Morro Bay
de Jean-Luc Cornette (Scénario), Jeanlouis Boccar (Dessin)

critiqué par Shelton, le 2 août 2005
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
Quelle histoire !
Un lycée, des élèves, des enseignants, ce qui ressemblerait à la banalité quotidienne, probablement au sud des Etats-Unis… Si ce n’était que cela nous n’en parlerions pas ensemble. Dès le départ de l’histoire, alors que l’on ne devine encore rien de ce qui va arriver, nous arriver, on perçoit une ambiance que les auteurs, Jeanlouis Boccar pour le dessin et Jean-Luc Cornette pour le texte, plantent de façon admirable, n’hésitant pas à déstabiliser les lecteurs en leur tendant de fausses pistes…
On peut croire un instant à une histoire d’amour, si on se laisse impressionner par la couverture (très belle couverture d’ailleurs) à une histoire homosexuelle, tandis que très rapidement on peut se retrouver dans une intrigue policière… Certains pourraient y voir une chronique de ville de taille moyenne en plein soleil… Mais ne comptez pas sur moi pour tout vous dire… Ah ! Non ! c’est à vous de découvrir le fond de cette histoire…
Le graphisme peut surprendre les amateurs inconditionnels de la ligne claire. Ici, le dessin utilise d’autres techniques, on peut penser à des craies grasses ou quelque chose du même genre, tandis que la narration est construite à partir d’un expressionnisme remarquable… Si vous dépassez les deux premières pages, alors c’est gagné vous irez jusqu’au bout et vous serez enchantés… comme je l’ai été !
Le récit sera entrecoupé de nombreux retours en arrière, des « flash-back » comme on dit en cinéma, et le dessinateur va utiliser le noir et blanc pour ces séquences. C’est très bien fait, pour ne pas dire plus…
Certains personnages sont assez violents, je pense en particulier au père d’Evangeline, une sorte de réactionnaire sectaire… Attention cet album n’est pas destiné aux très jeunes lecteurs. Je pense que cette histoire peut être lue à partir d’une quinzaine d’années, mais qu’elle est surtout écrite pour un public adulte. Oui, la bande dessinée n’est pas un joujou pour enfants, c’est un mode narratif qui peut toucher tous les publics, même si ça ne se passe pas en même temps pour tous les publics, cette fois-ci c’est bien pour les grands…
Mais pour entrer pleinement dans ce texte et dans ce dessin, il faut avoir une grande disponibilité, un cœur grand comme ça, aucun préjugé… bref, il faut se laisser prendre et accompagner de la première page à la dernière…
A la fin, nous aurons même notre petite séquence fantastique, je ne dirais pas pour le plaisir mais pour monter qu’il ne faut surtout pas vouloir enfermer cet album one shot dans une case, non, il est inclassable et c’est aussi une grande source de bonheur pour le lecteur…
Alors, c’est à vous de vous décider… Avez-vous envie d’essayer ? Mais si c’est oui, n’oubliez pas de me dire ce que vous en avez pensé… Merci !