venezuela, la volonté politique de s’affranchir des lois du capitalisme a provoqué une fuite massive de capitaux, créant une instabilité face à laquelle les gouvernants se sont retrouvés démunis. Le contrôle des prix et des taux de change permet certes, dans une certaine limite, de remédier à cette contre-offensive, mais il crée d’autres problèmes d’ampleur, comme les pénuries.
Pour protéger l'industrie locale le gouvernement a décidé de limiter les importations aux produits uniquement fabriqués à l’étranger ; mais cette condition s’avère souvent intenable. Les aliments de base sont pour la plupart produits au Venezuela, mais en quantité insuffisante pour satisfaire la demande.
Les effets pervers du contrôle des changes ont encore empiré depuis début 2013. La première raison, vraisemblablement, en est l’initiative concertée des milieux d’affaires favorables à l’opposition pour exacerber les difficultés économiques du pays. A de multiples reprises au cours de cette année, les autorités ont découvert des hangars remplis jusqu’au plafond de bidons d’huile de cuisine et d’autres denrées alimentaires de base, manifestement soustraites au circuit de vente pour aggraver les pénuries.
En fin de compte, le système de contrôle des changes, outil d’une politique souveraine et anticapitaliste, se retourne à l’avantage des Vénézuéliens les plus riches. Les privilégiés qui ont accès au marché des changes officiel empochent des bénéfices exorbitants en acquérant des marchandises au taux légal pour les revendre aux prix vertigineux du marché noir.
La seule solution pour stopper l’évaporation des capitaux consisterait sans doute à réaffirmer le contrôle de l’Etat sur l’économie, au moyen par exemple d’une nationalisation totale du secteur bancaire ou d’un contrôle plus rigoureux des importations.
« Faillite de l'Union européenne en Palestine », Laurence Bernard, journaliste
L’Union n’a jamais pu, ou voulu, appliquer les déclarations et résolutions accumulées depuis décembre 2009 et exhortant le gouvernement israélien à « mettre immédiatement fin à toutes les activités d’implantation, à Jérusalem-Est et dans le reste de la Cisjordanie, y compris l’extension naturelle des colonies, et à démanteler toutes les colonies de peuplement sauvages installées depuis mars 2001 ».
Pourtant, elle a les moyens de le faire : avec un volume d’échanges de près de 30 milliards d’euros par an, l’Europe représente le premier partenaire commercial d’Israël, et un quart de ses exportations. L’Union pourrait ainsi menacer Tel-Aviv de rétorsions.
L’Union est aussi en mesure d’agir sur le commerce des armes avec Israël, qui continue de croître en dépit du code de conduite européen interdisant tout commerce d’équipement militaire avec des autorités « faisant usage de répression intérieure, d’agression internationale ou contribuant à l’instabilité régionale ». Les ventes d’armes israéliennes dans le monde ont atteint en 2012 le niveau record de 5,3 milliards d’euros, ravissant ainsi la quatrième place au palmarès des exportateurs d’armes à... la France.
Il y a un an, l’Union européenne obtenait le prix Nobel de la paix. Peut-être serait-il temps qu’elle s’en souvienne ?
« La Cour pénale internationale en accusation », Francesca Maria Benvenuto, avocate, docteure en droit international pénal à Naples
« Dix ans de lutte contre l’impunité », proclame fièrement le site Internet de la Cour pénale internationale (CPI). Depuis son entrée en vigueur, en 2002, ce tribunal d’un genre nouveau juge les personnes accusées de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, ou encore de crimes d’agression.
Accord international classique, le statut de Rome n’oblige que les pays qui l’ont accepté. Trois membres permanents du Conseil de sécurité, les Etats-Unis, la Russie et la Chine, ne l’ont toujours pas ratifié. Washington craint la mise en cause de ses soldats engagés dans des opérations de maintien de la paix. Moscou et Pékin redoutent des procédures liées à la Tchétchénie et au Tibet. Pour des motifs semblables concernant la Palestine, Israël n’a pas non plus reconnu la CPI.
