39 rue de Berne
de Max Lobe

critiqué par Pucksimberg, le 25 décembre 2025
(Toulon - 46 ans)


La note:  étoiles
Du Cameroun à la Suisse pour plus de tranquillité ?
Dipita est le narrateur de ce roman, jeune camerounais, qui a atterri en Suisse, à Genève, dans un quartier populaire dans lequel sa mère Mbila se prostitue. Au départ, rien ne la destinait à cette profession, mais l’oncle Démoney a misé sur l’envoi de sa sœur en Suisse pour qu’elle connaisse le confort matériel. Cependant, les événements ne feront pas d’elle une danseuse. « Ma mère dit que dans la vie, il y a des trucs qu’elle ne pardonne pas, même si tu lui donnes un container de crèmes dépilatoires. Quand elle dit ça, moi, je peux voir dans ses yeux qu’elle veut parler de ce que lui a fait tonton. » Le lecteur suit donc ces deux personnages dans un quartier populaire, entourés de prostituées. Nous passons donc du temps dans l’intimité de ces femmes hautes en couleur, chaleureuses et spontanées. Dipita découvre aussi son homosexualité en tombant amoureux d’un jeune homme blond aux yeux clairs … Le lecteur apprend très vite dans le roman que le narrateur écrit d’un pénitencier dans lequel il est emprisonné sans en connaître la raison …

Ce roman est plein de vie et nous immerge dans un univers duquel nous ne sommes pas forcément familiers. La condition des habitants au Cameroun est évoquée à travers des personnages marquants. C’est à la fois leur parler et leur quotidien compliqué qui est décrit. Le monde de la prostitution est aussi abordé et ce sont des femmes avec leurs joies et leurs tourments qui sont dépeintes et qui constituent une famille avec des valeurs. La langue utilisée est à l’image des personnages, vivante, orale parfois, et sans filtres. Tout ce monde est décrit à travers les yeux d’un jeune homme qui narre ces événements avec sa sensibilité et ses idées. Cette naïveté donne plus de force au récit.

Les relations entre les personnages sont bien décrites et interrogent sur les sentiments. Il y a cette solidarité entre les prostituées qui semble saine. La relation entre mère et fils peut questionner le lecteur. Par amour peut-on tout demander à un être aimé ? La relation entre le narrateur et son premier copain présage des relations homosexuelles avec leurs travers. Derrière la légèreté de la langue et des êtres pleins de vie, le roman dépeint une réalité, loin d’être rose.