Retour au meilleur des mondes
de Aldous Huxley

critiqué par Pendragon, le 9 mai 2001
(Liernu - 54 ans)


La note:  étoiles
Le Meilleur des Mondes, 15 ans plus tard
Aldous Huxley a écrit ce livre en 1946, soit 15 ans après son "Meilleur des Mondes". Il l'écrivit car il se rendit compte que son roman d'anticipation se rapprochait un tant soit peu de la réalité et il voulait une mise au point.
Huxley nous montre ici une étude de la société contemporaine (fin des années 50) au travers de l'anticipation qu'il en avait faite dans son roman précédent, publié en 1931. Il constate avec stupeur, effarement et crainte que sa fable n'en était finalement pas une et que notre monde et nos sociétés occidentales se dirigent vers ce genre de "dénaturisation" en masse où tous les individus sont égaux, semblables et dès lors interchangeables pour le plus grand profit d'une très petite quantité d'individus qui contrôlent tout cela. sans en tirer un profit spectaculaire, car eux-mêmes sont coincés dans des carcans de conventions, d'habitudes et d'obligations sociales. Huxley décortique avec soin la manière dont la société évolue et il apparaît clairement que cela tend vers une non-liberté absolue. ce qui est contraire à tout principe de nature humaine.
Il rejoint en ce sens plusieurs idées nietzschéennes qui prônent elles aussi l'individualisme comme étant la seule solution, le seul espoir pour que l'homme puisse évoluer et atteindre un niveau supérieur...
Inquiétant 8 étoiles

La surpopulation entrainerait-elle automatiquement une instauration de la tyrannie dans les démocraties occidentales ? De quelle manière la propagande aussi bien dans un cadre démocratique que dans un cadre dictatorial entrera-t-elle dans tous les processus de gouvernement ? De quelle manière fonctionnera la publicité, le « merchandizing » ? Quelles seront les méthodes les plus insidieuses de lavage de cerveaux des peuples ? Quid de la persuasion chimique, de l’utilisation des drogues (le fameux « soma » multi-fonction n’existant que dans l’imagination d’Huxley, a déjà de nombreux équivalents, cannabis, cocaïne, amphétamines, crack, LSD, et autres) ? De la persuasion subconsciente, images subliminales, matraquage de concepts, de notions répétées ad nauseam ? L'hypnopédie, c’est-à-dire l’enseignement pendant le sommeil, est-elle vraiment opérationnelle ? Ne peut-on pas conditionner les esprits sous hypnose ou dans un pré-sommeil ? L’instruction des peuples les rend-elle vraiment libres ?
« Retour au meilleur des mondes » n’est en aucun cas une suite au célèbre roman dystopique qui sert encore de nos jours de référence pour un futur de plus en plus probable, mais plutôt un essai de prospective sociale, politique, philosophique et psychologique. En effet, après avoir écrit « Le meilleur des mondes » en 1931, dans un contexte géo-politique bien particulier, Huxley voulut apporter des précisions et mêmes des corrections en 1948 après la seconde guerre mondiale, après les dégâts de l’hitlérisme et du stalinisme. Il fait un parallèle entre son livre et celui d’Orwell « 1984 ». Tous deux peuvent sembler des visionnaires. En réalité, ils étaient simplement plus informés, adeptes de la « Fabian society », francs-maçons et du côté d’Huxley, par son frère Julian, proche de Bernays, le créateur de l’ingénierie sociale, et donc familier des grands décideurs qui travaillaient déjà leur plan. « 1984 », inspiré par le stalinisme, explore la gouvernance par la peur, la contrainte et le contrôle social permanent alors que « Le meilleur des mondes » est plus sur une domination par le plaisir, la jouissance et une discipline acceptée et même souhaitée par la masse. Sans oublier la manipulation génétique, la création in vitro des Alphas et autres Omégas qui a un petit avant-goût de transhumanisme. Pour Huxley, 2 milliards de terriens serait le nombre à ne pas dépasser, les ressources de la planète ne permettant pas que l’on soit plus nombreux. Que faire du surplus de population ? 70 ans plus tard, la réponse est en train de se révéler dans toute son inhumanité. Le dernier chapitre est cependant un plaidoyer pour la liberté, preuve que l’auteur est inquiet de ce qu’il entrevoit. Inutile de préciser que ce qu’il annonce se concrétise de plus en plus à notre époque. À lire pour mettre les choses en perspective, même si elles sont inquiétantes.

CC.RIDER - - 66 ans - 1 août 2021


Rien de nouveau...mais ça reste glaçant! 7 étoiles

Aldous Huxley examine dans ce petit ouvrage la progression du délitement social par la domination de tous par le petit nombre: les Grosses Affaires et les Gros Pouvoirs.

De plus en plus, ceux qui savent exploiter les failles de l'être humain parviennent à manipuler et réduire les masses à la servitude... cela vous rappelle-t-il quelque chose?

L'homme se sent libre (la liberté, c'est ce qui fait que souvent un être humain est un homme) car il évolue, en Occident, dans une mascarade de démocratie. Malgré toutes les apparences, la maîtrise scientifique et les contingences de l'évolution du Monde (surpopulation et diminution des richesses par habitant conduisent à toujours plus d'organisation) limitent cette liberté a reductio.

Parfois très dense, parfois daté (les techniques de domination ont évolué) ce petit livre permet cependant d'ouvrir les yeux sur la finalité de l'oligarchie qui nous domine, non pas par idéal, pour imposer le bonheur à l'Homme, mais pour son seul profit. Révolution !

