Les hommes aussi s'en souviennent : Discours du 26 novembre 1974 suivi d'un entretien avec Annick Cojean
de Annick Cojean, Simone Veil

critiqué par Veneziano, le 23 juillet 2005
(Paris - 46 ans)


La note:  étoiles
Un document pédagogique fort utile
Ce livre est relatif à la loi de 1975 relative à l'intervention volontaire de grossesse. Il paraît trente ans après son adoption, après une âpre discussion parlementaire.
Il est composé de trois parties, la retranscription du discours de la Ministre de la Santé chargée de défendre le texte, une entrevue avec une journaliste d'un grand quotidien national et une chronologie de la législation relative à l'avortement. On pourra toujours dire que l'auteur ne s'est pas donné trop de mal pour sa conception, mais il est très utile, pour les raisons suivantes.
D'une part, on retrouve les arguments favorables à la réforme, qui était loin d'aller de soi et les risques de la clandestinité d'un tel acte, qui n'est pas un choix simple, encore moins une partie de plaisir ; d'autre part, on apprend exactement les intérêts et les positions en présence, entre les différents groupes politiques, les volontés progressistes de l'opposition, notamment du groupe socialiste à l'assemblée présidé par Defferre, qu'il ne fallait pas décevoir, la frilosité de la majorité qui condamnait une libéralisation trop grande, ce qui a eu des conséquences sur l'absence de remboursement dès 1975 de cet acte et la méthode de débat employée, avec la prise en compte des avis religieux et philosophisique. Personnellement, je ne savais pas que le gouvernement précédent, dirigé par Pierre Messmer, avait songé à la réforme, mais y avait renoncé, essentiellement par conservatisme et par crainte de trop de houle populaire, le Président Pompidou ayant mis son poids pour freiner le mouvement. J'ai été très étonné d'apprendre les réticences du Premier ministre en exercice, à savoir Jacques Chirac. Curieux bonhomme... Comme on le sait davantage, la Ministre, ancienne déportée et magistrate spécialisée en droit de la santé et en application des peines, a été soutenue par le Président de la République, Monsieur Giscard d'Estaing, et les rangs de l'opposition. Dans la majorité, on note notamment le rôle de Monsieur Bernard Pons, député et médecin de campagne.
Enfin, la chronologie est un instrument utile pour suivre l'évolution, la loi Neuwirth sur la cntraception qui a précédé la réforme, la loi de 1979 qui l'enterrina, la loi Aubry-Guigou allongeant le délai légal et la réforme Douste-Blazy.

J'avoue être un peu de parti pris. Cette réforme me paraît comme relevant d'une importante nécessité, et salue le courage de cette dame, face aux colibets et aux injures, souvent macistes et peu fondées sur des arguments réfléchis. Je l'admire.
Un rappel nécessaire 9 étoiles

Un livre sobre, sans prise de position passionnée ni haineuse. Juste le rappel des faits: pourquoi une loi autorisant l'avortement, les arguments, les contre-arguments, les forces politiques en présence, le contexte historique (notamment les craintes liées à la dénatalité), les propos injurieux auquels Simone Veil a été confrontée. C'était il y a 30 ans en France.

Ce livre est un rappel nécessaire, surtout pour les personnes de ma génération qui ont toujours vécu avec la contraception et pour qui il semble inimaginable que les femmes des générations précédentes ne pouvaient vivre leur sexualité que dans la crainte d'une grossesse.

Ce livre est également un rappel nécessaire de la fragilité d'une loi aussi importante que celle légalisant l'avortement. En Belgique, il a fallu attendre 1992 (et la farce royale que l'on connait) pour que l'avortement soit partiellement dépénalisé. Aux Etats-Unis, on assiste actuellement à une croisade acharnée des anti-avortements pour remettre en question le droit à l'avortement. Et rappelons tous les pays où l'avortement est purement et simplement interdit, même en cas de danger de mort de la femme.

Simone Veil, une grande dame.

Mieke Maaike - Bruxelles - 51 ans - 28 juillet 2005