Fortune de France, tome 3 - Paris, ma bonne ville
de Robert Merle

critiqué par Ena, le 12 octobre 2005
(Le Gosier - 62 ans)


La note:  étoiles
De poêle en braise
De retour de Montpellier et de ses studieuses et vertes années , Pierre est victime d’une embuscade au cours de laquelle, en duel, il tue un vieil ennemi de la famille Siorac. Le jugement qui doit être prononcé par une justice partiale à l’égard des huguenots le met sur la route de Paris ou sa dernière chance réside dans la grâce à quérir auprès du roi Charles IX. Ce 3ème opus de fortune de France est un peu plus long que les 2 premiers à nouer l’intrigue et à nous mettre en haleine. Cela décolle vraiment après 250-300 pages mais les 300 pages restantes se dégustent avec autant de plaisir que celui éprouvé à la lecture des premiers épisodes. On suivra Pierre dans les dangereux méandres de la vie parisienne, des ruelles malfamées à la courre de "ce petit reyet de merde" pour citer l’oncle Sauveterre ou il faudra susciter les faveurs des grands. C’est à cette époque qu’Henry de Navarre épouse Marguerite de Valois quelques jours avant le massacre de la saint Barthélemy.
Ballade des dames du temps jadis. 8 étoiles

Je ne sais pas ce qu’il faut le plus admirer chez ce beau Merle, Si c’est la plume ou bien son chant. Car de ce cocu de Fontenac, aux autres faits, lesquels déferlent. Toujours j’ai trouvé ça, attachant. Même si, de déchiffrer l’ancien français, m’a fait tordre du bec
Du petit croissant jusqu’au couchant. J’ai tant traversé d’états d’âme, presque aussi sot qu’un blanc-bec .Que mon orgueil s’est vu démarchant . L’infime terme, la moindre phrase, le moindre paragraphe .Pour tenter le lecteur s’affichant.

Après m’avoir laissé un temps folâtrer et dilater dans la chaleur de l’onde, la Babeau me requit de me lever et me savonna exactement toutes les parties du corps sans en excepter aucune, ce qui me fut, comme bien on pense, de vif et grand plaisir et d’autant que cette suave onction me ramentevait ma bonne Barberine quand, à Mespech, elle récurait en un baquet, de ses fortes et douces mains, mes enfances impubères. Et combien plus délicieux ce savonnage-là en mon âge viril, Babeau, que ce fût la courtoise coutume de son état, ou qu’elle fût sans détour en sa rusticité, ne laissant pas de louer bien haut les objets de son nettoiement, ajoutant aux mignonneries de sa dextre les caresses du verbe « Ha Monsieur, disait-elle, quelle fortes épaules ! Et quel profond poitrail ! Que musculeux vos bras et que longues vos jambes ! Que bien fournies, vos toisons, du blond le plus beau ! N’est-ce pas pitié d’avoir à rabattre ce poil pour complaire à nos raffinées ! Où sont l’usance et le profit de faire de l’homme une femme, et bien vainement, car trois jours, vous serez plus piquant qu’hérisson dans le lit, alors que de présent votre poil est tout doux et laineux que brebis ! » Ce disant, elle me passait dessus, qui cy, qui là, sa main ensavonnée . Si plaisant que fût ce moment, il le fallut bien finir, et la Babeau m’ayant rincé, me requit de saillir de la cuve m’enveloppant de la peignoire laquelle me tombait jusqu’aux orteils tant longue elle était me frotta à l’arrache-peau.
-Mon gentilhomme, dit-elle tandis que sur la couche je m’étendais à l’aise, dispos et étirant mes membres, je m’ensauve et vous envoie la barbière d’estuves. Elle est fort dextre : vous en serez content.

Pierrot - Villeurbanne - 72 ans - 20 juillet 2017


Au coeur de la Saint Barthélémy 8 étoiles

Une fois de plus j'ai été happé par ce nouvel opus de "Fortune de France".
Il y a toujours cette langue incroyable que Robert Merle nous restitue. Quelle musique et quel exotisme! A tel point qu'elle déborde et nous accompagne encore, le livre refermé.
Il y a également le plaisir de côtoyer les grands noms de ce siècle comme Michel de Montaigne ou Ambroise Paré, mais aussi cette cour du Louvre où se trament les pires intrigues. Et ce dernier personnage qu'est Paris, indomptable, oppressant, violent, envoûtant.
Enfin le contexte, cette situation venimeuse, où les "quatre rois", Charles IX, les ducs D’Anjou et de Guise et l'Amiral de Coligny entrent dans un jeu de dupes à la conclusion désastreuse.
Pierre de Siorac sera au cœur de tous les évènements et nous fera vivre de l'intérieur une des plus sanglantes pages de notre histoire.

Elko - Niort - 48 ans - 30 mai 2016