Le coeur est un chasseur solitaire
de Carson McCullers

critiqué par Saule, le 14 mai 2001
(Bruxelles - 59 ans)


La note:  étoiles
"La valeur, la qualité de l'amour, quel qu'il soit, dépend uniquement de celui q
Le titre de la critique est tiré de la nouvelle 'La ballade du café triste'.
Cela aide à comprendre le lien très fort qui unit Singer, un sourd-muet, à son ami Grec, un obèse, stupide et indigne d'une telle amitié.
L'histoire se déroule dans une petite ville du 'Deep South' américain dans les années 30, au climat écrasant de solitude, de pauvreté et de chaleur.

Autour de Singer, le sourd-muet, gravitent quatre personnages, êtres seuls, rejetés ou incompris; Mick, une jeune adolescente passionnée de musique, un docteur noir qui consacre sa vie à sa race, un tenancier de bar qui éprouve des sentiments troubles pour la jeune adolescente...
Dans ce roman, le premier de Carson McCullers, qu'elle a écrit à l'age de 23 ans (!), on retrouve les thèmes habituels du reste de son oeuvre; solitude, amour non réciproque, ambiguité sexuelle,...
C'est écrit de manière simple, dans un style clair, ce qui rend le livre facile et agréable à lire. Tout autant que l'histoire, qui devient assez prenante, c'est l'atmosphère indescriptible, mélange de mélancolie et de tristesse, ainsi que la densité des personnages qui font la force de ce roman.
En conjonction il faut lire 'la Ballade du café triste', du même auteur, pour la préface qui éclaire sur la personnalité de l'auteur, et qui aide à comprendre ses livres (qui sont en grande partie autobiographique).
Et puis toujours dans cette nouvelle, on trouve l'extrait suivant qui éclaire sur le titre (génial) du roman (le titre original est 'The heart is a lonely hunter'): "Il y a celui qui aime et celui qui est aimé, et ce sont deux univers différents. Celui qui est aimé ne sert souvent qu'à réveiller une immense force d'amour qui dormait jusque-là au fond du coeur de celui qui aime. En général celui qui aime en est conscient. Il sait que son amour restera solitaire. Qu'il l'entrainera peu à peu vers une solitude nouvelle, plus étrange encore, et de le savoir le déchire".
A lire absolument, comme les autres de Carson McCullers !
Admirable 10 étoiles

Je n'ai pas grand chose à dire que ce qui fut dit...

Un roman, portrait cruel d'une certaine Amérique, empli d'humanité... où les rêves brisent parfois des destinées... ou quand la grise réalité vient les briser...

Des personnages si humains...

Deinos - - 62 ans - 26 janvier 2021


Une mosaïque d'humanité 9 étoiles

Cette myriade de personnages modestes qui assument leur nature, leurs goûts, leur personnalité, acceptent de se confronter tels qu'ils sont, avec plus ou moins de heurts et de malheurs, réchauffe le coeur. Accepter la richesse de son environnement, même quand il s'avère modeste, même en cas de coup dur, s'avère porteur d'une belle morale et d'une série d'anecdotes plus ou moins insolites non dénuées de charme. Comme l'important consiste à croire en ses rêves, en effet, et de savoir accepter les aléas du sort, cette mosaïque d'histoire est à la fois assez belle et banale. Elle vaut bien le détour.

Veneziano - Paris - 47 ans - 6 août 2017


Explorer la solitude 9 étoiles

Une belle découverte !

Un roman lourd d’une humanité douloureuse et d’intense chaleur humaine

Un roman bâti en deux temps , autour d’abord d’un mouvement de convergence progressive des personnages vers celui auprès duquel ils vont trouver écoute et apaisement , puis après la disparition de ce personnage pivot , d’un insensible mouvement inverse de dispersion .