Mais ce qui réduit encore davantage la marge de manœuvre de la Cour est le ius vitae ac necis (« droit de vie et de mort ») que le Conseil de sécurité détient sur elle. Il peut suspendre l’intervention, ou au contraire étendre la juridiction de la CPI à des Etats non parties (à travers un referral). Ce fut le cas pour le Soudan en 2003 et pour la Libye de Mouammar Kadhafi en 2011. L’action du Conseil se révèle donc éminemment politique et on y voit aisément la « loi des vainqueurs », une justice faite sur mesure pour les puissants.
« En Louisiane, prisons cherchent prisonniers », Maxime Robin, journaliste
En Louisiane, faire un « chèque en bois » demeure passible de dix ans d’emprisonnement, et la peine plancher pour un cambrioleur récidiviste est toujours de vingt-quatre ans incompressibles. Le taux d’incarcération y a doublé en vingt ans, atteignant un niveau que l’on ne connaît nulle part ailleurs sur le globe : un homme sur quatre-vingt-six, soit le double de la moyenne nationale, et treize fois plus qu’en Chine.
On crée donc des prisons privées.
Ces établissements créent des emplois, et la population rurale, très affectée par la crise du coton, en dépend de manière directe : l’emprisonnement est devenu un business.
Pour nombre d’habitants, la meilleure perspective d’emploi est de devenir gardien : mal payé (8 dollars de l’heure, soit environ 6 euros), ce travail offre tout de même une bonne retraite.
Le taux d’occupation doit se maintenir au plus haut afin d’assurer un retour sur investissement maximum.
L’Etat n’a construit aucune prison depuis vingt-cinq ans, et ces pénitenciers de campagne low cost abritent aujourd’hui plus de la moitié des condamnés de Louisiane. Les dépenses par détenu y sont réduites au minimum, ce qui se traduit par des conditions de vie déplorables. Après les dépenses d’entretien, les salaires des gardiens et les profits pour le shérif, il ne reste plus grand-chose pour les prisonniers qui dorment dans de vastes dortoirs de plusieurs dizaines de lits, jusqu’à quatre-vingts par dortoir.
La durée moyenne des séjours y est de huit ans et demi. sans espoir de formation. Dans les vieilles prisons d’Etat, les détenus bénéficient d’une aide psychologique et médicale, de loisirs et de programmes de réinsertion par le travail. Rien de tout cela n’existe dans les établissements des shérifs. Avec les recettes de leur prison, les shérifs — élus du peuple aux Etats-Unis — investissent dans du matériel neuf pour leurs escouades : voitures, armes, ordinateurs, gilets pare-balles…
« L'effet Manet », Pierre Bourdieu, sociologue
Dans un atelier de peinture sous le Second Empire, les élèves sont entre 18 et 25 par classe et travaillent de 8 ou 9h jusqu'à 16h, horaire caractéristique des institutions totales de type scolaire. La hiérarchie y est omniprésente. C'est aussi un appel à l'émulation.
Dès l’époque de Manet, on voit apparaître des imposteurs qui, ayant compris avant les autres la révolution en cours, opèrent une conversion au moins apparente et cumulent, pendant un certain temps, les profits de la conservation et ceux de la conversion. Dans tous les champs, par exemple, dans le champ de la haute couture, vous avez des révolutionnaires comme André Courrèges, et puis vous avez des arrangeurs comme Yves Saint Laurent. Dans tous les domaines, ce sont des gens qui, en général, viennent après, qui comprennent ce qui s’est passé et qui savent faire une version soft de la révolution hard, ce qui fait qu’ils ont beaucoup de profit. Dès le moment où la révolution symbolique est en marche, il y a place pour l’imposture de la révolution, le faire-semblant de la révolution. (…)
Il y a le célèbre tableau de Manet, le Déjeuner sur l'herbe, qui a fait scandale.
L’hérésiarque qui a produit le tableau produit un effet de scandale, rompt un ordre symbolique, l’accord entre les structures cognitives et les structures sociales qui est au fondement de l’expérience du monde social comme allant de soi. Les structures se présentent le plus souvent sous forme d’oppositions binaires : il y a celle entre le haut et le bas, esthétiquement, qui correspond à la hiérarchie des genres, il y a l’opposition masculin/féminin, l’opposition bourgeois/peuple, etc. Par exemple, ce qui a été vu tout de suite par un certain nombre de critiques « populaires » (c’est-à-dire de critiques écrivant dans des journaux populaires et soucieux de se faire bien voir de leur public en lui disant ce qu’il a envie d’entendre — le phénomène de l’Audimat existait déjà…), c’est le barbarisme sexuel, le fait que l’on ait des hommes bourgeois habillés et une femme nue supposée être une grisette populaire.
