La ligne de beauté
de Alan Hollinghurst

critiqué par Aaro-Benjamin G., le 11 août 2005
(Montréal - 54 ans)


La note:  étoiles
Oh my !
« La Ligne de beauté », gagnant du prix Man Booker 2004 est un livre typiquement britannique - une œuvre de prose nuancée, au propos cynique, baignant dans une atmosphère de salon victorien blafard. Situé peu après l’élection du gouvernement conservateur de Margaret Thatcher, le livre s’ouvre avec l’arrivée d’un jeune homme, diplômé d’Oxford, à la résidence d’un membre du parlement. Nick a 21 ans, il est homosexuel. Ami de Toby, le fils du député Gerald Feddens, il est accueilli chaleureusement par la famille et rapidement s’installe au grenier pour terminer son doctorat sur Henry James.

Fondamentalement, un admirateur de la beauté sous toutes ses formes, Nick s’épanouit dans cette relation parasitaire, malgré les contradictions et malgré la différence des classes. Accepté de ce cercle aristocratique où les politiciens corrompus et les femmes névrosées cohabitent avec les multimillionnaires prétentieux, le jeune protagoniste participe aux soirées mondaines arrosées de champagne, puis s’envoie en l’air, donnant lieu à quelques scènes explicites.

Non sans rappeler les œuvres de E.M. Forster ou son contemporain Edmund White, Hollinghurst livre une redoutable critique sociale de l’Angleterre des années 80s avec une plume d’une formidable finesse, un humour pincé et un style incisif. Toutefois, les lecteurs friands d’émotions fortes seront déconcertés par la sobriété, pour ne pas dire l’absence totale de revirements, de ce récit, car bien que l’environnement soit propice à la tempête, le scandale tant pressenti ne surviendra que dix pages avant la fin. De plus, il s’agit d’un ouvrage bavard, essentiellement constitué de longues conversations alimentées par des personnages suffisants, rivalisant d’intelligence pour trouver le bon mot.

Si pour certains, ceci peut être rebutant, comme pour moi, les grands amateurs de l’esprit « British », eux s’en régaleront.