Comme quoi l’érotisme est – entre autres choses – un jeu social et psychologique auquel s’adonnent des êtres complexes. C’est bien pour ça que c’est gai. C’est aussi pour ça que c’est troublant, incertain, fragile, risqué, ou bien drôle. Et surtout que c’est constructeur de soi-même.
Bref, vous en pensez ce que vous voulez.
Elisa Brune nous mène sur ces chemins au travers d’une rencontre et d’un voyage.
D’accord pour dire que l’épisode du premier contact, fait d’un échange de courriels, est un peu artificiel et pas très intéressant. Mais c’est vite passé et le reste est un délice absolu. Ça pétille d’intelligence, d’humour, de vérité humaine.
Un exemple ?
La narratrice, ayant au moins deux raisons de réfléchir à l’impuissance masculine, assiste à un concert de piano impromptu donné par un inconnu qui s’est installé devant un magnifique quart-de-queue. La maîtrise du musicien a sur elle un effet érotique :
« (…) c’est dans l’action que l’excitation se construit, pas dans la sexe lui-même. C’est en peignant, en chantant, en fendant du bois, en explorant les pôles qu’on devient désirable, pas en se déshabillant. L’homme croit qu’il doit bander au lit, alors qu’il peut bander partout. L’érection n’est que la fin d’une chaîne, le dernier levier d’un long dispositif. Voilà ce qu’un piano vient de m’apprendre : toute activité un tant soit peu réussie fournit déjà le quart d’une queue ».
Maintenant, je me dois de confesser que le titre m’échappe. « Un homme est une rose » : pourquoi ? Serait-ce notre « fragilité » que l’auteur met ainsi en exergue ? Le fait que notre « puissance » passe aisément du magnifique au ridicule ? Que nous sommes (merci Malherbe) « du monde où les plus belles choses ont le pire destin » et vivent « ce que vivent les roses, l’espace d’un matin » ?
Cruelle Elisa Brune.
Et pourtant elle sait bien que c’est l’incertitude qui donne du prix à la performance…
Bolcho - Bruxelles - 76 ans - 27 septembre 2006 |