Maître du monde
de Jules Verne

critiqué par ALF, le 14 avril 2005
(Ondres (40) - 44 ans)


La note:  étoiles
Passez votre chemin
Initialement paru en 1904, «Le Maître Du Monde» soulève une question maintes fois abordée depuis et désormais classique, mais pourtant diablement originale pour l’époque : qu’adviendrait-il si un homme, un état, ou un groupuscule, venait à s’emparer d’une technologie suffisamment puissante et destructrice pour asservir rapidement et durablement l’humanité toute entière ? Car si ce roman méconnu commence à la manière d’une aventure comme il en existe tant d’autres, c’est bel et bien de domination totale et forcée de notre société dont il s’agit ici. Parce que ses supérieurs directs redoutent une éruption volcanique en Caroline du Nord, l’agent de police John Strock se voit confier la mission de gravir et d’ inspecter le mont Eyrie d’où s’échappent d’alarmantes traînées flamboyantes. Très vite, Strock échoue dans sa tentative d’ascension et doit bien malgré lui rentrer à Washington, et ce sans être parvenu à percer les mystères du village de Morganton. C’est alors que trois véhicules prodigieux sont aperçus tour à tour par des passants aussi subjugués qu’incrédules ; si l’un vole, l’autre roule, et le dernier navigue, tous semblent défier les lois de la physique et représenter une menace sérieuse pour la sécurité du pays tout entier. Quelque part, et sans motif apparent, un homme mégalomane semble prendre plaisir à se jouer des lois et de la bienséance ! Malheureusement, et après une première moitié particulièrement alléchante, ce roman perd rapidement de son intérêt et débouche sans qu’on s’y attende sur une fin bâclée et extrêmement décevante. Sans doute Verne voulait-il ultérieurement apporter une suite à cette histoire qui en est déjà une (mais nommer l’épisode original dévoilerait l’identité de notre mystérieux personnage), toujours est-il que la deuxième partie laisse inéluctablement le lecteur sur sa faim et ferait presque oublier tout le génie de l’auteur du «Tour Du Monde En 80 Jours»... En dépit d’une idée de départ et d’une certaine profondeur qui auraient sans doute pu déboucher sur la publication d’une oeuvre véritablement incontournable, «Le Maître Du Monde» déçoit par sa conclusion abrupte ainsi que par son approche des différents évènements bien trop lisse et pas suffisamment développée. Vous devrez (hélas?) y passer si vous désirez parcourir tout Jules Verne, mais ne vous attendez surtout pas à retrouver ici la magie du «Voyage Au Centre De La Terre» ou des «Cinq Semaines En Ballon».
Roburbatif 2 étoiles

On devine rapidement l’âge du livre au style de la narration. Certains passages sont introduits par des expressions caractéristiques d’un journalisme désuet comme «Et voilà comment ça s’est passé». Mais, dans ce cas-ci, ce genre de détail met encore plus en évidence le manque de fluidité et la mauvaise construction du roman. On se serait avantageusement passé des froides données géographiques directement tirées d’une encyclopédie.
Si le style a mal vieilli, les bases technologiques sont très modernes pour l’époque et c’est sans doute le seul mérite de ce roman. Car l’histoire, qui ne décolle jamais, manque totalement de subtilité, de personnages charismatiques et de moments forts. Le scénario, visiblement improvisé, rappelle les vieilles bandes dessinées SF américaines.
La fin est expédiée sans ménagement et rendue encore plus absurde par la tentative de donner un peu d’épaisseur au livre. En effet, l’auteur nous gratifie d’un résumé complet de «Robur-le-conquérant» dont le présent ouvrage se veut la suite. Un bien morne Verne, qui sent déjà le sapin, doublé par une descendance très peu inspirée.

Jean Meurtrier - Tilff - 49 ans - 12 décembre 2008


Inachevé 7 étoiles

Ce roman de Jules Verne est resté inachevé et pour cause... Le grand Jules est mort en 1905, sans avoir pu finir ce livre ce qui explique cette "fin abrupte".
De plus, à la fin de sa vie, Verne, diminué par la maladie, aigri, n'avait plus la verve qu'on lui connaissait. Il vivait retiré du monde, isolé, presque reclus et était devenu très misanthrope...et ça se ressent très fort dans cet ultime livre.
Soyons donc indulgent avec lui qui nous a laissé d'aussi merveilleux livres. Aurais-je été le lecteur que je suis devenu sans 20.000 lieues sous les mers ou le tour du monde en 80 jours ? Aurais-je rêvé de découvrir les steppes russes sans Michel Strogoff ?
Merci Jules, et tant pis pour ce livre un peu moins bon !

Patman - Paris - 62 ans - 15 avril 2005