Bienvenue dans un monde inutile : Les aventures de Jean-No, la fashion victime la plus sympathique de France
de Philippe Nassif

critiqué par B1p, le 1 mars 2005
( - 51 ans)


La note:  étoiles
branchouille alternative
Philippe Nassif officie comme journaliste dans différents médias. Personnellement, j'ai fait sa connaissance dans les colonnes de l'excellent magazine "Technikart". Qu'est-ce donc que ce machin au nom un peu abscons, me demanderez-vous ? En gros, le magazine des "branchés libertaires", un repère de jeunes gens fougueux qui aiment ruer dans les brancards et décrypter l'avancée du monde à travers ses événements les plus fashion. Attention. Ici, on est pas dans Max. En gros, on n'est pas dupe de toute la merde médiatico-commerciale et de ses feux de paille, mais le problème est qu'il faut bien croire à quelque chose pour vivre et qu'il vaut mieux croire que la hype contribuera à sauver le monde plutôt que d'attendre au fond de son lit que les années passent.

Or donc Philippe Nassif officie dans ce canard en tant que gourou à la recherche de la post-humanité, ce qui nous vaut généralement moult articles, autant de délires scientifico-philosophico-hermétiques, une fascination pour Maurice Dantec, Brett Easton Ellis, Fight Club ou encore Michel Houellebecq.

Voilà pour le décor.

Il se fait que Philippe N. a tenu pendant longtemps dans les colonnes du même magazine une chronique : les aventures de Jean-No. L'ouvrage susmentionné en est la compilation.

Qui est Jean-No ? me demanderez-vous. En gros, comme le dit le sous-titre du livre, la fashion victim la plus sympathique... L'incarnation de ce qui fait l'essence du magazine : une espèce de gars constamment à l'affût des tendances qui pourraient donner un sens à sa vie, tout en sachant pertinemment que cette recherche souligne toujours plus la vacuité de son existence.
Mais il ne faudrait pas prendre ça au tragique. Au contraire, les aventures de Jean-No sont racontées avec ironie et c'est ce qui rend finalement le héros sympathique. Jean-No danse du r'n'b, fait de la méditation transcendantale, mange des champignons hallucinogènes, fait des dj-sets, travaille dans une start-up, adopte la hacker-attitude... Jean-No est surtout constamment largué.

Des chroniques hebdomadaires ont déjà fait d'excellents romans. On se souviendra que les Chroniques de San Francisco d'Armistead Maupin (qui étaient aussi pas mal dans le genre "description des manières de vivre alternatives") sont d'abord parues dans un journal avant d'être compilées. Pour les chroniques de Philippe Nassif, ben disons que "ça le fait" beaucoup moins. Beaucoup des vignettes font très "private jokes" et en dehors du cercle des initiés, ça tombe un peu à plat. Mieux vaut avoir tâté de toutes les tendances possibles et imaginables pour saisir ce que leur critique détournée a de pertinent.
Enfin bref. Moi personnellement, ça m'a un peu ennuyé, quoique bizarrement les vignettes s'améliorent sur la longueur pour être franchement tordantes sur la fin. Il semblerait que Philippe Nassif se soit progressivement lâché pour laisser entrer franchement le burlesque dans ses histoires (Aaahhh ! ce "pouffe-glamour" !).
Mais au total, c'est un peu court, et en gros, on n'en retient pas grand chose, sauf peut-être si on se sent vraiment concerné, ce qui n'est malheureusement pas mon cas.

« C’est dans ce Shopi que tu comprends que toute la révolution branchée, Actuel, Nova, Technikart, l’underground, la pop culture, le cyber, les Daft Punk, c’est un vaste fiasco. Nous voulions faire advenir une société cool, nous avons juste défriché les derniers territoires encore sauvages afin d’en permettre l’exploitation par les commerciaux. La branchitude n’aura servi qu’à te vendre plus cher des produits dont tu n’as rien à foutre. »
Arthur jette un regard inquiet par dessus son épaule, reprend sa respiration et se penche vers Jean-No :
« C’est horrible, mais je crois bien que le branché n’est que l’avant-garde du capitalisme mondial, l’idiot du village global, le mec tout juste bon à te souhaiter la bienvenue dans...
- ... un monde inutile, répète Jean-No, le soir même attablé au Korova, le restaurant de Jean-Luc Delarue, en compagnie de Nordine et Sybille. Il a raison sur ce coup, précise-t-il en repoussant sur le bord de son assiette les grains de riz gluant mijotés au Coca-Cola. Tu comprends être branché c’est jamais que jouer l’éclaireur au service de la matrix marchande. »
moi j'ai adoré 8 étoiles

moi je l'ai dévoré, j'ai ri, bien ri, parfois moins mais c'est comme ça dans beaucoup de livres... mais franchement c'est super comme livre ne plus ça nous refait visiter les divers courrants de mode qui ont traversé notre chère capitale et les endroits branchés où se rendre ;)!

Liçouille - lucciana - 42 ans - 1 mars 2005