Souvenirs
de Anastasiâ Ivanovna Cvetaeva

critiqué par Sahkti, le 23 mai 2005
(Genève - 50 ans)


La note: étoiles
Souvenirs de vie
"La passion au sens propre, peut-être même pour les lettres qui les composaient. Le son des mots rempli à ras bord de leur sens nous procurait une joie absolument matérielle. Nous étions dans une communauté comme si nous étions tombées, comme dans le conte, dans une grotte pleine de pierres précieuses gardées par des gnomes."

Anastassia est la soeur cadette de Marina Tsvetaeva, superbe poétesse russe dont je vous recommande l'oeuvre. Anastasia parle bien entendu longuement de sa soeur, mais aussi de toute la famille Tsvetaeva, de la vie politique et intellectuelle de la Russie de ce début de XXe siècle. Le recueil prend fin en 1927, année de la dernière entrevue entre les deux soeurs, lorsque Marina s'établit à Meudon. Anastasia est arrêtée et déportée en Sibérie en 1937, alors que Marina revient en Russie en 1939, deux ans avant de se donner la mort. Des souvenirs fragiles et poignants, l'amour d'une soeur pour sa famille et son pays, la tristesse face aux aléas de la vie. Ce recueil de souvenirs intimes est une manière sensible et touchante d'entrer une nouvelle fois dans la peau de Marina Tsvetaeva, à travers le regard de sa sœur. Je savais la poétesse fragile, je découvre que sa sœur l'est également et qu'il règne sur cette famille une peur liée à l'exil, au destin de la Russie, à la misère et à des fins tragiques.
La plume d'Anastassia Tsvetaeva est élégante et soignée, moins emportée ou lyrique que celle de Marina mais tout aussi puissante. Cet ouvrage n'est pas uniquement un homme rendu à une sœur et à une famille mais aussi une livraison de soi qui n'a pas dû être aisée, certains souvenirs étant particulièrement douloureux.