Des personnages attachants, montrés d’abord chacun dans sa solitude intérieure , puis comme irrésistiblement attirés par Singer.
Celui-ci tiendra pour eux le rôle d’un thérapeute muet , celui qui ne juge pas , mais écoute et regarde , « ses yeux gris semblaient tout voir autour de lui et son visage avait toujours cette expression de paix que l’on rencontre chez ceux qui sont très sages ou qui ont beaucoup souffert » .
Il est le frère en lequel chacun se reconnait « les riches croyaient qu’il était riche et les pauvres le considéraient comme un pauvre ….chacun décrivait le muet comme il voulait qu’il fût » Un juste qui, dans la société de ségrégation de cette petite ville du Sud , est pour les Noirs, le « Blanc qui n’était ni insolent, ni méprisant ».

Après sa disparition qu’aucun des personnages ne peut expliquer ( mais que l’auteur a pris soin de faire comprendre au lecteur par les chapitres où le désarroi de Singer va croissant ) chacun de ces cabossés par la vie, désemparé, est renvoyé à sa solitude initiale , mais riche de l’expérience de fraternité vécue autour de lui.

Carson Mc Cullers, par le recours constant à la narration du point de vue intérieur , introduit le lecteur dans l’univers secret de ses personnages , de leurs rêves, de leurs espoirs , de leurs démons . L’écho de leurs mouvements intérieurs résonne ainsi longtemps dans son souvenir .

Alma - - - ans - 25 avril 2015


Eblouissantes solitudes ! 10 étoiles

Carson McCullers (1917-1967) est une romancière et novelliste américaine.Talent précoce, elle achève "Le Muet", publié sous le titre "Le cœur est un chasseur solitaire" en 1940 : elle a alors 23 ans.

Benedict Copeland, seul médecin noir de la ville, a une Mission : soigner les hommes et éduquer la population noire pour qu'elle retrouve dignité et respect. Jack Blount est un incompris, un bagarreur ivre qui rêve de changer le monde. Mick Kelly est une jeune fille solitaire et sauvage qui vit pour la musique et s'imagine un destin de lumière. Biff Brannon est un barman "qui aime les anormaux" au risque de mettre en péril son affaire.
Et d'autres... qui gravitent autour de Singer -personnage central - un juif sourd-muet, qui écoute, comprend et canalise les espoirs, les rêves, les doutes et les colères. Singer est le phare auprès de qui chacun vient (re)trouver la lumière. Un personnage singulier que nul ne connait vraiment . Et pourtant... Singer est un écorché vif à qui la vie a arraché son ami, son amour, son confident...

Difficile de critiquer un tel roman tant il est riche et puissant. Une petite ville du sud des Etats-Unis à la fin des années 1930 où le racisme, la pauvreté, l'extrême solitude d'hommes et de femmes aux parcours accidentés, créent un mélange explosif.
Carson McCullers est parvenue admirablement bien à doser le "Politique" et l'émotion.
Le lien qui unit Singer à Antonapoulos est bouleversant.
Une oeuvre exceptionnelle, un chef d'oeuvre digne des grands romans de Steinbeck.
Un moment de lecture unique !

Frunny - PARIS - 59 ans - 30 mars 2015


Rêves brisés et solitude 8 étoiles

Un beau roman d’une désespérante tristesse. Pas une once d’espoir pour tous ces personnages broyés par la misère qui n’arrivent même pas à communiquer. Leurs rêves resteront des chimères et se briseront sur une réalité crue et implacable. C’est aussi une chronique sur les années 30 et l’Amérique profondément secouée par la crise juste avant le grand choc de la Deuxième Guerre mondiale. Personne n’échappe à son destin et aucun dénouement heureux ne viendra conclure cette plongée dans ce sud profond plein de détresse, de racisme et de résignation.
Un constat amer qui n’a rien perdu de sa force avec les années et qui fait même étrangement écho avec notre époque actuelle.

Kabuto - Craponne - 64 ans - 12 mai 2012


les murs 10 étoiles

Les murs nous protègent mais qui prend soin du mur? A moi personne handicapée on me dit des confidences tel qu'un sage je suis pourtant moi aussi un être humain avec des rêves.

Je pense que Singer s'occupait du Grec parce qu'il était le seul à le traiter comme un être humain soit qu'on l'aime ou soit qu'on le méprise.