Et le tableau a été perçu comme trop grand (2,08m sur 2,64m) pour une scène de genre (type d'œuvre avec scène anecdotiques ou familières, situées assez bas dans la hiérarchie picturale), trop réaliste pour une scène de bain, trop public et officiel pour une image salace.
On redoute que ces artistes irresponsables qui bouleversent par exemple la hiérarchie entre le contemporain et l’ancien puissent toucher à celle du bourgeois et du peuple, etc. Cela dit, la stratégie de Manet n’est pas totalement inconsciente ; républicain, très à gauche, il voulait vraiment provoquer.
C'est pour cela qu'il commet des entorses à la perspective, qu'il met la femme dans une lumière frontale faisant disparaître le modelé, et qu'il s'interdit le procédé habituel des scènes de nus, cette euphémisation par la distanciation historique des sujets représentés (les Vénus, etc.), mais aussi par la technique. Cet effet de réalisme fait penser que c’est un pique-nique à Asnières. Si c’est un pique-nique, on s’interroge sur le modèle : pourquoi est-elle nue ? Est-ce qu’il ne se passe pas des choses troubles ?
Donc il y a transgression esthétique et transgression sexuelle. La femme est menaçante en tant qu’elle menace l’ordre symbolique et la hiérarchie des genres sexuels ; et elle menace aussi l’ordre social à travers les menaces qu’elle fait peser sur la reproduction. Et sur l’héritage. (…)
Pour comprendre une œuvre, surtout une œuvre de rupture, il est important de prendre en compte l’effet social qu’elle a produit. Je pense qu’on ne peut pas, quand on fait l’histoire des œuvres ou une histoire des actions humaines, ne pas engager une philosophie de l’action.
Est-ce qu’il n’y a d’action qu’intentionnelle ? Est-ce qu’une action qui n’est pas intentionnelle est automatique ou inintelligente ?
Tout mon travail d’ethnologue puis de sociologue m’a conduit à élaborer une théorie de la pratique ayant son principe, non pas dans les intentions conscientes ou dans des préméditations, mais dans des dispositions. Une théorie de la pratique, que j’appelle dispositionnaliste qui place au principe des actions, non pas nécessairement des intentions explicites, mais des dispositions corporelles, des schèmes générateurs de pratiques qui n’ont pas besoin d’accéder à la conscience pour fonctionner.
Cette théorie dispositionnaliste est à mettre en œuvre des deux côtés, c’est-à-dire du côté du producteur et du côté du récepteur. Le producteur met en œuvre des dispositions, ce qui ne veut pas dire qu’il ne sait pas ce qu’il fait, mais seulement qu’il ne sait pas tout ce qu’il fait. Et le récepteur met en œuvre aussi des schèmes d’interprétation qui peuvent être plus ou moins accordés, et qui s’expriment dans le sentiment de scandale lorsque ces schèmes sont frustrés. La communication entre une œuvre d’art et un spectateur est une communication des inconscients beaucoup plus qu’une communication des consciences. La compréhension est un cas particulier où les schèmes investis dans une production, une pratique, une œuvre, une parole, bref, dans une production symbolique sont identiques aux schèmes que le spectateur, le récepteur ou le lecteur investit dans la réception. Dans ce cas, il y a compréhension immédiate et sentiment d’évidence, mais ce sentiment de l’évidence peut aussi être le fait du malentendu, et lorsqu’il y a trop de discordance entre les schèmes du producteur et les schèmes du récepteur, il y a sentiment de scandale, indignation, etc. (…)
A la question : « Qui a peint Le Déjeuner sur l’herbe ? », je réponds évidemment que c’est Manet, c’est-à-dire un individu, situé et daté, doté d’un corps, inséré socialement, etc.
Mais, du point de vue sociologique, cet individu qui a fait ce tableau n’est pas le sujet selon la tradition occidentale, c’est un habitus inséré dans un champ. Un habitus, c’est-à-dire un être biologique socialisé, doté de dispositions permanentes socialement constituées dont il faut décrire la genèse sociale.
