Son frère
de Philippe Besson

critiqué par Sahkti, le 28 mars 2005
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Entre rage et désespoir
Thomas est atteint d'une maladie incurable. Face à l'issue dramatique, il ressent le besoin d'avoir son frère Lucas à ses côtés, il lui fait signe après une longue période de silence. Suivent de longs mois de maladie et de souffrance que Lucas raconte, il assiste son frère jusqu'au bout et nous fait partager cette épreuve.

Ce qui m'a énormément frappée (et touchée) dans ce texte de Besson, c'est la rage qui en ressort. Un homme se meurt, son frère le soutient. Cela semble naturel, cela relève de la logique humaine et pourtant...assister Thomas de la sorte demande de nombreux efforts et cela fait naître de la colère, de la révolte. Face à la mort bien sûr mais aussi face à ce poids trop lourd à porter, face à ces responsabilités à assumer, face à l'inéluctable qu'on ne peut repousser.
Les aller-retours entre l'hôpital et l'île des jours heureux, entre l'étouffement et l'air marin, entre le soleil et la grisaille n'enlèvent rien à la sensation de pesanteur qui augmente au fil des pages. C'est une situation désespérée contre laquelle il est impossible de se battre et cette impuissance peut rendre fou.
Le processus narratif employé, ce journal d'un frère, aide à prendre une certaine distance mais en même temps l'intimité est tellement proche et palpable qu'on ne peut que s'engouffrer avec Lucas dans cette spirale sans retour. C'est éprouvant, Besson ne ménage pas ses lecteurs, il les embarque avec lui vers ce naufrage et c'est très bien. Cette implication "forcée" vaut bien mieux que tous les cocons d'ouate présentés par d'autres écrivains ou metteurs en scène pour décrire la mort. Car la mort ne se décrit pas, elle se vit.
L'engrenage est ici fatal pour tout le monde, cela se fait sans pathétisme à outrance ou effets de manche, tout y est montré et raconté avec réalisme et c'est sans doute un des aspects qui donne au livre toute sa force.
Fulgurance 9 étoiles

Ce roman est très court. On y suit la découverte du mal de Thomas et sa déchéance. A travers le regard de son frère.

J'ai été très émue par cette lecture. En quelques pages, l'auteur dresse le tableau de cette famille, aisée, aimante mais aussi blessée: les souvenirs d'enfance donnent consistance à la relation fraternelle. Il décrit avec une colère palpable l'acharnement thérapeutique dont Thomas est victime. Puis, le temps passant, l'acceptation arrive et malgré la plaie purulente que laisse cette mort, la vie doit continuer.

Ce roman trace de façon précise les étapes d'un deuil, d'une perte incommensurable, celle de celui qui nous tient la main dans les pires et les meilleurs moments, celle de son frère...

Nymphette - Paris - 43 ans - 14 janvier 2011


la maladie et la mort : Un sujet délicat traité avec pudeur 9 étoiles

L’auteur aurait pu intituler son livre : « mon frère ». Puisqu’il s’agit du parcours de Thomas, frère de Lucas, le narrateur. En Lucas, alias Philippe Besson ?, chaque lecteur peut retrouver son cheminement face à un proche atteint d’une maladie incurable ; ce qui explique peut-être cet adjectif possessif 3e personne. Son frère est le 2ème roman de Philippe Besson. Celui-ci a été adapté au cinéma par le réalisateur Patrice Chéreau.
Chaque jour est compté et il en ressort un retour dans le passé, vers des moments intensément vécus. La mémoire d’avant la maladie apporte la part de bonheur qui permet de supporter l’agonie.
Le narrateur dépeint aussi toute la difficulté de communication entre le personnel hospitalier et le malade avec son entourage. Forcément, le malade et ses proches sont des victimes qui n’ont plus que la révolte pour exister.
Ce roman est bâti à la façon d’un journal intime, mais les dates s’entremêlent en deux périodes : la première relate les débuts et la progression de la maladie et la deuxième, le séjour du narrateur et de son frère à l’île de Ré lors de la phase finale. L’île de Ré évoque pour eux les vacances durant leur jeunesse.

Ddh - Mouscron - 83 ans - 13 février 2007


Touchant 8 étoiles

J’avais découvert Philippe Besson dans les lectures de je ne sais plus quel pédébloggeur. Ca n’a que peu d’importance, j’ai été tenté par les critiques unanimes sur ses ouvrages, assez pour me lancer dans l’aventure.

Je soupçonne ce livre d’être autobiographique. On ne peut pas écrire aussi bien et aussi juste sur ce sujet sans l’avoir fatalement touché du doigt. C’est un livre admirable, sincèrement. Pour qui n’est pas infirmier, je ne sais pas, je ne jurerais de rien. Mais chez moi, ça a trouvé un écho particulier, celui du lien fraternel, celui des derniers instants, de la maladie et de l’humain face à la maladie, l’inéluctable, l’angoisse de mort. La vie.

Je le trouve réellement touchant, bien écrit. Pas à m’en faire larmoyer, non, mais juste assez pour émouvoir et toucher le lecteur, faire réfléchir, poser les bonnes questions. Se retrouver dans le portrait de la médecine, comprendre mieux cette vie de malade.

Philippe Besson a su raconter avec brio quelque chose qu’il est dur de faire passer par les mots. Et en ça, c’est un très beau livre.

BONNEAU Brice - Paris - 40 ans - 5 février 2007


Sentiments contradictoires 6 étoiles

Je l'ai fini hier soir , je l'ai lu assez rapidement . L'idée en soi est originale , le journal intime du frère . Pour moi, c'est une mort racontée avec pudeur , il n'y a pratiquement pas de pleurs, de paroles, tout est dans les silences et les regards et c'est grâce à eux qu'on peut comprendre l'horreur de la situation . A travers la mort de Thomas, Lucas raconte son histoire , leur histoire, ce lien indestructible qui les unit.
Tout les autres sont partis ( Claire , Vincent , leurs parents qui doivent trop souffrir ) Thomas en est bien conscient puisqu'il dit à Lucas "à la fin il ne restera que toi".
Les "deux frères" sont assez forts. Lucas raconte avec courage la vie de Thomas , il ne baisse jamais les bras, est là pour Thomas en toute circonstance et je pense que c'est sa présence qui rassure le plus Thomas
Le style du livre est à la fois assez sobre , mais très intime , on rentre dans cet univers , on s'inquiète avec Lucas et on souffre avec Thomas .. mais pourtant il me manque quelque chose pour que je dise que j'ai vraiment aimé ce livre mais je n'arrive pas à mettre le doigt dessus .
Bien que Lucas (et Thomas ) sache la fin dès le début, il n'arrive pas à faire face lorsqu'il se retrouve seul , il le dit lui-même , on ne peut pas préparer cette souffrance à moins de la vivre .

Tyty2410 - paris - 38 ans - 16 mars 2006