Le gone du Chaâba
de Azouz Begag

critiqué par Sahkti, le 10 juin 2005
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Apprendre à s'intégrer
Judicieuse réédition de ce roman autobiographique de Azouz Begag, fraîchement promu Ministre délégué à la Promotion de l'égalité des chances et qui semble connaître le domaine sur le bout des doigts pour avoir lui-même vécu l'expérience de l'intégration.
Paru à l'origine en 1986, ce livre (dont le sitre signifie plus ou moins le gosse des bidonvilles) retrace le parcours d'un enfant qui doit lutter contre l'intolérance et le racisme. Omar a neuf ans et aimerait bien s'intégrer, étudier et réussir dans la vie. Voeu que tout le monde formule, mais quand on est un petiot un peu arabe et un peu français, ce n'est pas très facile et ce ne sont pas les moqueries des grands ou des autres mômes qui vont arranger les choses. Omar a envie d'apprendre mais si il devient trop malin, les copains diront qu'il n'est plus un arabe, qu'il n'est plus des leurs. Dilemme.
Un roman tendre, touchant et dur aussi. On ne peut s'empêcher de ressentir de l'empathie pour ce petit garçon et partager avec lui ses difficultés. J'avais la crainte d'une écriture sirupeuse, un peu trop moraliste et empreinte de bons sentiments. Ce n'est pas vraiment le cas même si par moments, j'ai trouvé que cela sentait un peu le produit éducatif formaté.

Un extrait:
"Quelques élèves marquent des signes d'impatience. Le maître se lève, s'avance au milieu de l'allée centrale, la pile de carnets à la main, et lance le verdict:
- Premier...
La classe se raidit.
- Premier : Ahmed Moussaoui.
Stupéfaction. Horreur. Injustice. Le bruit et les choses se figent brutalement dans la classe. Personne ne regarde l'intéressé. Lui, Moussaoui, premier de la classe ! C'est impossible. Il ne doit même pas savoir combien font un plus un. Il ne sait pas lire, pas écrire. Mais comment a-t-il pu ?...
Le visage de Laville s'éteint. Il était persuadé d'être premier et le voilà grillé par un fainéant d'envergure supérieure, un même pas Français.
Le visage de M. Grand est impassible. Ses yeux restent rivés au papier qu'il tient dans les mains. Il ouvre à nouveau la bouche:
- Deuxième : Nasser Boueffia.
Cette fois-ci, c'est moi qui vacille. Le maître doit être en train de lire son papier à l'envers, peut-être en arabe."
Récit sur l'intégration 6 étoiles

Une oeuvre autobiographique touchante, sincère, à la fois drôle et cocasse, mais aussi âpre et dure. C'est un récit qui se veut honnête, intègre, et qui cherche à transmettre un vécu qui semble en tout point authentique.
D'une lecture simple et rapide, ce n'en est pas moins un témoignage important sur les conditions d'immigration (notamment la souffrance d'un père) et sur la difficulté d'intégration (celle d'un fils, qui doit composer sans cesse).
On s'immerge avec plaisir dans cette tranche de vie.

PPG - Strasbourg - 48 ans - 28 mars 2012


Chercher son identité 7 étoiles

L’aspect autobiographique de ce roman occupe toute la place. En lisant ces souvenirs d’enfance racontés avec une belle simplicité, j’ai n’ai pas eu peine à croire que tout était vrai. L’ajout d’une trame romanesque pour relier les fragments aurait permis d’aller plus loin dans l’exploration des affres du racisme.

Ceci étant dit, la sincérité, l’humour et le charme de l’auteur nous font passer un bon moment. Avec une économie de mots, il évoque parfaitement ce bidonville et ses figures attachantes.

Aaro-Benjamin G. - Montréal - 55 ans - 3 août 2009