« Comment soigner les Afghans », Pierre Micheletti, médecin envoyé spécial
Pour prendre en charge efficacement la santé des femmes, dans un pays où elles ne peuvent être soignées que par des personnes du même sexe ou n’être reçues en consultation qu’accompagnées d’un homme de la famille, la formation de toute une génération de professionnelles — agentes de santé communautaires, infirmières, médecins, sages-femmes — est primordiale. Mais les obstacles sont multiples : faibles taux de scolarisation et d’alphabétisation, résistance forte des familles à les voir s’éloigner pour recevoir un enseignement…
Lorsque cette résistance est vaincue, surgit un nouvel obstacle inattendu avec la nécessité de gérer les marhams, des chaperons masculins mandatés par les familles, frères, beaux-frères ou cousins. Ils doivent accompagner les femmes partout pendant leur formation ou sur les lieux de leur affectation professionnelle. Il faut donc eux aussi les loger et les nourrir, et, pour qu’une femme soit autorisée à occuper un poste, prévoir la présence du marham, ou lui trouver un emploi.
Autre fléau : la consommation d’opium, dont l’Afghanistan est le premier producteur mondial. On compte aujourd’hui environ un million d’usagers, dont cent cinquante mille consomment l’héroïne par injection, avec des pratiques et dans des conditions d’hygiène désastreuses. Lors du départ des Soviétiques, en 1989, la production s’élevait à mille deux cents tonnes par an ; elle a atteint six mille neuf cents tonnes en 2009. Les revenus découlant de cette culture représentent environ 60 % du produit intérieur brut (PIB) afghan.
L’attitude des talibans à l’égard des ONG internationales reste incertaine. Il est vrai que certaines ont eu une attitude qui les a clairement positionnées comme de véritables supplétifs des forces armées étrangères. Celles-là pourraient être réduites à la paralysie ou contraintes de plier bagage dans les mois à venir, dans le sillage, pour quelques-unes, de leurs mentors de la coalition internationale.
« La traque méthodique de l'internaute révolutionne la publicité », Marie Bénilde, journaliste
Des serveurs utilisés à des fins publicitaires recensent désormais nos centres d’intérêt, nos liens sur les réseaux sociaux, nos goûts culturels, les lieux que nous visitons ou encore nos achats. Bref, bien qu’il ne s’agisse jamais officiellement de ficher une population, la catégorisation peut être si précise que, même sans connaître nommément le consommateur, une marque est en mesure de tout savoir à son sujet.
Une publicité pour machine à laver envahit tous les sites que vous consultez après que vous avez cherché à connaître le prix des modèles existants ? C’est bien le signe que vous êtes tracé, à travers les fameux cookies. Google, par ailleurs, s’est fait une spécialité de cibler en fonction du contexte éditorial à travers son programme AdSense : celui-ci adresse de la publicité en fonction de la thématique présente sur la page Web consultée.
Très peu d’utilisateurs comprennent totalement — et encore moins contrôlent — l’exploitation des données utilisées pour pousser l’activité publicitaire de Facebook. Les conditions générales d’utilisation du réseau social, qui modifie régulièrement ses paramètres de confidentialité, sont généralement illisibles. Les data centers, ces parcs de serveurs qui stockent les données, sont d’ailleurs la propriété des géants californiens et échappent à tout contrôle des autorités européennes.
Soustraits à l’économie réelle par des systèmes d’évasion dans des paradis fiscaux, ces géants ne payent pratiquement pas d’impôts sur les sociétés ou échappent à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Pour 2,5 à 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires en France, les entreprises Google, Apple, Facebook et Amazon ne versent que 4 millions d’euros alors qu’elles pourraient être redevables de 500 millions d’euros si le régime fiscal leur était pleinement appliqué.
« Machiavel contre le machiavélisme », Olivier Pironet
Au début du XVIe siècle, le philosophe florentin Nicolas Machiavel a ouvert la voie à la pensée politique moderne. On associe souvent son nom à l’action de gouvernants cyniques et manipulateurs. Forgée par ses détracteurs, cette « mauvaise réputation » cache en fait un authentique théoricien de la liberté et du pouvoir populaire.
