Alberto Giacometti - Une aventure moderne
de Catherine Grenier

critiqué par Septularisen, le 7 décembre 2025
( - - ans)


La note:  étoiles
GIACOMETTI REDÉCOUVERT!
On ne présente plus l’artiste suisse Alberto GIACOMETTI (1901-1966), artiste majeur du XXe Siècle qui, s’il est surtout connu pour ses sculptures, s'est également adonné à la peinture et au dessin. Ce livre est donc le catalogue de l’exposition : «Alberto Giacometti, une aventure moderne», qui s’est tenue au LaM (Lille Métropole Musée d’Art Moderne, d’Art Contemporain, et d’Art Brut) de mars à juin 2019.

Ce catalogue présente plus de cent cinquante pièces de l’artiste (dont de nombreuses photographies de l'artiste et de son atelier qui permettent de replacer les œuvres dans le contexte de leur création…) parmi lesquelles figurent quelques-uns de ses plus grands chefs-d’œuvre. On retrouvera, - entre autres -, des œuvres provenant de la Fondation Giacometti, le Musée national d’art moderne – Centre Pompidou, la Bibliothèque Jacques-Doucet et de la Fondation Maeght. Il a comme ambition de nous donner des clefs de lecture de l’œuvre, mais aussi de nous dévoiler des aspects moins connus de l’œuvre de l’artiste, comme p.ex. son amitié avec des poètes, ou bien encore l’admiration qu’il portait à l’Antiquité égyptienne…

Le livre nous parle aussi de ses rencontres avec d’autres grands artistes de son époque [Constantin BRÂNCUSI (1876 – 1957) (1), Jean GENET (1910 – 1986) (2) ; André BRETON (1896 – 1966) (3)…], de ses rapprochements avec le cubisme, puis le surréalisme, de son attrait pour les arts antiques et extra-occidentaux, de son attachement à la figure humaine, qui chez Alberto GIACOMETTI, s’inscrit à contre-courant de la vague abstraite en vogue après la Deuxième Guerre Mondiale et qui, aujourd’hui, représente pleinement l’homme contemporain.

Que dire de plus? Il m’est bien sûr impossible de parler de tous les aspects de l’œuvre de GIACOMETTI présentés dans ce livre (ses sculptures surréalistes, ses portraits, ses nus, ses rapports avec les poètes…) mais, je peux vous parler d'une des contributions les plus originales de ce catalogue, celle de Mme. Lucie GARÇON, qui nous parle du réalisateur américain Stanley KUBRICK (1928 – 1999). Son film : « 2001, l’Odyssée de l’espace » (1968) (4), tiré du livre d’Arthur C. CLARKE (1917 – 2008) (5), devait montrer des «créatures extraterrestres», se présentant exactement comme une sculpture de M. GIACOMETTI.
C’est ainsi que le croquis d’un personnage gracile, aux pieds volumineux, est visible dans les archives du cinéaste. Ce personnage marche, les bras ballants, avec une allure ressemblant indéniablement à «L'Homme qui marche» d’Alberto GIACOMETTI.
Mais, comment le cinéaste américain connaissait-il l’œuvre de l'artiste suisse? Et bien, par le plus grand des hasards! En effet, une des études photographiques de M. Stanley KUBRICK, - réalisée dans le métro de New York -, avait été présentée au MoMA, en 1951, à l’occasion de l’exposition : «The Exact Instant. 100 Years of News Photography» (6). Or, la présentation de la sculpture de GIACOMETTI, «L’Homme qui pointe» (7) , avait eu lieu juste après celle des photographies…
KUBRICK avait donc vu plusieurs sculptures de GIACOMETTI à cette occasion! «L’Homme qui marche» (8) bien sûr, mais aussi «Les Places», «Quatre femmes sur socle» et «L’Homme qui chavire».
C’est donc cette «expérience» visuelle, - qui l’avait affecté durablement -, que KUBRICK voulait représenter dans son film… Mais, lorsque celui-ci sort en salle en 1968, pas l’ombre d’une quelconque silhouette comparable à celle des sculptures de l’artiste suisse… Le réalisateur américain avait entre-temps changé d'opinion, et abandonné complètement l'idée de conférer une quelconque apparence aux extraterrestres!..

Est-ce que je conseille la lecture de ce livre? Oui. Certainement pour ses explications très originales, et très recherchées. Mais, surtout… Pour l’iconographie, tellement belle et tellement riche que, - plus que la lecture -, je vous propose de vous plonger dans ce livre, en ouvrant une page au hasard, et ensuite simplement de vous laisser porter, et pourquoi pas «emporter» par les émotions entraînées par la vue de la photographie de l’œuvre que vous êtes en train de regarder… Une expérience absolument unique!..

(1). : Cf. : Ici sur CL : https://critiqueslibres.com/i.php/search2/…
(2). : Cf. : Ici sur CL : https://critiqueslibres.com/i.php/vauteur/859
(3). : Cf. : ici sur CL : https://critiqueslibres.com/i.php/vauteur/3527
(4) : Le film est d’ailleurs conservé dans les collections cinématographiques du MoMA de New-York, j’en parle ici sur CL : https://critiqueslibres.com/i.php/vcrit/17537
(5). : Cf. : Ici sur CL : https://critiqueslibres.com/i.php/vcrit/4158
(6). : Le directeur du département des photographies du MoMA était alors le photographe américain d’origine luxembourgeoise : Edward STEICHEN (1879 - 1973), j’en parle toujours dans la même recension : https://critiqueslibres.com/i.php/vcrit/17537
(7). : Cf. Ici : https://www.moma.org/collection/works/81779
(8). : Cf. Ici : https://fondation-giacometti.fr/fr/article/…