L'Instant fatal, précédé de "Les Ziaux"
de Raymond Queneau

critiqué par MOPP, le 10 juillet 2005
( - 87 ans)


La note:  étoiles
Cet amour des mots, des mots en vie et en liberté !
On ne présente plus QUENEAU, cet auteur qui respecte des règles tout en dérèglant le système et cela avec une préméditation méthodique.

Car il semble écrire des alexandrins et soudain la machine s'emballe, la métrique devient incertaine, approximative comme dans MAGIE NOIRE (sonnet éclaté), dans MAGIE BLANCHE, dans CREVASSE :

"qui tire la langue au crétin croquemitaine ?
cré nom ! crois-je bien que c'est moi "

Et sa parole peut devenir profonde, dénoncer la haine :

"Tant de sueur humaine
tant de sang gâté
tant de mains usées
tant de chaînes
tant de dents brisées
tant de haines ..."

Certes QUENEAU ne peut pas être classé comme poète engagé, mais il reste celui qui parle, qui dit ce qui doit être dit.

ET, avant SARTRE, il nous proposera dans ses poèmes une méditation incessante sur l'être et le néant.

SI TU T'IMAGINES, chante GRECO... c'est du QUENEAU...

Et il y a, mine de rien, cet aspect surréaliste qui surgit dans certains de ses poèmes.

Et ce poème magnifique :

"Une fleur mauve
et du vert-de-gris
un ciel fauve
et l'odeur de Paris
le métro qui roule
le cri des absents
une vaste foule
qui souffre des dents
puis un cor de chasse
puis la tour dedans
le palais de glace..."

Il y a aussi :

"Qui sait si l'on meurt
dit le rétameur
baisant la coquille d'une casserole ronde
car si la rumeur
prévient le r'ameur
alors je ne m'inquiéterai plus de rien au monde"

QUENEAU : à lire, d'urgence.