Machiavel développe une problématique essentielle. Selon lui, chaque régime repose sur l’opposition fondamentale entre deux grandes classes, ou « humeurs » (umori) sociales, qui en détermine la forme : le peuple, c’est-à-dire le commun des citoyens, et les grands, ceux qui constituent l’élite sociale, économique et politique. Les seconds, minoritaires, veulent la domination ; le premier, majoritaire, la conteste.
Pour diriger, il faut choisir un camp. Pour Machiavel, ce ne peut être que celui du peuple, « car ses buts (…) sont plus honnêtes que ceux des grands, les uns voulant opprimer, l’autre ne pas être opprimé ». La monarchie, ce principato autoritaire que Machiavel voit également dans l’oligarchie, est incapable de résoudre la question sociale.Il faut donc lui préférer un régime républicain.
Mais cette république, comme le précisent les Discours, ne peut s’appuyer que sur l’institution de la discorde civile entre les élites et la plèbe, autrement dit sur la reconnaissance politique du conflit inhérent à la cité. L’idée d’une société pacifiée est un mythe, voire une aberration. C’est pourquoi il est essentiel de mettre en place un dispositif légal par lequel le peuple puisse faire entendre ses revendications et ses droits.
Le Florentin préconise l’instauration d’une république populaire (stato popolare) fondée sur l’autorité suprême d’une assemblée au sein de laquelle le peuple peut participer, au même titre que les grands, à la direction des affaires de la cité : « Le grand nombre sert à sévir contre les grands et contre l’ambition des riches ».
Cet histoire de traité transatlantique est franchement flippant ! Il y a parfois de quoi être conspirationniste !
Mais où s'arrêteront-ils ces salopards ? Et l'Europe dans tout ça ? Cette belle utopie n'est décidément plus que l'ombre d'elle-même...
Mais où s'arrêteront-ils ces salopards ? Et l'Europe dans tout ça ? Cette belle utopie n'est décidément plus que l'ombre d'elle-même...
Cet histoire de traité transatlantique est franchement flippant ! Il y a parfois de quoi être conspirationniste !
Mais où s'arrêteront-ils ces salopards ? Et l'Europe dans tout ça ? Cette belle utopie n'est décidément plus que l'ombre d'elle-même...
rectif : Cette histoire de traité transatlantique est franchement flippante
Moi aussi, et maintenant j'ai le moral dans les talons. Alors que les états ont besoin d'argent, ils vont enterrer la taxe tobin sur les transactions financières ? Y a pas à dire, on est vraiment dans un rapport de force entre ceux qui ont le capital et les autres.
Le reste n'est pas très joyeux non plus.
Le reste n'est pas très joyeux non plus.
Encore merci Bolcho.
Voilà bien le paradoxe de la lecture du monde Diplo: il vous éclaire, aiguise votre vision des choses, ce qui est un plaisir.
Mais il démoralise aussi, décourage, met en colère!
Qu'il serait doux de ne rien savoir, sauf que le réveil serait d'autant plus rude.
Faut-il lacher prise?
Je me pose la question depuis longtemps. Je n'ai pas encore trouvé la bonne réponse et ne peut m'empêcher d'y aller voir!
Suis-je maso ou "éveillé"?
A+
Voilà bien le paradoxe de la lecture du monde Diplo: il vous éclaire, aiguise votre vision des choses, ce qui est un plaisir.
Mais il démoralise aussi, décourage, met en colère!
Qu'il serait doux de ne rien savoir, sauf que le réveil serait d'autant plus rude.
Faut-il lacher prise?
Je me pose la question depuis longtemps. Je n'ai pas encore trouvé la bonne réponse et ne peut m'empêcher d'y aller voir!
Suis-je maso ou "éveillé"?
A+
En somme, il s’agit purement et simplement de rayer le mot « régulation » de la carte.
Côté américain, on espère surtout que l’APT enterrera pour de bon le projet européen de taxe sur les transactions financières. L’affaire paraît d’ores et déjà entendue, la Commission européenne ayant elle-même jugé cette taxe non conforme aux règles de l’OMC. Dans la mesure où la zone de libre-échange transatlantique promet un libéralisme plus débridé encore que celui de l’OMC, et alors que le Fonds monétaire international (FMI) s’oppose systématiquement à toute forme de contrôle sur les mouvements de capitaux, la chétive « taxe Tobin » n'inquiète plus grand monde aux Etats-Unis.
