Eloge de la lecture. La construction de soi
de Michèle Petit

critiqué par Cuné, le 16 mars 2005
( - 57 ans)


La note:  étoiles
la lecture ne rend pas vertueux, mais construit
"On ne lit pas seulement pour maîtriser des informations car le langage n'est pas réductible à un instrument ou à un outil de communication. On ne lit pas pour briller dans des salons ou pour singer les bourgeois, qui du reste ne lisent pas tous, loin de là. Beaucoup de femmes et des hommes, un peu moins nombreux, lisent par goût de découvrir, et pour inventer du sens à leur vie, y compris dans des milieux populaires. Pour sortir du temps, de l'espace quotidien, accéder à un monde élargi. Pour s'ouvrir à l'inconnu, se transporter dans des univers étrangers, se glisser dans l'expérience d'un ou d'une autre, s'approcher de l'autre en soi, l'apprivoiser, moins le redouter. Pour savoir ce qui a été inventé comme solutions à la difficulté d'être de passage sur terre. Pour habiter le monde poétiquement et ne pas être seulement adapté à un univers productiviste."

Ce petit passage, dans la conclusion, reprend l'essentiel des idées évoquées dans cet essai. Michèle Petit est anthropologue au LADYSS (CNRS/Université Paris I). Elle s'appuie ici sur des témoignages recueillis dans tous milieux, pour en dégager les thèmes principaux qui posent la lecture comme acte constructeur de soi : l'identification, la métaphore, la lecture réparatrice etc... Avec force citations d'auteurs et d'anonymes, elle dresse comme un portrait de ce que peut apporter la littérature dans une vie.

Et c'est très intéressant. Rien de fondamentalement inédit, mais une mise en scène avec clarté du postulat de lecteur dans le monde, aujourd'hui.
La construction de soi ou l'intimité rebelle 8 étoiles

Je viens de découvrir cet essai . Il me semble vraiment très complet et compréhensible pour tous, même pour les lecteurs débutants ou hésitants.

Deux versants importants de la lecture y sont abordés, soit la toute-puissance prêtée à l'écrit dont on s'est beaucoup servi pour assujettir, discipliner, soumettre ou prendre dans les filets d'une "identité ". Et l'on s'en sert encore.

Le second est la liberté des lecteurs. La domination du lecteur n'est jamais assurée. L'alchimie de la réception des textes préserve une certaine liberté et fantaisie du récepteur.
J'aime beaucoup l'image du "nomade braconnier" que serait le liseur voyageant sur les terres des auteurs et y "braconnant" à l'insu des maîtres!!
Les découpages effectués consciemment ou inconsciemment par les lecteurs enrichissent leur" viatique" pour penser leur expérience , lui donner un sens.
L'essai est émaillé de nombreuses citations d'écrivains ou d'exemples démontrant l'efficacité des lectures comme : explorer d'autres cultures, faciliter la rêverie,etc..

Un exemple qui m'a particulièrement touché est celui de Thomas Bernhard qui est "sorti" de sa maladie par les "lectures-visites" de sa grand-mère"et la découverte des "Démons" de Dostoïevski!

Très beau travail! A offrir à tous ceux qui doutent de l'intérêt de la lecture et à tous les "passeurs" de livres , comme encouragement.

Donatien - vilvorde - 81 ans - 15 novembre 2009