Parcours de la reconnaissance, trois études
de Paul Ricoeur

critiqué par Sahkti, le 27 avril 2005
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Qu'est-ce que la reconnaissance?
En partant du terme "Reconnaître", Paul Ricoeur constate que le Littré en distinguait jadis une vingtaine de sens. Les dictionnaires ont depuis élagué tout cela et on peut sans doute se cantonner à trois grands thèmes: faire preuve de gratitude, relier des images à un objet pour l'identifier et tenir pour vrai.
Tout cela, c'est de la théorie, évidemment… Mais justement, en parlant de théorie, en existe-t-il une à propos de la reconnaissance?
C'est le propos de cet ouvrage, synthèse de diverses conférences, dans lequel Paul Ricoeur mêle philosophie et linguistique. Si les lexicologues semblent s'accorder sur le mot "Reconnaissance", les philosophes se dispersent beaucoup plus. Alors Ricoeur a décidé d'aller y voir de plus vrai et c'est vraiment très intéressant.
En particulier son analyse basée sur l'acte intellectuel de reconnaître quelque chose, que ce soit une personne, un objet ou une idée. Cette identification doit passer par une action, celle de la capacité à reconnaître quelque chose en cherchant à le faire. Il y a là investissement, responsabilisation, voire prise de risque. Il faut aller vers l'autre si on veut l'identifier et le reconnaître.
Arrive ensuite l'épineuse question de la reconnaissance dans le sens réciprocité, et celle du multiculturalisme que Paul Ricoeur a conservé pour la dernière partie de l'ouvrage, afin de ne pas baser tout l'ouvrage sur la notion même de multiculturalisme, âprement discutée par certains. Le propos de l'ouvrage ne réside pas uniquement là.

Difficile de résumer la théorie de Paul Ricoeur contenue dans ces conférences, d'autant plus que chacun la comprendra sans doute différemment selon sa personnalité. On peut cependant en dégager quelques pistes intéressantes, notamment lorsque l'auteur fait référence à une éthique et une politique de la solidarité à mettre en place dans notre Europe qui revendique l'égalité des droits mais distribue les moyens d'arriver à cela de façon fort peu équitable. Comment reconnaître l'autre ou soi-même si l'estime sociale n'existe pas? Le déni de reconnaissance est doute le plus grand tort qui existe, car implicitement, il nie l'existence et justifie dangereusement certains actes.