Ces voyous en cols blancs n'en ont jamais assez, ils ne veulent aucune règle, aucune contrainte, juste la liberté de planquer leurs bénéfices là où bon leur semble. Quand on pense que les 2/3 de la dette mondiale sont dissimulés dans les paradis fiscaux, ça donne envie de vomir. Et pendant ce temps, on en demande toujours plus aux Etats et aux contribuables... Et pendant ce temps-là, des gogols continuent à croire qu'on n'a pas le choix que se serrer la ceinture, que la seule solution pour éponger la dette astronomique est une politique de rigueur, alors ils votent pour le plus "raisonnable", le plus "réaliste", l'essentiel pour le patronat est que le vainqueur de l'élection reste à la botte du CAC40 ou de Wall Street. Quelle farce grotesque !
Edifiant également l'article sur Amazon... Saviez-vous que le groupe américain ne paye aucune taxe sur les bénéfices en Europe (grâce au Luxembourg) ?
http://trends.levif.be/economie/actualite/…
http://lemonde.fr/technologies/article/…
http://zdnet.fr/actualites/…
Je recommande aussi cet excellent reportage diffusé sur Arte il y a quelques temps :
http://arte.tv/sites/fr/…
Plus.. gai comme journal, vous n'avez pas :)
"Les artisans de l’APT admettent eux-mêmes que leur objectif premier n’est pas d’alléger les contraintes douanières, de toute façon insignifiantes, mais d’imposer « l’élimination, la réduction ou la prévention de politiques nationales superflues », étant considéré comme « superflu » tout ce qui ralentit l’écoulement des marchandises, comme la régulation de la finance, la lutte contre le réchauffement climatique ou l’exercice de la démocratie.
Curieusement, presque toutes les études sur l’APT ont été financées par des institutions favorables au libre-échange ou par des organisations patronales."
:) Ben voyons.. Au moins, on ne peut pas leur reprocher de ne pas être clair en annonçant la couleur. Mais, rassurez-moi, ce n'est pas encore prêt d'être signé, ça??
Parce qu'on est déjà gouvernés par les multinationales, on le sait, mais là ..
"Les artisans de l’APT admettent eux-mêmes que leur objectif premier n’est pas d’alléger les contraintes douanières, de toute façon insignifiantes, mais d’imposer « l’élimination, la réduction ou la prévention de politiques nationales superflues », étant considéré comme « superflu » tout ce qui ralentit l’écoulement des marchandises, comme la régulation de la finance, la lutte contre le réchauffement climatique ou l’exercice de la démocratie.
Curieusement, presque toutes les études sur l’APT ont été financées par des institutions favorables au libre-échange ou par des organisations patronales."
:) Ben voyons.. Au moins, on ne peut pas leur reprocher de ne pas être clair en annonçant la couleur. Mais, rassurez-moi, ce n'est pas encore prêt d'être signé, ça??
Parce qu'on est déjà gouvernés par les multinationales, on le sait, mais là ..
« Où s'arrêteront ces salopards ? », « on est dans un rapport de force entre ceux qui ont le capital et les autres », « qu'il serait doux de ne rien savoir, sauf que le réveil serait d'autant plus rude », « l'essentiel pour le patronat est que le vainqueur de l'élection reste à la botte du CAC40 ou de Wall Street », « on est déjà gouvernés par les multinationales »...
Ben oui, vous aussi, vous résumez très bien...
Si on veut se remonter le moral, va falloir se lancer dans des résumés plus joyeux : il n'y aurait pas une revue mensuelle sur la vie des stars ou sur les amours des footballeurs ?
Ben oui, vous aussi, vous résumez très bien...
Si on veut se remonter le moral, va falloir se lancer dans des résumés plus joyeux : il n'y aurait pas une revue mensuelle sur la vie des stars ou sur les amours des footballeurs ?
Si on veut se remonter le moral, va falloir se lancer dans des résumés plus joyeux : il n'y aurait pas une revue mensuelle sur la vie des stars ou sur les amours des footballeurs ?
