L'autre Tartuffe ou La mère coupable
de Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais

critiqué par Cédelor, le 25 septembre 2025
(Paris - 53 ans)


La note:  étoiles
Une pièce méconnue mais plaisante
Et voici le troisième volet de la trilogie sur Figaro !

Cette dernière pièce, « L’autre Tartuffe ou La mère coupable », est bien moins connue que les deux premières, les célèbres Barbier de Séville et Mariage de Figaro. En atteste que sur CL seuls ces derniers titres sont critiqués !

Cette troisième pièce, la dernière qui met en scène le sémillant et habile Figaro, est d’un ton différent de ses illustres devancières. Autant les deux premières étaient pleines d’entrain et d’humour, autant celle-ci est plus sombre et l’humour moins présent. C’est carrément une pièce d’une veine différente. Figaro y est moins omniprésent, même s’il résout tout à la fin, en sauveur plus sagace que les autres.

En fait, une grande part de la pièce a pour pivot le personnage de Bégearss, qui est l’anagramme de Bergasse, un avocat contre qui Beaumarchais a bataillé dans les prétoires judiciaires, et contre lequel il a dû lui en rester une dent pour en reprendre le nom transformé et l’attribuer au « méchant » de la pièce et s’en venger ainsi symboliquement. Donc, c’est cet infâme Bégearss qui fait tourner l’action en dupant le comte Almaviva et sa famille. Heureusement, Figaro veille ! L’honneur (et la fortune) de la famille est sauf, donc la morale.

Ce n’est plus vraiment une comédie, mais plutôt une sorte de drame à suspense. Les dialogues entre les personnages sont plus étoffés, il y a beaucoup moins de réparties, c’est un autre fond et un autre style, loin de ce qui a fait la gloire de Beaumarchais. C’est une pièce qui n’a eu finalement que peu de succès et peu de représentations et n’est pas restée à la postérité.

Pourtant, malgré ses facilités et son peu de vraisemblance, elle est bien écrite et on prend plaisir à en suivre l’histoire jusqu’à son dénouement attendu, même si on se demande bien comment l’auteur va arriver à se sortir du piège que via Bégearss il a mis en place. Mais enfin, il fallait bien que la morale reste sauve, n’est-ce pas ? Quoique des puristes y eussent trouvé à redire, avec les « écarts » de « la mère coupable »… Du père aussi, des écarts il y a, bien sûr, mais que voulez-vous, on fait plus facilement reposer le poids de la bonne moralité sur la femme moins que sur l’homme, du moins dans le théâtre de ce temps-là (la pièce a été écrite dans les années 1790-92, une période sombre de notre pays, qui a certainement dû retentir sur la tonalité de la pièce). Une pièce que j’ai trouvée plus littéraire et moins scénique que les deux premières de la trilogie. À lire quand même, c’est plaisant et on s’y prend.