Histoire infâmes
de Panos Karnezis

critiqué par Sahkti, le 28 juillet 2005
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
La Grèce oubliée quelque part
Panos Karnezis est un jeune auteur grec qui s'est établi en Angleterre il y a presque vingt ans. Ce recueil de nouvelles lui a valu un succès immédiat dans son pays d'accueil et laisse présager de futures bonnes pages dans les mois à venir.
Dix-neuf nouvelles qui se déroulent autour d'un village grec tellement pauvre et méconnu qu'il ne porte pas de nom. Un village qui renferme un échantillon plutôt folklorique de personnages de toutes sortes qui évoluent au fil des nouvelles, comme un chassé-croisé et un jeu de miroirs, des suites qui n'en sont pas vraiment même si les histoires s'imbriquent les unes dans les autres.
Il y a des moments très drôles, d'autres cruels ou pathétiques. Le Père Yerasimo, pope du village, tente de réanimer la foi de chacun mais tout cela paraît si difficile. Autour de lui évoluent un coiffeur dont le perroquet connaît l'Odyssée par cœur, un médecin qui excelle dans les suppositoires empoisonnés, une femme qui fait des cauchemars à cause des papillons… êtres étranges et étonnants qui donnent beaucoup de vie et de piquant aux récits.
Le recueil porte bien son titre, les histoires sont infâmes, sombres et cruelles, très ironiques également.
Panos Karnezis donne littéralement vie à ses personnages. Ceux-ci évoluent dans un village hors du temps, leurs histoires paraissent universelles. L'auteur pose les ambiances avec talent et réalismes, il nous raconte des histoires qui ressemblent à des contes noirs. J'ai beaucoup aimé ces nouvelles caustiques. Elles sont le reflet d'une certaine solitude, également de la perversité et de la désillusion. Il y a là derrière une formidable exploration des âmes mises à nu qui peut effrayer et donner à réfléchir. De plus, Karnezis apporte, par le côté intemporel de ses nouvelles, un regard neuf sur la modernité qui ici semble ne pas exister. Pourtant elle est bien présente, puisqu'elle passe par le regard du lecteur qui ne peut que constater ce décalage et percevoir l'histoire en fonction de celui-ci. C'est rondement bien mené!