Vince92 - Zürich - 47 ans - 13 août 2013


Tellement de choses... 6 étoiles

Comme j'ai aimé lire le meilleur des monde, j'ai voulu lire cet essai. Là, Huxley va mettre l'accent sur l'inquiétante crédibilité de sa vision. Vu que ce retour a été écrit en 46 et que je ne suis pas un historien qui arrive à se restituer le contexte exact de l'écriture (d'un point de vue technologique ou même de certains intellectuels cités), je n'ai pas trouvé forcément tout cela flagrant. En finissant ce livre d'ailleurs, je me suis tout de suite dit que si l'auteur avait pu être témoin de ce XXIème siècle, il aurait encore beaucoup de choses à écrire.

Donc voilà, en fait, on peut dire que je fais partie de ceux qui attendent que d'autres auteurs d'anticipation du XXIème siècle réécrivent un nouvel essai décortiquant la terrible réalité que revête l'oeuvre de Huxley.

Benson01 - - 28 ans - 8 juin 2012


Une critique acerbe et réaliste de notre société 8 étoiles

J'avais bien aimé la lecture du Meilleur des mondes, mais j'avais toutefois privilégié le fond sur la forme, les idées sur la fiction.
En effet, la plupart des idées mises en avant dans cet ouvrage avaient eu la facheuse tendance à se concrétiser quelques années plus tard dans notre propre société.

Aldous Huxley avait déjà du s'en rendre compte 15 ans après la rédaction de son ouvrage, car il écrivit "Retour au meilleur des mondes", afin de pouvoir développer ces mêmes idées, et mettre en garde ses contemporains vis-à-vis de la tournure que prenait la société à son époque, message de mise en garde resté vain, si on constate l'ampleur des dégats en ce début de XXIème siècle.

Dans Retour au meilleur des mondes, Aldous Huxley va ainsi traiter de :
- la surpopulation mondiale et les interventions humaines pour influer sur sa démographie
- le passage au "tout collectif", privant chacun de sa part d'individualisme
- les plaisirs artificiels (dénommés "soma" dans le meilleur des mondes)
- la propagande et la manipulation des masses, avec leurs possibilités commerciales, politiques, ...
- la soumission des populations passant les plaisirs artificiels mis à disposition, et prédisposant les hommes à fuir plutôt que de faire face à un problème, à accepter plus facilement ce qu'on leur suggère sous l'influence du stress ou du désintéressement (avec un petit passage par les méthodes subliminales toujours d'actualité)

Bref, un livre qui permet d'ouvrir les yeux sur des méthodes de contrôle de la société qu'Aldous Huxley avait déjà discerné à son époque, et qui n'ont fait que s'accroître jusqu'à nos jours.

Comme le cite à juste titre Aldous Huxley dans son livre, les bouddhistes affirment que la plupart des hommes traversent leur vie dans un état léthargique, de demi-sommeil, et il semble effectivement que notre société tend à nous maintenir ainsi par tous les moyens, malgré nos rares vélléités pour nous réveiller ...

Bleizmor - Bretagne - 54 ans - 23 février 2009


Le pire des mondes... 5 étoiles

Dans cet essai, Aldous Huxley fait le point sur l'état actuel de notre monde (livre à resituer dans le contexte de l'époque) en le comparant à la société imaginée dans "Le meilleur des mondes".
Analyse politique parfois un peu trop poussée et moins prenante que l'oeuvre originale, l'auteur veut surtout nous faire passer le message que ce qu'il avait imaginé est en très bonne voie pour se réaliser... Deuxième avertissement avant le pire des mondes...

Kristophe - Besançon - 45 ans - 26 octobre 2005


Hé oui... 9 étoiles

Hé oui mon pauvre Lucien, ou plutôt pauvre de nous, pauvre de l'homme qui ne se rend pas compte et qui ne se rendra jamais compte, tant bien faite est la manipulation de masse effectuée par le sommet dirigeant, que l'abêtissement est la solution rêvée du commandement et que l'abêtissement passe par Star machin et Loft bazar... Ainsi, comme tu le dis, tant que l'on donne au peuple des amusements simples et simplistes et un peu à manger, il sera satisfait et n’emmerdera pas ceux qui au-dessus de nous, bien au-dessus regardent tout cela d'un Ïil goguenard. Et le pire de tout, je trouve, le pire reste encore qu’à long terme, l’humain court à sa perte, car nulle race, quelle qu'elle soit, ne peut rester maître du monde sans intelligence, compréhension et entente. et quand tout cela s'écroulera, même le sommet s'effondrera sur cette basse base basique qu’il aura mis 6000 ans à conditionner…

Pendragon - Liernu - 54 ans - 3 juin 2002


Prophétique 8 étoiles

Un livre qui impressionne encore, près d'un demi-siècle après sa parution, par l'exactitude de sa vision. Dès 1931, Huxley annonçait, sur le mode fictionnel de l'anti-utopie, les principaux fléaux qui guettaient l'homme du vingtième siècle. En 1958, dans ce petit essai, il remet son métier sur l'ouvrage, cette fois sur le mode didactique. Une guerre mondiale supplémentaire a aiguisé l'analyse. Une guerre où a failli trompher la pire des dictatures. Mais Huxley a déjà compris que ce n'est pas par la force - physique, militaire - que cherchera à s'imposer la prochaine : pour priver les êtres humains de leur liberté, elle visera rien moins qu'à leur donner l'amour de la servitude

Lucien - - 69 ans - 2 juin 2002