L'île aux chiens
de Françoise Enguehard

critiqué par Eireann 32, le 14 avril 2005
(Lorient - 77 ans)


La note:  étoiles
La fin d’une époque.
La vie d’une famille dont les parents ont quitté la misère et la Bretagne à la fin des années 1880 pour Saint-Pierre-et-Miquelon puis ensuite pour l’île aux Chiens. Nous les suivrons dans leur vie de tous les jours marquée par les drames de la mer, de la guerre et aussi de la vie quotidienne avec la mort, souvent jeune dans ces îles au climat éprouvant.
Marie-Jo est allongée avec son petit-fils dans sa maison de l’île aux Chiens, veuve depuis plusieurs années. Elle est heureuse de ces présences près d’elle. Elle revoit sa vie, son départ de Bretagne après bien des hésitations, son mariage avec Victor un «pays» de Trébédan et leur vie loin de toutes leurs racines. Victor était parti le premier, pratiquement en cachette, il était paysan, la vie le fera pêcheur, comme beaucoup de jeunes gens à l’époque, les mousses venaient surtout de l’intérieur de la Bretagne. Victor comprenant que la pêche au grand large le laissera dans la misère, il s’installera et achètera un bateau, fera construire une maison et fera venir Marie-Jo. Ils auront de nombreux enfants, travailleront très dur, Victor innovera en matière de pêche, ils achèteront un petit commerce. La politique en matière de pêche interdira aux navires français certains bancs de Terre-Neuve, causant la perte de l’île et le départ de ses habitants.
Victor est un homme libre, fier, aventureux, dur au mal et au travail. Il introduit les moteurs sur les bateaux, prend des matelots, fait parti des syndicats de marins pêcheurs. Mais la mer est dure, Victor y laissera sa santé et sa vie.
Marie-Jo est la représentation typique de la paysanne bretonne, fière et ombrageuse, elle aime ses parents, mais rêve d’une autre vie. Ses filles lui amèneront des satisfactions, mais elle sera obligée pendant un voyage de laisser Florentine, une de ses filles, en Bretagne car il était commun à l’époque pour les grands-parents de soulager les parents et prendre en charge un des petits-enfants. La douleur est très forte car les voyages sont longs et onéreux. Après la mort de Victor elle continuera sa vie à l’île aux Chiens, jusqu'à ce que la vieillesse ayant eu raison de son entêtement, elle finisse sa vie à Saint-Pierre en s’éteignant doucement. «Votre mère s’est tuée à la tache, ma pauvre Simone ». Leurs enfants aussi payeront un lourd tribu à la mer, à la maladie ou aux excès.
On sent chez l’auteur un amour profond pour ses grands-parents et pour la Bretagne. La vie était dure, ce livre évite la «folklorisation » à la Pierre Loti. Ses descriptions des conditions de vie de pêcheurs (hygiène et alcoolisme) sur les goélettes ou de la vie des graviers (enfants qui retournaient les morues sur des plages de galets pour les faire sécher) sont, je pense en dessous de la vérité «Voulez vous savoir jusqu’où peut descendre l’exploitation de la pauvre bête humaine? Tachez de venir ici quand un jour que débarqueront les graviers de Saint-Pierre » Charles le Goffic.
Les dernières pages de ce livre m’ont bouleversé comme très rarement un livre l’a fait. «Avec elle, ils le savent, c’est la Bretagne qui s’en va de leur vie de Nord-Américains ».
dommage 1 étoiles

ta critique m'a donné envie de decouvrir ce livre mais malheureusement il est épuisé :-//

Clementine - - 56 ans - 14 avril 2005