Moi, tu sais, depuis que Javier Pastore peine à laisser éclater son génie sur les terrains, je suis aussi en dépression. Donc parler des mes amours de footballeurs...
Mais on peut toujours parler bons bouquins !
Et oui, l'APT est flippant, mais en même temps, il s'inscrit dans la lignée de ce que font les traités bilatéraux relatifs à l'investissement (BIT) qui lient de manière bilatérale quasiment tous les pays du monde (et avec les clauses dites de la nation la plus favorisée, une entreprise peut même invoquer contre un Etat un BIT qui n'aurait pas été conclu avec son Etat d'origine). L'ATP pousse la chose encore plus loin, mais il n'y a malheureusement rien de bien nouveau là-dedans. Pour tout vous dire, c'est même ce genre de trucs qui m'a fait envisager une reconversion professionnelle étant donné que ce droit international que j'avais tant aimé à la fac n'est bon, dans le monde professionnel, qu'à servir à la mise en oeuvre de tels traités pour que des Etats incapables de se développer car en faillite doivent encore mettre toutes leurs ressources naturelles à disposition d'entreprises étrangères ou/et leur payer des indemnités indécentes. L'ATP pousse juste le micmac un poil plus loin. Ce qu'il y a d'encore plus flippant, c'est qu'il semble impossible aujourd'hui d'en sortir (voire l'exemple de l'Argentine qui, refusant le système, se tape une crise sans précédent, et croule maintenant sous les procès devant le CIRDI tandis qu'une bonne partie du peuple appelle à toujours plus de libéralisme pour redevenir une espèce de vitrine de l'Amérique du Sud). Ca devient presque difficile d'en vouloir aux politiques de pactiser. C'est dire ! Parfois, j'ai l'impression qu'il y a plus qu'à attendre que ça pète, mais ça peut encore durer longtemps.
Si on veut se remonter le moral, va falloir se lancer dans des résumés plus joyeux : il n'y aurait pas une revue mensuelle sur la vie des stars ou sur les amours des footballeurs ?
Il serait tellement plus facile de détourner les yeux et de faire comme si de rien n'était... Et pour reprendre une expression fameuse du MD, "s'informer fatigue", n'est-ce pas ?
Et quand le peuple se contente de la vie des stars pour rêver, ça veut un peu dire qu'on est mal barrés... il suffit de voir les mags people qui prolifèrent...
En tout cas, merci à toi de rappeler qu'il n'y a pas que la "Voix de son maître" pour s'informer... ne change rien !
Parfois, j'ai l'impression qu'il y a plus qu'à attendre que ça pète, mais ça peut encore durer longtemps.
Et entretemps, les extrême-droites auront peut-être l'occasion de donner un aperçu de leur capacité à diriger... la finance et les multinationales ne sont pas si regardantes, surtout s'il s'agit de museler les opinions contraires à leur idéologie mortifère...
Allez maintenant, une petite chanson pour se remonter le moral (pouet) :
Et on fait tourner les serviettes
Comm' des petites girouettes
Ça nous fait du vent dans les couettes
C'est bête, c'est bête
Mais c'est bon pour la tête !
Et on fait tourner les serviettes
Comm' des petites girouettes
Ça nous fait du vent dans les couettes
C'est bête, c'est bête
Mais c'est bon pour la tête !
Parfois, j'ai l'impression qu'il y a plus qu'à attendre que ça pète, mais ça peut encore durer longtemps.
Et entretemps, les extrême-droites auront peut-être l'occasion de donner un aperçu de leur capacité à diriger... la finance et les multinationales ne sont pas si regardantes, surtout s'il s'agit de museler les opinions contraires à leur idéologie mortifère...
Tu/vous vas/allez sûrement trouver ça con, mais tandis qu'on parle de l'Episode VII pour 2015, la situation n'est pas sans évoquer Star Wars où une "Fédération du commerce" s'empare littéralement d'une planète suite à quoi la révolte gronde et permet à l'Empire intergalactique de s'imposer. A terme, on pourrait très bien se retrouver avec une situation similaire à notre échelle. C'est pas pour tout de suite, mais le système capitaliste et libéral actuel n'est clairement pas "la fin de l'Histoire" à mon avis.