Andro2 - - 70 ans - 10 juillet 2011


Très bon 9 étoiles

L'auteur fait partie de ces rares qui ont la patience de faire aboutir leur roman pendant des années d'écriture et de réflexion, et ce ... à 23 ans ! Et avec un talent insensé !

Au final, on se retrouve avec un grand roman où se croisent et s'entrecroisent les destins abîmés de quatre solitudes, de quatre coeurs, qui cherchent à se raccrocher à quelque chose, et qui, face à leurs projets et à leur volonté, se voient confrontés à la dure réalité qui les étouffe, inexorablement.

Soldatdeplomb4 - Nancy - 35 ans - 15 mars 2011


Lisez-le 9 étoiles

Ce livre comment le décrire à sa juste valeur...???
notamment dans le rapport qu'entretient Mick avec la musique... les descriptions émotionnelles face à la musique classique sont uniques.... Ce rapport est souvent très difficile à décrire par de simples mots et elle le fait si bien.. elle décrit merveilleusement cette fusion, ce chamboulement ressenti... une vraie génie qui nous fait danser les mots et nous relate tous ces destins croisés, cette détresse humaine, ces complexités relationnelles.........
Un dernier mot pour Singer à qui chaque personnage met ses propres fantasmes et ses propres projections mais qui en fin de compte n'est réellement compris par personne... Incompréhension et sens de la vie, rapports humains, poids des souvenirs et des idéaux, racisme sous plusieurs formes, souffrance et misère psychologique que de thèmes abordés si finement en un seul livre.....
Si vous passiez à côté ce serait vraiment dommage...

Lya - Paris - 44 ans - 18 mars 2009


Attachant 9 étoiles

Un petit bijou que j'ai dévorée d'une traite, m'attachant aux personnages. Un must de la littérature américaine.

Janiejones - Montmagny - 39 ans - 14 mai 2007


La vertu du silence 9 étoiles

Le personnage le plus attachant parmi la palette que nous offre ici McCullers m’a semblé être Singer, un sourd et muet qui n’a pas besoin de la parole pour exprimer son humanité. Singer loge dans une pension de famille d’une petite ville du sud des Etats-Unis. Il reçoit la visite, chaque soir, de l’un des protagonistes. Lorsque c’est indispensable, il griffonne deux mots sur un calepin mais en règle générale, il ne fait qu’écouter les confidences. C’est peut-être pour cette raison que chacun lui livre avec une facilité déconcertante ses désirs les plus fous, ses pensées les plus secrètes et se croit compris. Par exemple Mick, l’adolescente, fille de la maison (et réplique de Carson McCullers), qui recherche la solitude et qui s’épanouit dans ce qu’elle appelle sa chambre intérieure. Elle s’y réfugie dès que quelque chose ne va pas, elle y vit ses rêves. Il y a aussi ce tenancier de bar qui est particulièrement touchant. Tyrannisé par sa femme, Biff résiste tant qu’il peut pour continuer à agir avec bonté. Et puis il y a tous les autres, tous décrits avec autant de finesse par l’auteur.

Singer vivait précédemment avec Antonapoulos, sourd et muet comme lui, et lui vouait une amitié sans borne. Mais autant Singer est mesuré et sage, autant Antonapoulos est excessif et devient incontrôlable. Son cousin intervient de la façon la plus drastique qui soit, et, sans faire de sentiment, le place dans un asile, laissant Singer seul, désespérément seul. Singer ne vit que pour les rares moments où il peut prendre congé et rendre visite à Antonapoulos, pas plus de deux fois par an. Et toujours il le gâte lors des retrouvailles, et toujours il lui parle, parle, parle car son ami est le seul à pouvoir comprendre le langage des signes.

Finalement, ce livre est un gigantesque carrefour où les solitudes se croisent telles des routes cabossées, des chemins de traverse, des voies sans issue. L’écriture de McCullers sert la simplicité de l’histoire de chacun, car finalement, même s’ils connaissent des événements hors du commun, ils restent des gens comme tout le monde. Des gens comme vous, comme moi, des gens qui essaient de mener leur petit bout de chemin en ménageant leurs rêves…

Saint-Germain-des-Prés - Liernu - 56 ans - 23 janvier 2005