On pourrait espérer que ces gens savent ce qu'ils font, qu'ils nous préparent un avenir meilleur ? Mais en lisant ce post sur le blog de l'économiste Paul Jorion, qui pointe l'incompétence de la "troika" (FMI, Banque centrale Européenne, commission européenne) et sa responsabilité dans la crise actuelle, on perdra nos illusions
http://www.pauljorion.com/blog/?p=59706
http://www.pauljorion.com/blog/?p=59706
Tu/vous vas/allez sûrement trouver ça con, mais tandis qu'on parle de l'Episode VII pour 2015, la situation n'est pas sans évoquer Star Wars où une "Fédération du commerce" s'empare littéralement d'une planète suite à quoi la révolte gronde et permet à l'Empire intergalactique de s'imposer. A terme, on pourrait très bien se retrouver avec une situation similaire à notre échelle. C'est pas pour tout de suite, mais le système capitaliste et libéral actuel n'est clairement pas "la fin de l'Histoire" à mon avis.
Je ne trouve pas ça con du tout, d'autant que j'apprécie la saga, un peu plus les trois premiers toutefois...
L'air de rien, Star Wars est à la base un divertissement mais supporte très bien une grille de lecture plus politique... voire visionnaire, même si ça se passe dans une galaxie très lointaine ;-)
En matière de SF, Kim Stanley Robinson évoque aussi la question dans sa trilogie martienne, où la Terre, au bord du chaos et dans un futur beaucoup plus proche, est gouvernée uniquement par les multinationales... Mars représente alors la nouvelle utopie, le nouveau monde pour des pionniers qui ne veulent pas reproduire les mêmes erreurs...
On pourrait espérer que ces gens savent ce qu'ils font, qu'ils nous préparent un avenir meilleur ? Mais en lisant ce post sur le blog de l'économiste Paul Jorion, qui pointe l'incompétence de la "troika" (FMI, Banque centrale Européenne, commission européenne) et sa responsabilité dans la crise actuelle, on perdra nos illusions
http://www.pauljorion.com/blog/?p=59706
Paul Jorion, il gagne à être connu... mais on ne l'invitera pas sur BFM ou TF1...
zut, j'ai répondu à l'intérieur des "quote" :-(
donc je disais pour répondre à Saule que Paul Jorion gagnait à être connu... mais on ne l'invitera sans doute pas sur BFM ou TF1...
donc je disais pour répondre à Saule que Paul Jorion gagnait à être connu... mais on ne l'invitera sans doute pas sur BFM ou TF1...
Mais qu’attendre d’autre de la part d’économistes car c’est bien ce qu’ils sont, qui nous expliquent depuis cent quarante ans que si leurs prévisions sont systématiquement fausses, ce n’est pas parce que leurs théories sont sans fondement mais parce que les hommes hélas ne sont pas suffisamment rationnels au sens psychopathique qu’ils ont attribué de leur côté au mot « raison ».
:):)
Des hommes qui ne se conforment pas à ce qu'ils ont prévu pour eux?? Et bien ça alors! Quel culot!
C'est vrai qu'ils exagèrent, quand même! Bon, on va leur envoyer nos produits alimentaires pourris , et ils feront tous des cancers à 30 ans ( ce qui est déjà le cas, pas tous, mais c'est très inquiétant, cette flambée de maladies liées à l'environnement.;) . 30 ans, c'est peut être encore un peu vieux.. Supprimons donc toutes les politiques de santé complètement démagos , et relevons déjà la mortalité infantile. Ah, mais je vais vous en trouver, moi, des solutions!
Bon, je précise que c'est du deuxième degré, on ne sait jamais..
:):)
Des hommes qui ne se conforment pas à ce qu'ils ont prévu pour eux?? Et bien ça alors! Quel culot!
C'est vrai qu'ils exagèrent, quand même! Bon, on va leur envoyer nos produits alimentaires pourris , et ils feront tous des cancers à 30 ans ( ce qui est déjà le cas, pas tous, mais c'est très inquiétant, cette flambée de maladies liées à l'environnement.;) . 30 ans, c'est peut être encore un peu vieux.. Supprimons donc toutes les politiques de santé complètement démagos , et relevons déjà la mortalité infantile. Ah, mais je vais vous en trouver, moi, des solutions!
Bon, je précise que c'est du deuxième degré, on ne sait jamais..
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